Province d'Afrique

Province romaine d'Afrique
Provincia Africa Proconsularis
Province de l'Empire romain

 – Ve siècle apr. J.-C.
534–698

Description de cette image, également commentée ci-après
La province d'Afrique au sein de l'Empire romain, v. 125.
Informations générales
Capitale Utique, puis Carthage
Ère historique Antiquité
Histoire et événements
Établi après la troisième guerre punique
Ve siècle apr. J.-C. Invasion des Vandales

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Entités suivantes :

Aujourd'hui, une partie de :
Drapeau de la Tunisie Tunisie
Drapeau de la Libye Libye
Drapeau de l'Algérie Algérie

L’Afrique, ou Afrique proconsulaire, est une ancienne province romaine située sur la côte méditerranéenne de l'Afrique. Son territoire comprend le nord et le sud-est de l'actuelle Tunisie, le nord-est de l'Algérie et le nord-ouest de la Libye.

La province d'Afrique[1] est créée en [1],[2], après la destruction de Carthage[1], au terme de la troisième guerre punique ; ayant Utique pour capitale[3], elle est séparée du royaume de Numidie par une ligne de démarcation[1], la Fossa regia. En , Rome annexe la Numidie avec le nom de « nouvelle province d'Afrique » (Africa Nova) pour la distinguer de la première (Africa Vetus)[1]. Vers 40-, les deux provinces sont réunies dans la province appelée d'Afrique proconsulaire ; ayant Carthage pour capitale, elle s'étend, d'ouest en est, de l'embouchure de l'Ampsaga (aujourd'hui l'Oued-el-Kebir, en Algérie) au promontoire de l'autel des frères Philènes (aujourd'hui Ras el-Ali, en Libye)[1]. En [4], celle-ci est divisée par Dioclétien en trois provinces : la Tripolitaine, la Byzacène et l'Afrique proconsulaire résiduelle, aussi appelée Zeugitane[5].

Histoire

Conquête par Rome

Tridrachme en électrum de Carthage frappé à Zeugitane.
Étendue de la province d'Afrique vers 120.
Villes de l'Empire romain vers 125.
Carte du golfe de Tunis où est situé Carthage.

La province d’Afrique fut conquise en lors de la troisième guerre punique, qui opposait les cités de Carthage et de Rome. En , le consul Scipion Émilien débarqua dans le territoire de Carthage et prit la ville après un siège de trois ans.

Après cette victoire, la ville de Carthage fut détruite et son site voué aux dieux infernaux par une cérémonie d’execratio. Le territoire (chôra) de la cité fut annexée à l’ager publicus, le domaine public de la ville de Rome, formant ainsi une nouvelle province. Sept cités qui ont pris le parti de Rome pendant la guerre conservent leur liberté et ne sont donc pas annexées à l’ager publicus : Utique, Hadrumète, Leptis Minor, Thapsus, Acholla, Usula et Theudalis.

Période de la République

Projets de colonisation

Le territoire de la nouvelle province était assez important, de 20 000 à 25 000 km2[6], mais peu densément peuplé, 700 000 habitants au maximum avant la conquête romaine, et surtout extrêmement fertile. Il constituait donc un territoire de colonisation rêvé pour le parti des populares tentant de résoudre les crises économique et sociale frappant la plèbe romaine par la redistribution de terres de l’ager publicus aux paysans appauvris. En une épidémie ravagea l’Afrique, libérant de nouvelles terres pour une éventuelle colonisation. Ce phénomène ne doit pas être assimilé à la colonisation européenne de l’époque moderne et contemporaine ; pendant l’Antiquité, coloniser c’est fonder une colonie, une cité dépendant de la métropole et bénéficiant de ses lois et de sa protection. En le tribun de la plèbe C. Sempronius Gracchus, chef du parti des populares, fonda une colonie sur le territoire de l’ancienne Carthage : la colonia Iunonia Karthago[7]. Cette colonie était alors la seule existante en dehors de l’Italie. Les terres distribuées aux colons représentaient 300 000 ha, ce qui sous-entend une dispersion des colons dans la province. En , Gracchus fut assassiné et le parti des populares remplacé par celui des optimates, représentants de l’aristocratie romaine ; le mouvement de colonisation subit alors un coup d’arrêt[8].

Théâtre de la ville de Leptis Magna.

