Le , Hitler ordonne la construction d'un pont routier et ferroviaire au-dessus du détroit de Kertch, qui doit être édifié en 6 mois. L'organisation Todt commence les travaux en , mais dès le , de puissants bombardements forcent l'arrêt des travaux. Seul un tiers de l'ouvrage prévu avait alors été construit. Dans le cadre de la retraite allemande, le pont est alors dynamité[2].
Un premier pont sur ce détroit est construit durant l'été 1944, après la libération de la Crimée par l'Armée rouge, en utilisant en partie les matériaux laissés par l'organisation Todt. Ce pont est détruit par la glace lors de la débâcle six mois après sa mise en service, faute d'épis lors de sa construction[3].
Projets ultérieurs
Si plusieurs propositions sont faites sous l'URSS, notamment dans les années 1960, aucune n'est sérieusement étudiée.
La suspension de la signature de l'accord d'association entre l'Ukraine et l'Union européenne en entraîne un regain d'intérêt pour le projet de pont[6]. À la fin , les gouvernements ukrainien et russe décident qu'une nouvelle société conjointe devrait être chargée de la construction. La société russe Rosavtodor (en russe : Росавтодор) serait alors chargée de son exploitation. On estime alors la durée des travaux de construction à cinq ans pour un prix compris entre 1,5 et 3 milliards de dollars.
Pont actuel
Construction
En mars 2014, à la suite de la crise de Crimée et de l'annexion de la Crimée par la fédération de Russie, la Russie annonce son intention de construire le pont. Le projet est doté d'un budget plafonné à 228,3 milliards de roubles, soit environ 2,9 milliards d'euros et 3 milliards de dollars[7],[8]. Le chantier est confié le [8] à Stroïgazmontaj, une entreprise russe spécialisée dans la construction et dirigée par Arkadi Rotenberg[6].
La construction du pont — routier à 2 × 2 voies[9] et ferroviaire à deux voies —, commence en [10]. Malgré les sanctions internationales, les travaux progressent rapidement[11] et son achèvement a eu lieu en fin 2019. Ce pont est également un projet symbolique, destiné à matérialiser le rattachement de la Crimée à la Russie ; les ouvriers y travaillent par rotations de 24 heures par jour afin de tenir les délais, et la construction se veut entièrement russe[9].
La traversée, qui passe notamment par l'île de Touzla, a une longueur de 19 km, pour une hauteur du tablier maximale de 35 mètres[10].
À partir de , l'Union européenne et les États-Unis décident de sanctions en lien avec la crise de Crimée, étendues depuis aux entreprises participant à la construction du pont de Crimée[12]. En septembre 2017, l'annonce que deux sociétés néerlandaises ont contribué à la construction du pont fait débat[13]. Selon les juristes spécialistes du domaine, la participation, même indirecte, d'une entreprise néerlandaise à la construction de ce pont est en effet une violation des sanctions[14]. Le parquet néerlandais ouvre en une enquête visant sept entreprises nationales soupçonnées de violation des sanctions[15].
En , le service de presse du pont annonce que la découverte d'un site archéologique hellénique sur le trajet de la voie ferroviaire projetée nécessite de dévier le tracé dans les environs de Kertch afin de protéger le site[réf. souhaitée].
Ouverture
Le pont routier est inauguré le par Vladimir Poutine, président de la fédération de Russie[16]. L’ouverture à la circulation routière a lieu le lendemain, le pour les véhicules légers et les autocars, et en pour les poids lourds.
L’inauguration de la partie ferroviaire du pont a eu lieu le [6].
Infrastructures
L’autoroute de Tauride, d’une longueur totale de 258 km, dont la mise en service complète est prévue en 2023, doit relier le pont de Crimée à Sébastopol, via Kertch, Théodosie, Belogorsk, Simferopol et Bakhtchissaraï.[réf. nécessaire]
Il est traversé par la voie ferrées reliant la gare de Baherove à la gare du port à Taman, il réduit ainsi le temps de trajet des trains de voyageurs de Moscou à Simferopol de deux jours à dix-huit heures.
