Une péricardite est une inflammation du péricarde, le sac fibro-séreux translucide qui entoure le cœur. Elle peut s'accompagner ou non d'un épanchement péricardique et en cas de fibrose et calcifications (avec alors épaississement du péricarde) évoluer vers une péricardite constrictive qui gêne le fonctionnement du cœur (insuffisance cardiaque droite, qui aura aussi des effets négatifs collatéraux sur le foie).
Elle est dite « chronique » si elle n'a pas disparu après 6 mois[1].
On la distingue d'un épanchement péricardique, qui correspond à la présence de liquide dans le péricarde, sans obligatoirement d'inflammation. Ces deux phénomènes restent cependant très proches.
Épidémiologie
Dans les services d'urgence, une péricardite est trouvée chez environ 5 % des patients venus pour une douleur thoracique[3]. Les 2/3 environ des victimes sont des hommes, pour un tiers de femmes[4]. Un tiers des cas est associé à une myocardite[3].
un syndrome viral actuel ou récent : rhume, angine, douleurs musculaires…
L'examen du patient peut montrer de manière inconstante :
un frottement péricardique à l'auscultation cardiaque : il s'agit d'un bruit superficiel perçu lors de la systole et de la diastole, évoquant une « feuille de papier froissée » ou un « craquement de cuir neuf ». Il persiste en apnée (ce qui permet de la différencier du frottement pleural).
Des signes pouvant évoquer une forme grave (dite « compliquée ») sont à rechercher :
Un signe clinique simple — dit « signe de la prière mahométane » (sic) — peut être recherché devant une douleur thoracique augmentée à l'inspiration profonde. Il n'est pas pathognomonique de la péricardite mais il peut servir d’élément d'orientation diagnostique. Il consiste à demander au patient d'effectuer une antéflexion du tronc (assis, il se penche en avant, la tête vers les genoux), en cas de péricardite, la douleur et la dyspnée diminuent[5].
Examens complémentaires
L'ECG permet d'éliminer le diagnostic d'infarctus du myocarde, autre cause de douleurs thoraciques prolongées. Il peut être normal mais il est généralement perturbé. Cet examen est à réitérer.
Le premier signe, retrouvé dans 80 % des cas, montre un sous-décalage diffus du segment PQ.
On décèle classiquement des troubles de la repolarisation avec des anomalies du segment ST diffuses évoluant en 4 stades successifs :
stade I, dans les 24 premières heures : aspect de lésion sous-épicardique avec sus-décalage du ST concave en haut et sous-décalage du PR ;
stade II, entre la 24e et la 48e heure : retour du segment ST à la ligne isoélectrique ; diminution de l'amplitude des ondes T qui deviennent plates (aspect « en verre de montre ») ;
stade III, repéré avant la 1re semaine : aspect d'ischémie sous-épicardique avec des ondes T devenant négatives ;
stade IV : retour à la normale, en deux mois maximum.
Ces anomalies sont diffuses dans toutes les dérivations et concordantes, sans image en miroir.
Il existe rarement un aspect de bas voltage diffus lorsque l'épanchement est important. Il y a parfois des troubles du rythme auriculaire, fibrillation et flutter auriculaire[6].
L'échocardiographie peut retrouver un liseré sombre autour du cœur, liseré plus ou moins épais, signant la présence de liquide dans le péricarde, et donc, le diagnostic de péricardite. Si ce décollement péricarditique est visualisé, on peut en apprécier le volume et le retentissement sur les cavités cardiaques (essentiellement droites) et le septum avec la présence d'un Signe de Maurin à la recherche d'une forme sévère. Fréquemment, l'examen est strictement normal, ce qui n'élimine cependant pas le diagnostic.
L'IRM cardiaque, plus sensible que l'échographie, montre et situe une inflammation en hypersignal du péricarde. Il n'est pas cependant nécessaire en cas de péricardite banale.
La radiographie thoracique n'est anormale que s'il existe un épanchement abondant. Elle montre alors une augmentation de taille de la silhouette cardiaque (cardiomégalie) symétrique avec un aspect en « théière » ou en « carafe ».
Causes
Dans près de huit cas sur dix, aucune cause n'est identifiée[8] et l'évolution est simple. Sous réserve de l'absence de point d'appel, il est inutile de lancer alors une recherche exhaustive de la cause.
Un mécanisme auto-immun pourrait parfois être en cause et expliquer les récidives[9], certains anticorps ciblant le cœur étant retrouvés[10].