Relations avec les royaumes voisins

La province d’Afrique était bordée à l’ouest et au sud par le royaume numide, organisée après la deuxième guerre punique par le roi massyle Massinissa, allié de Scipion l'Africain. À la mort de Micipsa, fils de Massinissa, une querelle sur sa succession opposa ses fils Adherbal et Hiempsal et son neveu Jugurtha. Cette querelle déboucha sur une guerre dans laquelle Rome dut intervenir contre Jugurtha. En une première campagne menée par le consul L. Calpurnius Bestia n’eut que peu d’effet ; ce dernier finit d'ailleurs par conclure un armistice avec Jugurtha[9]. Il fallut en mener une nouvelle campagne contre le roi Numide. C'est le consul Marius et son second Sylla qui, grâce à l’alliance du roi maure Bocchus, réussirent à capturer Jugurtha en [9]. La Numidie ne fut pas annexée entièrement à la province. Seul l'est et le sud du royaume, son débouché sur les plaines de la Medjerda et le golfe de la petite Syrte, furent rattachés à l’ager publicus. La ville de Leptis Magna, située dans cette région, reçut elle le privilège de liberté pour s’être rangée du côté de Rome dans le conflit.

Le Royaume numide proprement dit fut donné à un demi-frère de Jugurtha, Gauda, qui le divisa plus tard entre ses deux fils. À partir de là, il ne fut guère plus qu’un protectorat romain.

Lutte entre Marius et Sylla (vers 80)

Lors de la guerre menée contre Jugurtha le consul Marius, qui devint chef des populares à Rome, avait engagé dans son armée des « prolétaires », des paysans sans terre. Pour les récompenser de leur fidélité, il fit voter à Rome en une loi attribuant à chaque vétéran 252 ha de terres. Les auxiliaires recrutés dans le peuple nomade des Gétules reçurent aussi ces dons en même temps que la citoyenneté romaine. Les implantations de ces vétérans se firent dans la région du royaume numide récemment annexée, ce qui permettait de consolider la frontière avec les territoires du roi Gauda. L'implantation fut importante, rassemblant de 6 000 à 10 000 personnes. On ne peut toutefois pas y voir une colonisation au sens propre puisqu’aucune colonie ne fut fondée dans ce territoire. Lors de la guerre civile qui opposa les partisans de Marius et ceux de son ancien second Sylla entre et , l’Afrique constitua un bastion pour les marianistes, grâce notamment à la présence de ces vétérans de l’armée de Marius.

En , les marianistes d’Afrique détrônèrent le roi de Numidie orientale Hiempsal II, fils de Gauda, partisan de Sylla. Ils furent vaincus par une alliance regroupant le roi maure Bocchus et le second de Sylla, Pompée et en Hiempsal fut restauré. Les syllaniens lui reconnurent même une juridiction sur les Gétules fait citoyens romains par Marius. En les populares empêchèrent le retour dans le giron numide des territoires annexés en , mais il fut reconnu à Hiempsal en l’indépendance de ses terres vis-à-vis de l’ager publicus[10]. Le roi numide est alors un allié des optimates et des pompéiens, successeurs dans une certaine mesure des syllaniens. La rivalité grandissante entre Jules César et Pompée ne manque pas d’avoir des répercussions sur le royaume numide. En , à la mort de Hiempsal, le tribun césarien Curion propose l’annexion de la Numidie orientale[11], ce qui précipite le nouveau roi Juba Ier dans le camp pompéien, qui contrôle alors toute la province.

Lutte entre César et Pompée (vers -48)

En , une première expédition menée par Curion est défaite par les troupes numides[12]. Lors de la défaite pompéienne de Pharsale en [13], les dirigeants du parti pompéien se réfugient en Afrique, où ils forment avec les armées numides une force de plus de 70 000 hommes, dernier obstacle pour César. Ce dernier débarque en avec six légions. Il compte sur l’alliance du roi maure et celle des Gétules, soumis aux Numides depuis En , un Campanien exilé en Maurétanie, P. Sittius, réussit avec l’appui maure à vaincre le roi de Numidie occidentale, Massinissa II, engagé aux côtés de son cousin Juba. Les Numides et les pompéiens sont pris entre deux feux et vaincus dans la plaine de Thapsus. Le roi Juba se suicide, de même que Caton d'Utique, le leader pompéien. La victoire de César est donc totale[13].

