Un mélange gazeux réactif est décrit par sa composition chimique, laquelle peut être donnée sous des formes diverses. Les réactions chimiques présentes dans ce milieu obéissent dans le cas général à la loi d'action de masse et la composition est obtenue par résolution du système réactionnel. Dans le cas particulier de l'équilibre chimique il est possible de mettre en œuvre diverses méthodes pour caractériser le milieu sans connaître explicitement sa composition. Cette caractérisation porte sur les propriétés thermodynamiques mais également sur les propriétés de transport : on définit ainsi une conductivité thermique réactionnelle qui représente en fait la diffusion dans le milieu.
La masse molaire moyenne est donnée en fonction des masses molaires individuelles par :
On peut également caractériser incomplètement le milieu par la fraction élémentaire :
où est le nombre d'éléments dans l'espèce . est le nombre total d'éléments présents dans le milieu et est la masse molaire de l'atome . Les fractions élémentaires vérifient .
La connaissance des ne permet pas en général de remonter à la composition du milieu en espèces, sauf le cas particulier .
Milieu réactif
Cas général
Les réactions chimiques entre espèces dans le milieu sont formalisées par le système comportant réactions :
On définit la matrice stœchiométrique de dimension par[Note 1] :
et sont les constantes de réaction directe et inverse (rétrograde), le nombre de moles formées par unités de volume et de temps par la réaction et la masse de l'espèce formée par unités de volume et de temps.
Les constantes de réaction sont généralement exprimées sous une forme généralisant la loi d'Arrhenius :
Les constantes intervenant dans cette équation sont liées :
par la relation d'équilibre thermodynamique :
est le changement de stœchiométrie dans la réaction et la valeur de référence de pression[Note 2].
par la variation d'enthalpie dans la réaction :
par la variation d'entropie dans la réaction :
Les quantités , et sont compilées dans les bases de données thermodynamiques[1] disponibles par exemple sur le site du National Institute of Standards and Technology[2],[3]. On trouve par ailleurs des bases de données pour les cinétiques de réaction, par exemple pour les hydrocarbures[4]. La cohérence entre données thermodynamiques et cinétiques n'est pas toujours assurée.
Une seule réaction
De nombreuses réactions sont décrites par une seule réaction, par exemple la combustion d'un hydrocarbure. Dans ce cas la production ou la disparition du nombre de moles ne dépend que de la stœchiométrie :
Équilibre thermodynamique
L'équilibre thermodynamique est classiquement calculée à pression constante par minimisation de l'énergie libre du système :
où et sont les enthalpie et entropie molaires à la pression de référence .
Pour un système fermé cette minimisation s'effectue sous la contrainte de respecter la composition élémentaire :
La méthode des multiplicateurs de Lagrange est particulièrement bien adaptée à la résolution de ce problème.
Pour les systèmes ouverts que l'on rencontre dans certains problèmes de mécanique des fluides il existe un apport inhomogène en fractions élémentaires du milieu extérieur dans le domaine que l'on considère. Plutôt que de résoudre le système chimique complet, lequel peut être très volumineux, il peut être intéressant de travailler dans le cas général sur un système réduit[5] et, dans le cas de l'équilibre thermodynamique, sur un pseudo-système équivalent décrit ci-dessous.
L'équilibre thermodynamique peut être obtenu par l'algèbre linéaire en remarquant que le nombre de réactions indépendantes conduisant à celui-ci est . À partir de la matrice on construit la matrice qui est de dimension et de rang ; les réactions indépendantes correspondent à ses valeurs propres nulles et sont données par les vecteurs propres correspondants en écrivant les réactions sous forme symbolique[6] :
Exemple
Considérons le cas de l'air qui, pour des températures inférieures à 6 000 K est constitué majoritairement par les espèces , dans cet ordre. Les éléments sont , dans cet ordre.
Le calcul donne :
Les () vecteurs propres correspondants aux valeurs propres nulles sont :
D'où les réactions indépendantes correspondantes à chacune des valeurs propres :
Ce résultat est lié à l'ordre dans lequel on liste les espèces : un autre ordre conduit à un résultat différent mais équivalent.
La réalité physique de ces réactions est sans intérêt. Il est possible de créer de toutes pièces des coefficients de réaction et qui respectent l'équilibre et donc conduisent au bon résultat. De plus, ceux-ci peuvent être choisis sur des critères purement numériques de manière à éviter des temps caractéristiques de réaction trop disparates, ce qui dans la réalité physique est assez contraignant pour le calcul.
La contrainte , où la fonction est l'une des variables du problème traité (pression, énergie interne...) sera résolue en même temps que le système réactionnel, sous forme relaxée :
où est un temps caractéristique arbitraire choisi voisin de celui des réactions chimiques.
L'intérêt de cette méthode réside dans le gain de temps, notable dans les gros calculs de mécanique des fluides où ce calcul est effectué dans toutes les mailles, à tous les instants.
Conductivité réactionnelle
Outre la conduction il existe dans un milieu réactif un flux de chaleur lié à la diffusion :
On souhaite calculer cette quantité sans passer par les méthodes générales[6] qui supposent de connaître la composition. Pour cela on part de la définition de la constante d'équilibre (connue par l'intermédiaire d'une base de données) écrite sous la forme :
En dérivant par rapport à la température il vient :
La matrice stœchiométrique étant de rang il faut fermer le système par les équations de conservation des éléments (dont sont indépendantes) :
On dérive par rapport à la température en supposant constant :
La dernière équation sera obtenu en dérivant la relation de définition :
Au final on obtient le système linéaire :
où
Un exemple simple est celui de la décomposition de l'oxygène qui conduit à :
↑Les bases de données thermodynamiques utilisent généralement la valeur .
Références
↑(en) M. W. Chase, Jr., C. A. Davies, J. R. Downey, Jr., D. J. Frurip, R. A. MacDonald et A. N. Syverud, « JANAF Thermochemical Tables Third Edition », Journal of Physical and Chemical Reference Data, vol. 14, no 1,
↑(en) D. D. Wagman, W. H. Evans, V. B. Parker, R. H. Schumm, I. Halow, S. M. Bailey, K. L. Churney et R. L. Nuttall, « The NBS tables of chemical thermodynamic properties - Selected values for inorganic and C1 and C2 organic substances in SI units », Journal of Physical and Chemical Reference Data, vol. 11, no 2, (lire en ligne)
↑(en) D. R. Stull et H. Prophet, Janaf Thermochemical Tables _ Second edition, National Standard Reference Data System, (lire en ligne)
↑(en) A. Burcat, G. Dixon-Lewis, M. Frenklach, W. C. Gardiner, Jr., R. Hanson, S. Salimian, J. Warnatz et R. Zellner, Combustion Chemistry, Springer-Verlag,
↑(en) Bruno Sportisse Ed., Workshop Numerical aspects of reduction in chemical kinetics, CERMICS,