En principe, on distingue les causes infectieuses et non infectieuses.
Un infarctus du myocarde peut provoquer une péricardite (pericarditis epistenocardica), dès le début, ou plusieurs semaines après. Dans le premier cas, elle témoigne de l'atteinte de toute l'épaisseur de la paroi (nécrose transmurale) et peut (rarement) être évocatrice d'un risque de rupture du cœur. Dans le second cas, il s'agit d'un phénomène inflammatoire réactionnel, non péjoratif (syndrome de Dressler) ;
L'association d'une douleur de type péricardique avec une élévation du taux de la troponine sanguine est évocatrice d'une myopéricardite virale par atteinte simultanée du muscle cardiaque.
Traitement
La prise en charge des péricardites aiguës a fait l'objet, en 2015 de recommandations par l'European Society of Cardiology[11].
Une péricardite virale est traitée par :
le repos ;
l'aspirine (efficace dans près de 80 % des cas[12]), la colchicine avec l'aspirine est le traitement le plus rapide et avec le moins de risque de récidive [13],[14],[15], des anti-inflammatoires non stéroïdiens, des corticoïdes. Le traitement doit être prolongé au minimum jusqu'à la normalisation du syndrome inflammatoire, en général un mois. Un traitement protecteur gastrique peut être donné pour pallier la possible mauvaise tolérance digestive des fortes doses ;
les corticoïdes sont réservés aux formes résistantes. Ils ont l'inconvénient d'avoir un risque de rechute élevé lorsqu'ils sont employés à doses importantes (prednisone 1mg/kg), ce fait préférer des doses moindres[16]. En cas d'échec, un traitement ciblant l'interleukine 1 peut être proposé[17].
Dans les formes résistantes ou récidivants, on peut proposer un traitement immunomodulateur comme le rilonacept[18], permettant un sevrage plus facile en corticoïdes.
une antibiothérapie prolongée par voie générale, adaptée au germe.
Les péricardites tuberculeuses sont traitées par :
un traitement anti-tuberculeux classique mais prolongé pendant un an ;
une corticothérapie dans certains cas, ce qui pourrait diminuer le risque de constriction.
Sans caractère de gravité, une hospitalisation n'est pas nécessaire[19]. De même, la recherche de la cause n'est pas systématique en l'absence de signe d'appel.
En cas de récidive, le même traitement peut être reconduit. Dans ces cas, la colchicine, donnée pendant trois mois en association avec l'aspirine, réduit significativement le risque de récidive[20].
Cette dernière molécule, donnée en plus du traitement habituel lors du premier épisode semble également améliorer les symptômes et diminuer le risque de récidive[21].
Évolution et complications
L'évolution se fait, dans la majeure partie des cas, vers la guérison sans séquelles.
Elle peut cependant récidiver, surtout dans les quelques mois. Les récidives au-delà d'un an sont plus rares[7]. Le traitement est alors prolongé de plusieurs mois[7]. Ces récidives sont plus fréquentes s'il existe une maladie auto-immune ou si le niveau de CRP reste élevé[22].
Il s'agit d'une compression des cavités cardiaques par le liquide sous pression dans le péricarde, empêchant ainsi le cœur de se remplir correctement.
La tamponnade se manifeste par une baisse de la pression artérielle pouvant aller jusqu'au collapsus, voire à l'arrêt cardiorespiratoire. Il s'agit d'une complication grave nécessitant la prise en charge urgente en milieu spécialisé.
On la soupçonne devant un épanchement péricardique associé à des signes de mauvaise tolérance : essoufflement (dyspnée) particulièrement marqué lorsque le patient est en position allongée, chute de la pression artérielle, veines jugulaires particulièrement apparentes (turgescence jugulaire) surtout en position assise où normalement elles ne sont dans ce cas quasiment pas visibles.
Le diagnostic est fait par l'échocardiographie qui montre un épanchement plus ou moins important dans le péricarde, et surtout, un aplatissement des cavités droites (les premières à se comprimer, la paroi des cavités gauches étant plus épaisse), une veine cave inférieure dilatée, ne variant pas avec la respiration (normalement, elle s'aplatit durant l'inspiration).
En cas de suspicion de tamponnade, le patient doit être laissé à jeun et maintenu en position assise avec une surveillance rapprochée de la tension artérielle. Une perfusion doit être posée afin d'obtenir un remplissage vasculaire correct.