César réorganise l’Afrique romaine : le royaume de Numidie occidentale est pour moitié annexé par le royaume maure et pour moitié confié à P. Sittius ; le royaume de Numidie orientale est annexé à l’ager publicus et devient une nouvelle province : l’Africa nova ou Afrique nouvelle. Pour la différencier l’ancienne province d’Afrique prend alors le nom d’Africa vetus Afrique ancienne. Dans la droite ligne de la politique de Marius, César reprend la colonisation en Afrique en envoyant des vétérans italiens, mais aussi gaulois voire africains fonder des ports sur la côte africaine. Cette politique lui permet d’installer ses vétérans, mais aussi de contrôler les trajets de cabotage du blé africain, nécessaire au ravitaillement de Rome.

Prise en main de l’Afrique par Octave (44-36)

Aureus représentant Octave datant de 30 av. J.-C.

Cette nouvelle organisation est bouleversée par la troisième guerre civile, qui oppose entre 44 et les héritiers de César, Octave, Lépide et Marc Antoine, et ses assassins, Brutus et Cassius.

Le prince numide Arabion, fils du dernier roi de Numidie occidentale, tente de reconquérir son royaume sur Sittius en Au même moment le gouverneur de l’Afrique nouvelle, T. Sextius, partisan du triumvirat césarien, élimine son homologue d’Afrique ancienne, partisan du Sénat. En , il élimine Arabion et offre au triumvirat une Afrique unie[14].

Cette dernière est confiée en à Lépide[15]. Mais en ce dernier intrigue contre Octave, qui lui confisque ses possessions. Les deux provinces d’Afrique sont désormais gouvernées par un même magistrat, généralement ancien consul, qui porte le titre de proconsul, d’où le nom d’Afrique proconsulaire que l’on donne à la province unifiée en [16].

ÉVOLUTION DE LA PROVINCE AFRICAINE
Début de la conquête romaine Carthage Royaume de Numidie orientale (Massyles) Numidie occidentale (Massæsyles) Royaume de Maurétanie
de Afrique Numidie Maurétanie
de Africa (après annexion d'une partie de la Numidie) Numidie orientale Numidie occidentale Maurétanie
de Africa Vetus Africa Nova Colonia Cirta Sittianorum Maurétanie orientale (La Numidie occidentale est rattachée à la Maurétanie) Maurétanie occidentale
de Afrique Proconsulaire Maurétanie
de 41 apr. J.-C. Afrique Proconsulaire Maurétanie césarienne Maurétanie tingitane
de 193 Afrique Proconsulaire Numidie Maurétanie césarienne Maurétanie Tingitane
Après la réforme de Dioclétien Tripolitaine Bizacène Zeugitane Numidie Maurétanie sétifienne Maurétanie césarienne Maurétanie Tingitane

Période du Haut-Empire

Réorganisation d'Auguste : création d'une hiérarchie de cités

Octave, qui porte à partir de le titre d’Auguste[17], qui devient le nom sous lequel il est principalement connu, reprend la politique de colonisation de Jules César, mise en sommeil par Lépide. La politique d'Auguste consiste à accentuer la romanisation de l’Afrique en structurant la province selon le modèle de la cité, avec une hiérarchie urbaine distinguant les colonies romaines, les municipes et les cités pérégrines.

Mausolée de Bès à Sabratha.

Auguste fonde notamment un cercle de colonies de droit romain autour de Carthage, mais également dans l'Afrique nouvelle aux confins de la Maurétanie. Ces colonies ont sans doute pour but de renforcer la romanisation de l'Afrique par l'implantation de noyaux citadins fonctionnant sur le modèle romain. La colonie augustéenne la plus importante fut celle de Cirta, située à l'intérieur de de la principauté de Sittius qui n'était pas annexée à la province d’Afrique. À l’autre extrémité du territoire romain d'Afrique, la ville nouvelle de Carthage voit ses privilèges augmentés : elle devient capitale de la province, bénéficie d’une exemption fiscale et surtout est dotée d’un territoire étendu, la pertica Carthagensis, semé de pagi et de castella, communautés de Romains installés en Afrique mais ne constituant pas des cités.

Au second rang se trouvent les municipes, villes qui reçoivent des privilèges d’administration comparables aux villes d'Italie, sans apport de colons romains. Le statut de municipe participe donc à la promotion de villes d’origine indigène. Ces villes sont d'abord au nombre de trois, comptées parmi les sept villes libres du moment de la conquête romaine : Hippone, Utique et Musti. Ce statut de municipe leur est accordé parce que ces villes comptent une majorité de citoyens romains dans leur population, majorité issus des installations de vétérans par Marius et César. Leurs institutions, calquées sur celles de Rome, se distinguent de celles des villes indigènes principalement par la présence d’un sénat, aussi appelé curie, et d’assemblées du peuple.