Conséquences sur le trafic maritime
Les arches du pont de Crimée ne permettent pas le passage de navires ayant plus de 33 mètres de tirant d'air[17]. Cette limitation exclut les navires de type Panamax dépassant cette hauteur qui représentaient auparavant 20 % du trafic vers les ports ukrainiens de Berdiansk et de Marioupol par lesquels transitent une grande partie des exportations céréalières et quasiment tout le trafic sidérurgique provenant du Donbass, le cœur économique de l'Ukraine[18]. En 2018, le port de Marioupol voit son trafic diminuer de 27 %.
Le 17 août 2022, durant l'Invasion de l'Ukraine par la Russie, le conseiller de la présidence ukrainienne Mykhaïlo Podoliak menace d'attaquer le pont de Kertch, le considérant comme une cible militaire légitime, et déclare : « Ce pont est une structure illégale et l'Ukraine n'a pas donné sa permission pour sa construction. Il porte préjudice à l'écologie de la péninsule et doit donc être démantelé. Peu importe comment : volontairement ou non[19]. »
Le 8 octobre, le lendemain de l'anniversaire de Vladimir Poutine, après avoir évoqué qu'« une citerne de carburant » aurait pris feu sur le pont de Kertch, les agences de presse russes indiquent, par l'intermédiaire du Comité national antiterroriste russe[20] :
« Aujourd'hui à 6 h 7 (3 h 7GMT) sur la partie routière du pont de Crimée... a eu lieu l'explosion d'un camion piégé[21], qui a entraîné l'incendie de sept citernes ferroviaires qui allaient vers la Crimée[22]. »
En effet, des vidéos montrent le pont de Crimée en partie effondré et l'incendie de sept wagons-citernes d'essence dans sa partie ferroviaire. Un camion piégé est à l'origine des destructions. Vladimir Poutine demande une enquête pour déterminer l'origine des faits[23],[24]. Le pont sert de voie, notamment, pour le transport d'équipement militaire pour l'armée russe combattant en Ukraine[23],[25]. Une des deux voies routières est en partie effondrée et la voie ferroviaire est plus modérément endommagée, paralysant dans un premier temps totalement le trafic sur les deux voies. Néanmoins, la circulation routière reprend en fin d'après-midi pour les véhicules légers, et la circulation ferroviaire dans la soirée[26]. Les poids-lourds ne peuvent emprunter le pont avant décembre 2022[27].
Le 17 juillet 2023, Sergueï Aksionov, le gouverneur russe de la péninsule de Crimée, indique : « La circulation a été interrompue sur le pont de Crimée. Une urgence s'est produite dans la zone du 145e pilier depuis le territoire de Krasnodar[28]. Les forces de l'ordre et tous les services compétents sont à pied d'œuvre ». The Kyiv Independent rapporte que des médias russes font état de deux attaques nocturnes sur le pont de Crimée, la première à 3 h 4 et la seconde à 3 h 20, que la circulation est interrompue et que deux personnes ont été tuées et une blessée[29],[30],[31],[32],[33]. L'attaque aurait été opérée par la marine ukrainienne et les Services de sécurité ukrainiens (SBU) avec des drones navals[34],[35],[36]. La circulation sur la pont a été bloquée le 27 juin 2024 par une attaque cyber ukrainienne[37].
Conséquences
Le pont est depuis interdit à la circulation des camions de plus de une tonne cinq[38], des heures d'attente avant de traverser, des fouilles systématiques[39]. Le passage en ferry entre les ports de Krym et de Kavkaz est réactivé.
↑ a et b« Guerre en Ukraine : la circulation rétablie, la Russie poursuit l’enquête après l’explosion sur le pont de Crimée », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )