Michel Jajolet de la Courbe

Michel Jajolet de La Courbe
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Biographie
Activité

Michel Jajolet de la Courbe, fut un des directeurs du Comptoir de Saint-Louis du Sénégal. Après son premier voyage au Sénégal, il écrivit en 1685 Premier voyage du Sieur La Courbe fait en Afrique[1].

D'après Prosper Cultru, ce livre fut plagié par Jean-Baptiste Labat dans son livre Nouvelle Relation d'Afrique parue en 1728, dans lequel toutes les aventures que Michel Jajolet de La Courbe fait en 1685, sont attribuées à André Brue.

Biographie

Le , Michel Jajolet de la Courbe partit du Havre pour le Sénégal, avec pour instruction de la Compagnie du Sénégal d'observer la conduite des commis. Il portait une lettre de recommandation pour Louis Moreau de Chambonneau, commandant de Saint-Louis du Sénégal et une pour le Sieur Denis Basset, commandant à Gorée, leur ordonnant de ne rien lui cacher, de lui faire voir toutes les traites, de le recevoir comme un Directeur.

Michel Jajolet de la Courbe parvint au Cap-Blanc le , et en vue de la barre de Saint-Louis du SĂ©nĂ©gal le oĂą il se signala par 3 coups de canon. La barre avait deux passes, dont la plus grande avait 10 pieds de profondeur et 3 encablures de large ; elle Ă©tait praticable aux barques de la Compagnie, montĂ©es par des Laptot, payĂ©s une barre de fer par mois. La seconde Ă©troite et peu profonde, ne pouvait ĂŞtre franchie que par les canots des Africains, qui n'avaient que 5 ou 6 pieds de long, le fond Ă©tait en une pièce, et les cĂ´tĂ©s Ă©taient ajoutĂ©s, rattachĂ©s avec des cordes d'Ă©corce et calfatĂ©s avec de la paille hachĂ©e mĂ©langĂ©e Ă  de la terre grasse. Ils portaient ordinairement 5 hommes pagayant debout, dont l'audace faisait peur, tant leurs embarcations semblaient fragiles et prĂŞtes Ă  tourner Ă  tout moment.

Michel Jajolet de la Courbe passa cette terrible barre dans une chaloupe qui faillit couler, ayant Ă©tĂ© remplie par une lame ; heureusement une seconde la redressa l'avant en l'air et vida l'eau embarquĂ©e sans emporter personne.

Il alla voir les cases des habitants, chacun d’eux avait une Africaine, pour, dirent-ils, faire la cuisine. Mais, dans une grande case, il en trouva plusieurs de mauvaise vie, ce qui le scandalisa. Il avait ordre de la Compagnie d’empĂŞcher de tels abus. Il le signala au commandant Louis Moreau de Chambonneau, et le lendemain toutes les Africaines furent transportĂ©es de l’autre cĂ´tĂ© du fleuve, Ă  la grande colère des habitants qui se plaignaient de n’avoir plus personne pour « faire leur ordinaire Â». Louis Moreau de Chambonneau dut, le jour mĂŞme, instituer une cuisine commune pour Ă©viter toute tentation Ă  l’austĂ©ritĂ© nouvelle de ses hommes.

Au bout de quelques jours, ce dernier proposa à Michel Jajolet de la Courbe, de l’accompagner en voyage sur le fleuve jusqu’à Galam. Celui-ci souffrant de la fièvre se récusa. Aussi Louis Moreau de Chambonneau, pendant qu’il découvrirait le Haut-Fleuve, voulut lui confier toutes les marchandises, devant son refus, car Michel Jajolet de la Courbe souhaitait qu’un inventaire fut fait. il ne lui laissa qu’un coffre ou deux, nécessaire à la traite. le reste fut mis sous clef.

Avant de partir, Louis Moreau de Chambonneau confia à Michel Jajolet de la Courbe une liste moins importante des marchandises qu’il emportait. Plus tard il l'accusera devant la Compagnie du Sénégal, d’avoir soustrait les pièces qui manquaient dans les magasins.

Le , Michel Jajolet de la Courbe, accompagnĂ© du Sieur Derousy, ancien commis, du Sieur Jehan de Lestrille, capitaine de la « RenommĂ©e Â» et de l’abbĂ© des Roziers, un des aumĂ´niers, partirent Ă  bord de deux chaloupes visiter l’île de Jean Barre et de Dyemsec, distance d’un demi quart de lieue; qui se trouvait de l’autre cĂ´tĂ© du fleuve, Ă  l’est du fort de Saint-Louis. Ils emmenèrent quelques commis, des habitants nouvellement arrivĂ©s et deux interprètes « africains Â» chrĂ©tiens qui avaient Ă©tĂ© Ă©levĂ©s en France.

Ils arrivèrent au « Lougans Â» de Jean Barre qui Ă©tait en train de faire labourer ses champs, au son d’une musique enragĂ©e, par une soixantaine de captifs complètement nus, munis de petites bĂŞches Ă  long manche, appelĂ©s « Ă®lets Â». Le vieillard avait plus de 60 ans et les cheveux gris, le nez aquilin, les traits fort rĂ©guliers, il prĂ©sidait au travail le sabre au cĂ´tĂ©, une sagaie Ă  la main. Il parlait très bien le français et n’avait qu’une femme.

Michel Jajolet de la Courbe, se fit conduire au village de Jean Barre, qui sur sa demande lui expliqua l’origine de son nom: «Dans le commencement que les Français vinrent faire le commerce dans ce pays, et lorsqu’il n’y avait aucune habitation ni demeure assurĂ©e, ils y venaient tous les ans dans le temps de la traite du haut de la rivière, et lorsqu’ils avaient traitĂ© la cargaison de leurs navires, ils se rembarquaient tous et lui laissaient en garde tout ce qu’ils ne pouvaient emporter : c’était lui qui avait soin d’aller sonder la barre et en montrait la passe aux vaisseaux qui venaient les annĂ©es suivantes; c’est pour cette raison qu’on le nommait Jean Barre.

Pour le récompenser de toutes ses peines, on lui payait un coutume de quelques marchandise propres à son usage, coutume qui dure encore, quoiqu’il ne soit plus en exercice». Michel Jajolet de la Courbe retourna à Saint-Louis charmé de son excursion.

Le , Michel Jajolet de la Courbe reçut la visite du Petit Brak du Waalo, hĂ©ritier prĂ©somptif du Brak ; il rĂ©sidait Ă  Maka dans l’île de Biffeche, au-dessus de Saint-Louis. Il arriva accompagnĂ© de 15 ou 20 guerriers armĂ©s de sagaies, de ses griots et de 2 ou 3 chefs.

Michel Jajolet de la Courbe le dĂ©crit ainsi : «Il avait un habit semblable au surplis de nos PrĂŞtres avec de grandes manches larges qui Ă©taient d’une pagne, ou Ă©toffe de coton bleu rayĂ© de blanc, il ne lui venait qu’au-dessus des genoux, et il avait dessus une culotte tellement ample qu’elle contenait bien six aulnes (7 mètres) d’étoffe, elle Ă©tait plissĂ©e de manières que tous les plis se trouvaient derrière et lui servaient comme d’un coussin pour s’asseoir ; par-dessus cet habit il avait une bandoulière de drap d’écarlate large d’un demi pieds qui lui servait de baudrier oĂą pendait un grand sabre dont la poignĂ©e et le fourreau Ă©taient garnis d’argent qui Ă©tait de l’ouvrage des « Africains Â» assez proprement travaillĂ©; tout son habit Ă©tait parsemĂ© de Grigris, ou de caractères qui sont des passages de l’Alcoran, envelopper fort proprement dans du drap d’écarlate, du cuir rouge, ou de peaux de bĂŞtes sauvages, les uns carrĂ©s les autres ronds ou long et taillĂ©s Ă  facettes comme de gros diamant; leur habit n’était pas serrĂ© par le col comme un surplis, mais il Ă©tait fendu comme une chemise par derrière et par devant; et autour du col il y avait cinq ou six veloutĂ©s de laine Ă©carlate de figure ronde appliquĂ©s sur l’étoffe; ils n’avaient point de poches Ă  leurs culottes; mais ils en avaient une Ă  leur habit sur la poitrine du cĂ´tĂ© gauche, il avait sur la tĂŞte un bonnet de mĂŞme Ă©toffe que l’habit, fort Ă©troit d’entrĂ©e et large et rond par le haut et qui lui retombait sur l’oreille avec un grigri en forme d’aigrette fait avec la tĂŞte d’un paon d'Afrique, et plusieurs autres en forme de diamant, il avait les jambes nues et aux pieds des sandales semblables Ă  celles des anciens, et ses gens Ă©taient habillĂ©s comme lui. Ils fumaient avec des « cassots Â» ou pipe d'une aune (1,20 m), portant dans un petit sac ou gibecière dans laquelle Ă©tait leur tabac, un fusil et de la mèche. Les Griots accompagnaient leurs chants avec un petit luth Ă  3 cordes de crin de cheval».

Michel Jajolet de la Courbe, leur offrit de l’eau-de-vie, et les invita à rester jusqu’au lendemain.

Le Petit Brak du Waalo apportait comme présent un captif, ils restèrent le soir et festoyèrent et dansèrent tard dans la nuit, puis le lendemain repartirent avec le prix du captif, des cadeaux d’adieu (le tago), et des provisions pour la route.

Le Petit Brak du Waalo résidait dans le pays d’Houal, proche de Maka, qui en est une escale à 8 lieux du fort de Saint-Louis; il relevait aussi du Damel du Cayor, actuellement Makhourédia Diodio Diouf, à cause d’une seigneurie ou principauté appelée Gangueul, (Gandiol) qu’il tient de lui et qui n’est pas loin de «Bieurt»; il avait le privilège de pouvoir faire prendre par ses gens tout homme ou animal et les revendre si ceux à qui ils appartenaient, ne pouvaient pas les racheter. Si le Brak du Waalo venait à mourir, c’est lui qui le remplacerait, la succession se faisant parmi les oncles ou frères, ou tout autre parent pourvu qu’il soit le fils d’une femme de la lignée royale. Le choix se portait ordinairement sur le plus ancien et le plus honnête de tous les héritiers. Sitôt sur le trône, le nouveau Brak prenait pour femme, une de ses parentes de la lignée royale.

Le , eut lieu le premier « grain Â» de l’hivernage, il fut très violent et renversa des piles de cuirs qui Ă©taient disposĂ©s autour de l’habitation. Michel Jajolet de la Courbe constatant qu’ils Ă©taient en très mauvais Ă©tat, les fit battre et il en sortit une si grande quantitĂ© de vers que l’habitation fut envahie. Sur ces entrefaites, il arriva devant la barre de Saint-Louis, le vaisseau la Catherine, commandĂ© par le sieur Guyon Basset, frère du commandant de GorĂ©e. Sur ce vaisseau Ă©tait le sieur Truffault, teneur de livres de l’île, qui allait rendre ses comptes en France.
Ils débarquèrent tous les deux, et furent bien reçus par Michel Jajolet de la Courbe. Le sieur Guyon Basset chargea la gomme, les cuirs et les provisions pour le voyage.

Le Sieur Jehan de Lestrille, capitaine de la « RenommĂ©e Â» prĂ©vint Michel Jajolet de la Courbe, des mauvais offices que ces deux personnes Ă©taient disposĂ©es Ă  lui rendre auprès de la Compagnie, ayant constatĂ© tout le chagrin des commis, qu’il fut lĂ  pour les surveiller.
Michel Jajolet de la Courbe rĂ©solu Ă  se comporter honnĂŞtement fit charger tout le morfil que le Sieur Lamarche venait d’amener du Haut-fleuve, rĂ©digea ses dĂ©pĂŞches et renvoya par la « Catherine Â», quelques commis qu’il jugeait incapables de rendre aucun service.

Le , Michel Jajolet de la Courbe, partit pour les Ă®les Canaries, Ă  bord de la corvette la « Gaillarde Â», un navire de 50 tonneaux, commandĂ© par le Sieur AndrĂ© BrĂĽe, marin originaire de l’île de RĂ©, qui lui avait Ă©tĂ© prĂŞtĂ©e par Denis Basset, le commandant de GorĂ©e. Il laissait le commandement au sieur Lamarche et emportait des marchandises et 20 captifs, qu’il comptait y vendre. Après une longue et pĂ©nible navigation, au bout de 50 jours, se trouvant encore Ă  trente lieues des Ă®les Canaries, et les vivres manquant; en accord avec le Capitaine Guyon Basset ils revinrent Ă  Saint-Louis du SĂ©nĂ©gal.

Michel Jajolet de la Courbe arriva à Saint-Louis le , où devant la barre, une barque amena le sieur Lamarche et l’abbé des Roziers, l’un des aumôniers de l’habitation, qui lui apprirent que Louis Moreau de Chambonneau était revenu le , jour de son départ, qu’il était furieux, l’accusant de lui avoir enlevé ses captifs, d’avoir pillé ses biens et d’avoir volé les effets de la Compagnie, bien qu’il les eût lui-même enfermés dans des coffres, scellés de sa main avant son départ. Il accusait les commis de s’être fait complices de ce prétendu vol et les menaçait de les renvoyer par le premier vaisseau qui passerait. Ils les avait exclus du magasin, avait refusé de prendre ses repas avec eux selon la coutume. Les aumôniers avaient fait des démarches pour l’apaiser, mais il ne répondait que par des injures. Révoltés de cette dureté et de cette injustice, les commis allèrent le trouvé et le prièrent de leur rendre ses bonnes grâces, déclarant qu’ils étaient prêts à lui obéir. Il recommença ses menaces. Alors ils lui dirent qu’ils ne voulaient plus le reconnaître comme commandant, et qu’ils l’arrêtaient pour le renvoyer en France par le premier vaisseau. Il se défendit, mail il fut saisi, enfermé dans une tourelle et gardé à vue. En même temps, les rebelles prirent les registres des comptes et tous les papiers, mirent les scellés sur les coffres et aux portes des magasins.

Michel Jajolet de la Courbe leur déclara qu’ils étaient très coupables d’avoir agit ainsi, et espérait que la Compagnie du Sénégal serait moins sévère dans son jugement, qu’il ne l’était lui-même, puis s’enquit du résultat du voyage de Galam.

Références