Amphithéâtre d'El Jem.

Les membres des curies des municipes et des colonies, les décurions, constituent un ordre (ordo), l'ordre décurional, qui a ses privilèges et son cursus honorum : édile, duumvir, duumvir quinquennal (censeur), enfin flamine perpétuel quand on administre le culte impérial. Cette dernière charge est particulière puisqu'elle est exclusivement religieuse. Enfin, le questeur ne fait pas partie du cursus honorum, c'est plus une corvée. Au moment de leur entrée en charge, les magistrats doivent acquitter une somme honoraire qui constitue une bonne part du budget de la cité : 38 000 sesterces pour les duumvirs à Carthage, 20 000 à Cirta.

Au-dessous, les villes indigènes reçoivent le statut de cités pérégrines, qui leur reconnait une personnalité juridique propre et le pouvoir de s’administrer selon leurs propres coutumes. On y trouve souvent une administration dirigée par deux magistrats appelés les suffètes, qui semble avoir une origine carthaginoise et se retrouve dans les villes les plus importantes. Nombre de villes de plus petite taille sont dirigées par un conseil de onze membres, appelés les undecimprimi. Ces cités pérégrines restaient en dehors du droit romain et leurs habitants ne bénéficient pas de la citoyenneté romaine.

Rapports avec le royaume de Maurétanie

Le royaume de Maurétanie était en droit totalement indépendant de Rome, même si dans les faits les souverains maures devaient composer avec la politique romaine pour conserver leurs États. Cette situation prit fin en quand le roi Bocchus II légua son royaume à Octave[18]. Cette cession n’était pas sans ambiguïté politique pour le futur Auguste : se posant en restaurateur des valeurs morales anciennes et respectant en apparence la légalité républicaine, il lui était impossible de devenir roi. Il choisit donc une solution complexe : il donna le royaume à l’ager publicus (c’est-à-dire qu'il en fit la propriété du Peuple Romain), mais y installa un souverain, le prince numide Juba II, fils du dernier roi de Numidie orientale, qui avait été élevé par la sœur d’Auguste, Octavie. Juba II fut marié avec Cléopâtre Séléné, fille de Marc Antoine et de Cléopâtre. Le nouveau roi, installé sur le trône en [19], devait servir de symbole de l’union de l’Afrique avec la romanité. La Maurétanie forma donc un royaume distinct de la province d’Afrique proconsulaire jusqu’à la mort de Ptolémée le fils de Juba et de Cléopâtre en 39 ap. J.-C. Dès 41, la Maurétanie fut organisée en provinces romaines, Tingitane et Césarienne. Les Maurétanies sont alors des provinces impériales, alors que la Proconsulaire, dont elles forment en quelque sorte des marches moins romanisées, moins urbanisées, est une province sénatoriale.

La Maurétanie est divisée en deux provinces séparées par une bande littorale de 300 km aux abords de la rivière Moulouya :

Un procurateur ducénaire (qui gagne 200 000 sesterces par an), nommé par l'empereur, gouvernait ces provinces, avec pour la défendre des unités auxiliaires, divisées en ailes de cavalerie et en cohortes d'infanterie, souvent composées de cavaliers émésiens.

La défense de ces provinces était assurée, en Maurétanie Tingitane par une quinzaine de forts, notamment postés sur la rivière Sebou, et un mur entre Sala et l'Atlas, au sud, en Maurétanie Césarienne, avec deux routes militaires parallèles au littoral.

La Maurétanie sera aussi réorganisée par Dioclétien à la fin du IIIe siècle : la Maurétanie sétifienne est détachée de la Césarienne, tandis que la Maurétanie Tingitane est rattachée à la préfecture d'Espagne.

L'armée : la Legio III Augusta

Deux stèles funéraires au musée de Chemtou (en Tunisie) portant des inscriptions latines de la III Augusta

En , Auguste annexa la Numidie orientale ou Afrique neuve à la province d’Afrique ancienne. Ce faisant, il laissa en place de manière permanente une légion, la III Augusta. Le rôle de cette légion fut d’une grande importance dans l’histoire de la province.

Une cohorte était détachée à Carthage, sous les ordres directs du proconsul, pour assurer la protection et la police de la ville et de la pertica de Carthage. L’armée romaine en Afrique est constituée de la légion, mais aussi d’unités auxiliaires, qui forment la moitié de l’effectif.