Le traitement est le drainage de l'épanchement, soit chirurgical soit percutané (avec une aiguille). La chirurgie consiste en l'évacuation de l'épanchement par une incision sous la xiphoïde sternale et l'installation d'un drain (tuyau relié à un système d'aspiration permettant l'écoulement du liquide). Le chirurgien profite de l'opération pour prélever le liquide et un morceau de péricarde (biopsie) pour analyse et recherche d'une cause. Cette intervention, simple et rapide, peut être faite dans un service de chirurgie non spécialisé. La ponction à l'aiguille est faite par un cardiologue interventionnel par ponction sous-xyphoïdienne généralement sous contrôle échocardiographique.
Il s'agit d'un épaississement des feuillets constituant le péricarde, avec éventuelles adhésions au cœur. « La rigidification et l'épaississement du péricarde altèrent fortement le remplissage ventriculaire, réduisant le volume systolique et le débit cardiaque »[1]. C'est une maladie chronique, souvent insidieuse et dont le diagnostic est difficile.
On la découvre souvent à l'occasion de douleurs abdominales droites (à l’effort au début), accompagnée de signes d'une insuffisance cardiaque droite (œdèmes des membres inférieurs, épanchements liquides dans la cavité abdominale [ ascite ]) et « gros foie » ; la pression veineuse systémiquement élevée et de la pression veineuse hépatique peuvent conduire à une « cirrhose cardiaque », le patient pouvant alors se présenter pour un bilan de cirrhose plutôt que pour un problème cardiaque[1].
Elle peut suivre assez rapidement une péricardite bénigne liquidienne. Elle apparait parfois 5 à 10 ans après la guérison d'une péricardite et semble insidieusement possible sans antécédent péricarditique. Évoluant souvent vers une fibrose avec calcification, elle peut ensuite gêner le cœur et notamment indirectement affecter le foie (mal irrigué).
Sa cause autrefois la plus fréquente était la tuberculose, mais elle est devenue rare[1] ; elle peut aussi selon certains auteurs[23] être induite par une radiothérapie, ou par l'exposition chronique à des vibrations intenses et à des ondes de basse fréquence à un niveau élevé (Maladie vibroacoustique), ou plus rarement être liée à un cancer du péricarde. Elle complique exceptionnellement une péricardite virale banale[24].
Elle se manifeste par un tableau d'insuffisance cardiaque droite : œdèmes des jambes, gros foie parfois douloureux, veines jugulaires particulièrement apparentes (« turgescentes »). Le tableau est proche d'une insuffisance cardiaque, dite restrictive.
L'échocardiographie peut montrer de manière inconstante un épaississement du péricarde avec des anomalies du remplissage cardiaque au doppler. Le scanner peut confirmer le diagnostic en démontrant l'épaississement du péricarde qui peut être généralisé ou localisé, l'examen de référence est le cathétérisme cardiaque droit qui est un examen invasif.
Le traitement est l'ablation chirurgicale du péricarde ("péricardectomie" ou "décortication"), une opération minutieuse et délicate.
Notes et références
↑ abc et dBrian D. Hoit, fiche Péricardite, Manuel MSD (Merck and Co.), consulté le .
↑(en) Massimo Imazio, Fiorenzo Gaita et Martin LeWinter, « Evaluation and Treatment of Pericarditis: A Systematic Review », JAMA, vol. 314, no 14, , p. 1498 (ISSN0098-7484, DOI10.1001/jama.2015.12763, lire en ligne, consulté le )
↑(en) Massimo Imazio, Antonio Brucato, Roberto Cemin et Stefania Ferrua, « A Randomized Trial of Colchicine for Acute Pericarditis », New England Journal of Medicine, vol. 369, no 16, , p. 1522–1528 (ISSN0028-4793 et 1533-4406, DOI10.1056/NEJMoa1208536, lire en ligne, consulté le )
↑(en) Massimo Imazio, Marco Bobbio, Enrico Cecchi et Daniela Demarie, « Colchicine in Addition to Conventional Therapy for Acute Pericarditis: Results of the COlchicine for acute PEricarditis (COPE) Trial », Circulation, vol. 112, no 13, , p. 2012–2016 (ISSN0009-7322 et 1524-4539, DOI10.1161/CIRCULATIONAHA.105.542738, lire en ligne, consulté le )
↑Alves-Pereira M, de Melo J.J & Branco N.A.C (2005) Low frequency noise exposure and biological tissue: reinforcement of structural integrity ? In Recent Advances in Multidisciplinary Applied Physics (pp. 961-966)| résumé