Entre 37 et 41, l’empereur Caligula retire au proconsul d’Afrique le commandement de la III Augusta[20]. C’est donc la seule légion à ne pas être sous la direction du gouverneur de sa province de résidence puisqu'un légat impérial nommé par l'empereur la commande.

Cette « exception africaine » illustre bien la position particulière de la province d’Afrique. Cette légion est d'abord basée à Ammaedera, puis à Thebeste en 75 apr. J.-C., puis à Lambese, qui devient définitivement son quartier général, en 115 apr. J.-C. La légion, après le légat, est commandée par six tribuns (chevaliers) dont l'un, le tribun laticlave, est un futur sénateur. Au-delà du quartier général, la légion envoie des missions, les vexilationes, et des groupes en détachement, souvent composées de manières ethniques, les numera.

Événements notables

La présence permanente d’une armée en Afrique est rendue nécessaire par l’insécurité que font peser sur la province les tribus gétules du sud de l’Atlas. Entre 17 et 24, un ancien membre des troupes auxiliaires romaines, Tacfarinas, rassemble autour de lui une confédération tribale, les Musulames, qui rassemble des Gétules du sud de la Proconsulaire. Il s’allie avec les Cinithiens, peuple berbère installé près de la petite Syrte, et avec des tribus maures révoltées contre Ptolémée. Il encercle donc les possessions romaines en Afrique. Malgré l’intervention d’une seconde légion, la IX Hispanica, en 20 aux côtés de la III Augusta, Tacfarinas n’est pas défait. Le conflit s’apaise finalement avec la reconnaissance par le proconsul d’Afrique des droits de passage des tribus gétules en territoire romain.

Après les révoltes de Tacfarinas, les armées romaines d'Afrique doivent faire face à l'agitation des Nasamons et des Garamantes en Tripolitaine, sous les Flaviens, puis à des révoltes des tribus maures, qui envahissent l'Espagne en passant par la Tingitane en 171.

Période du Bas-Empire

Les Maures fomentent de nouveau des troubles en Césarienne dans les années 220 et les Austuriens assiègent Leptis Magna en 253.

La province d'Afrique connaît aussi des conflits internes :

Au Ve siècle, l'Afrique connait l'invasion des Vandales (Genséric), qui prennent Carthage en 439 et instaurent le royaume vandale. La province est reprise par Justinien un siècle plus tard.

Liste (partielle) des proconsuls d'Afrique sous la République

Durant les guerres civiles des années -80 aux années -40, il est difficile de connaitre les gouverneurs légitimes à cause des différentes factions qui contrôlent la province.

Liste (partielle) des proconsuls d'Afrique sous le haut-empire

Tunisie antique

Règne d'Auguste

Règne de Tibère

Règne de Caligula

Règne de Claude

Règne de Néron

Année des 4 empereurs

  • Lucius Calpurnius Piso (69 à 70)

Règne de Vespasien

Règne de Domitien

Règne de Nerva et de Trajan

  • Marius Priscus (97/98)
  • Caius Cornelius Gallicanus (98/99)
  • Caius Octavius Tidius Tossianus Lucius Javolenus Priscus (101/102)
  • Lucius Cornelius Pusio Annius Messalla (103/104)
  • Quintus Peducaeus Priscinus (106/107)
  • Caius Cornelius Rarus Sextius Naso (108/109)
  • Quintus Pomponius Rufus (110/111)
  • Caius Pomponius Rufus Acilius Priscus Coelius Sparsus (112/113)
  • Aulus Caecilius Faustinus (115/116)
  • Caius Iulius Plancius Varus Cornutus Tertullus (116/117)

Règne Hadrien

  • Lucius Roscius Aelianus Maecius Celer (117/118)
  • Marcus Vitorius Marcellus (120/121)
  • Lucius Minicius Natalis (121/122)
  • Marcus Appius Bradua (incertain 122/123)
  • Lucius Catilius Severus Iulianus Claudius Reginus (124/125)
  • Lucius Stertinius Noricus (127/128)
  • Marcus Pompeius Macrinus Neos Theophanes (130/131)
  • Tiberius Iulius Secundus (131/132)
  • Caius Ummidius Quadratus Sertorius Severus (133/134)
  • Caius Bruttius Praesens Lucius Fulvius Rusticus (134/135)
  • (...)catus Publius Valerius Priscus (136/137)
  • Lucius Vitrasius Flamininus (137/138)

Règne d'Antonin le Pieux

  • Titus Salvius Rufinus Minicius Opinianus (138/139)
  • Titus Prifernius Paetus Rosianus Geminus (140/141)
  • Sextus Iulius Maior (vers 141 à 142)
  • Publius Tullius Varro (142 à 143)
  • Marcus Atilius Metilius Bradua Caucidius Tertullus (vers 150)
  • Lucius Minicius Natalis Quadronius Verus (153 à 154)
  • (Ennius?) Proculus (156 à 157)
  • Lucius Hedius Rufus Lollianus Avitus (157 à 158)
  • Claudius Maximus (vers 158/159)
  • Quintus Egrilius Plarianus (vers 159)
  • Titus Prifernius Paetus Rosianus Geminus (vers 160/161)

Règne de Marc-Auréle

Règne de Commode

2e année des 4 empereurs

  • Publius Cornelius Anullinus (192/193)

Règne de Septime-Sévere

Règne de Caracalla

  • Scapula, (212/3);
  • Lucius Marius Maximus Perpetuus Aurelianus (213-215 ou 214–216)
  • Caius Caesonius Macer Rufinianus (entre 212 et 215)
  • [...]mus (216/217)
  • Sextus Cocceius Vibianus (sous Septimius Severus ou, plus probablement, sous Caracalla)
  • Appius Claudius Julianus (entre 212 et 220)
  • Gaius Caesonius Macer Rufinianus (entre 213 et 215)
  • Marius Maximus (entre 213 et 217)

Règne d'Heliogabal et de Sévère Alexandre

Crise du IIIe siècle

Hiérarchie des cités

La dynastie des Flaviens relance la politique de promotion du modèle de la cité en Afrique qu’avait suivie Auguste. Cette politique subit toutefois des aménagements qui traduisent la plus grande part accordée à la promotion des cités indigènes.

Colonie de Timgad

Tout d’abord on peut remarquer un essoufflement du mouvement de colonisation à proprement parler, c’est-à-dire de fondation de cités dépendantes de Rome par un groupe de citoyens romains, le plus souvent vétérans. La dernière colonie fondée, celle de Timgad l’est en 100[25], au moment où la pax romana semble désormais s’étendre à l’Afrique avec l’arrêt des raids de tribus gétules, maures ou sahariennes. Le statut de colonie devient en Afrique un statut purement honorifique qui décore les villes s’étant le plus complètement assimilées au modèle romain.

À l’autre bout de l’échelle des cités, le statut du municipe évolue. Les municipes républicains et augustéens étaient des municipes de droit romain, c’est-à-dire des cités organisées institutionnellement sur le modèle de Rome, avec des magistrats, un sénat et des assemblées du peuple, le municipes flaviens sont des municipes de droit latin. Le droit latin remonte aux première phases de l’expansion romaine, il avait été réactivé par César qui avait distingué plusieurs villes en Narbonnaise de ce statut. La principale distinction du droit latin vis-à-vis du droit romain, c’est le fait que la citoyenneté romaine n’est pas attribuée à toute la population des municipes de droit latin, mais seulement à leurs élites. L’utilisation de ce droit, jusque-là restreint à la Narbonnaise, par les Flaviens révèle la volonté de ceux-ci d’associer les élites indigènes au processus de romanisation.

Une autre innovation est l’utilisation du droit latin délié du statut municipal. En effet le droit latin est concédé à des cités pérégrines modestes où les élites sont trop peu nombreuses pour former un sénat, ce qui les empêche de bénéficier du statut municipal. Ainsi l’association des élites à la Romanitas dépasse le strict cadre des villes importantes.

Une véritable échelle honorifique du statut des villes est ainsi mise en place, la cité pérégrine acquérant ainsi progressivement le droit latin, le municipat, le droit romain et ambition suprême le statut de colonie honoraire. Les différentes cités et leurs élites se lancent ainsi dans une course au statut auprès des empereurs, envoyant notamment des ambassades chargées d’acquérir un statut supplémentaire, témoignage de la réussite de la cité. En effet les villes d’Afrique bénéficient pendant tout le haut-empire d’un contexte économique particulièrement florissant.

Religion

Baptistère de l'église de Vitalis à Sbeïtla (en Tunisie).

L'année 312 constitue un grand tournant dans l’histoire de l’Empire romain et de l’Afrique romaine : c’est la conversion de Constantin le Grand au christianisme[26]. Auparavant, les chrétiens étaient la cible de persécutions périodiques, dues non pas tant à leur qualité de chrétiens qu’à leur refus de participer au culte impérial, par lequel chaque citoyen romain manifeste son appartenance à l’Empire. Après 312, les chrétiens sont théoriquement en position de force, ce qui ne signifie pas la disparition de toutes les autres religions, au contraire. Le christianisme n'a jamais réussi complètement à s’imposer dans les faits à l’ensemble de la population africaine.

La religion des Africains se compose de plusieurs strates : la strate libyque qui est une survivance des cultes rendus aux dieux des panthéons numides et maures à une époque où de puissants royaumes « berbères » occupaient l’espace des futures provinces africaines. De telles survivances sont avant tout observables dans le milieu rural, ainsi que saint Augustin, évêque d’Hippone, l’atteste dans plusieurs de ses lettres. Quelques-uns de ces dieux sont Macurgum, le guérisseur, Macurtam et Iunam, les cavaliers, pour la Numidie et la Proconsulaire, la déesse Aulisia en Maurétanie ; dans cette dernière province, les magistrats romains de l’époque antérieure à la légalisation du christianisme, soucieux de se concilier les dieux locaux, mais ayant des difficultés à prononcer leurs multiples noms, se contentent de les désigner sous le vocable latin de Dii Mauri.

Temple dédié à Agurzil dans le nécropole de Ghirza.

La deuxième strate se compose des survivances de la religion punique, c’est-à-dire des dieux honorés par Carthage, avant sa destruction de 146 avant Jésus-Christ. Dans un premier temps, les romains conquérants ont tenté de se rallier ces dieux par le rite de l’evocatio puis, progressivement, ces dieux ont pris un nouveau visage, au contact de la civilisation romaine. Les deux principaux dieux puniques étaient Baal Hammon et Tanit, protectrice de Carthage et ils ont été assimilés au Saturne et à la Caelestis romains, par le biais de l’interpretatio romana, terme employé par Tacite dans ses œuvres, qui désigne une sorte de syncrétisme ; tout en ayant trouvé des équivalents romains, ces dieux ont conservé leurs particularités africaines, ce que l’historien Le Glay a parfaitement analysé dans son œuvre maîtresse intitulée Saturne africain. Le temple de Saturne à Thugga, par exemple, prend la forme d’un temple punique. Macurgum et Eshmoun sont associés à Esculape, Melqart à Hercule.

Temples de la Triade capitoline à Sbeïtla : Minerve (à gauche), Jupiter (au centre), Junon (à droite).

La troisième strate est celle de la religion romaine officielle qui ne s'impose pas par la force mais qui contraint tout de même les habitants de l’Empire ayant acquis la citoyenneté romaine, à adhérer à quelques principes fondamentaux, résumés par l'adoption de la triade capitoline et du culte impérial.

Les cultes orientaux se diffusent rapidement, avec le concours des fonctionnaires, de l’armée surtout et des commerçants romains : Asclépios (Esculape) dès le IIe siècle, Mithra chez les militaires, surtout en Maurétanie, Cybèle, protectrice des Antonins, au IIe siècle, et Isis et Sérapis, consacrées par leur apparition sur l'arc de triomphe de Lepcis de Septime Sévère.

Le culte impérial prend des formes animistes avec une source consacrée à Septime Sévère, près de Timgad… enfin le sacrifice d'enfants fait l’objet de substitution : un agneau le remplace au dernier moment. Pourtant ils perdurent : au IIIe siècle on retrouvait encore de petites pierres tombales alignées, dans la campagne…

Le culte impérial est organisé par les municipalités : inscriptions, temples, confréries d'affranchis : les collèges de sévirs, flamines particuliers ou perpétuels, statues… et au niveau de la province au sein du conseil provincial des sacerdotales qui défend par ailleurs les intérêts de la province, auprès de l’empereur, contre les abus des gouverneurs. Pour le christianisme en Afrique voir l'essor et l'affirmation du christianisme africain.

Notes et références

  1. a b c d e et f Ibba et Traina 2006, p. 11.
  2. Ibba et Traina 2006, p. 10.
  3. Ibba et Traina 2006, p. 18.
  4. Ibba et Traina 2006, p. 26.
  5. Abdelhamid Hénia, Être notable au Maghreb : dynamique des configurations notabiliaires, éd. Maisonneuve et Larose, Paris, 2006, p. 44
  6. Mélanges d'archéologie et d'histoire, vol. 80, éd. Thorin, Paris, 1968, p. 223
  7. Rico Christian, Sicile antique : Pyrrhus en Occident, éd. Presses universitaires du Mirail, Toulouse, 2009, p. 270
  8. Marie-Pierre Arnaud-Lindet, Histoire et politique à Rome : les historiens romains. IIIe siècle av. J.-C.-Ve siècle apr. J.-C., éd. Bréal, Paris, 2001, p. 98
  9. a et b Ronald Syme et Pierre Robin, Salluste, vol. 282 à 284, éd. Presses universitaires de Franche-Comté, Besançon, 1982, p. 122
  10. Claude Nicolet, Rome et la conquête du monde méditerranéen : 264-27 avant J.-C., éd. Presses universitaires de France, Paris, 1978, p. 637.
  11. Marcel Bénabou, La résistance africaine à la romanisation, éd. François Maspero, Paris, 1976, p. 39.
  12. Vincent Serralda et André Huard, Le Berbère : lumière de l'Occident, éd. Nouvelles Éditions latines, Paris, 1984, p. 39
  13. a et b Vincent Serralda et André Huard, op. cit., p. 40
  14. Encyclopédie berbère, éd. Édisud, Aix-en-Provence, 1989, p. 833.
  15. Romuald Szramkiewicz, Les Gouverneurs de province à l'époque augustéenne, tome 1, éd. Fernand Lanore, Paris, 1972, p. 140
  16. Christian Bonnet et Bertrand Lançon, L'Empire romain de 192 à 325 : du Haut-Empire à l'Antiquité tardive, éd. Ophrys, Paris, 1997, p. 85
  17. Marie-Pierre Arnaud-Lindet, Histoire et politique à Rome : les historiens romains. IIIe siècle av. J.-C.-Ve siècle apr. J.-C., éd. Bréal, Paris, 2001, p. 174
  18. Jacques Alexandropoulos, Les Monnaies de l'Afrique antique : -40 ap. J.-C., éd. Presses universitaires du Mirail, Toulouse, 2007, p. 213
  19. (en) Michael Brett et Elizabeth Fentress, The Berbers, éd. Wiley-Blackwell, Ames, 1997, p. 43
  20. Jocelyne Nelis-Clément, Les beneficiarii : militaires et administrateurs au service de l'Empire (Ier s. a.C.-VIe s. p.C.), éd. De Boccard, Paris, 2000, p. 63.
  21. Michel Christol, L'Empire romain du IIIe siècle : histoire politique, éd. Errance, Paris, 1997, p. 90
  22. François Zosso et Christian Zingg, Les Empereurs romains : 27 av. J.-C.-476 ap. J.-C., éd. Errance, Paris, 1994, p. 128.
  23. Yves Modéran, L'Empire romain tardif : 235-395 ap. J-C, éd. Ellipses, Paris, 2003, p. 147
  24. Denis Roques, Synésios de Cyrène et la Cyrénaïque du Bas-Empire, éd. CNRS, Paris, 1987, p. 222.
  25. Mireille Cébeillac-Gervasoni et Laurent Lamoine, Les élites et leurs facettes, éd. Presses universitaires Blaise Pascal, Clermont-Ferrand, 2003, p. 246
  26. Patricia Briel, Regards sur 2 000 ans de christianisme, éd. Saint-Augustin, Saint-Maurice, 2000, p. 40

Voir aussi

Bibliographie

  • Bernadette Cabouret et Marie-Pierre Arnaud-Lindet, L'Afrique romaine de 69 à 439, éd. Temps, Nantes, 2005
  • Paul Corbier et Marc Griesheimer, L'Afrique romaine : 146 av. J.-C.-439 ap. J.-C., éd. Ellipses, Paris, 2005
  • [Ibba et Traina 2006] Antonio Ibba et Giusto Traina, L'Afrique romaine : de l'Atlantique à la Tripolitaine (- apr. J.-C.), Rosny-sous-Bois, Bréal, coll. « Histoire ancienne et médiévale / Histoire ancienne », , 1re éd., 1 vol., 206, 21 cm (ISBN 2-7495-0574-7 et 978-2-7495-0574-9, OCLC 470186112, BNF 40148018, SUDOC 098326295, lire en ligne).
  • Yves Lafond et Hélène Guiraud, L'Afrique romaine : Ier siècle avant J.-C., début Ve siècle après J.-C., éd. Presses universitaires du Mirail, Toulouse, 2005
  • (en) J.M. Reynolds et J.B. Ward-Perkins (eds.), Inscriptions of Roman Tripolitania (IRT), Rome, 1952
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