Maurice Joyeux, né le à Paris[1] et mort le dans cette ville, est un militant et écrivain anarchiste français. D'abord ouvrier mécanicien puis libraire, c'est une figure marquante du mouvement libertaire français[2].
Maurice Alexis Joyeux est le fils de Maurice Alexandre Joyeux (1883-1915), employé, et de Rosine Thérèse Frey (1888-1951), teinturière.
Orphelin de guerre (son père était un militant socialiste), Maurice Joyeux est très tôt apprenti puis devient ouvrier.
À l’âge de 14 ans, il passe pour la première fois en correctionnelle et est condamné à 1 000 francs d’amende pour avoir cassé une côte au patron chez lequel il fait son apprentissage de serrurier, qui avait levé la main sur lui[5].
En 1928, il devance l’appel et effectue son service militaire au Maroc dans le 135e régiment du train automobile, puis, après avoir écopé d’un an de prison pour une altercation avec son supérieur, il finit dans un régiment disciplinaire à Colomb-Béchar (Algérie)[5].
Syndicaliste et réfractaire
Son premier contact avec l’anarchisme s’effectue en 1927 à l’occasion de la campagne en faveur de Sacco et Vanzetti[6].
Il milite au sein de la CGTU et s’engage avec le Comité des chômeurs dont il devient le secrétaire[2].
Arrêté le , à la suite de l’occupation et du saccage du consulat polonais à Levallois-Perret (Seine) pour protester contre la mort d’un ouvrier polonais dans un baraquement où des rats lui avaient mangé la moitié d’un bras, il est incarcéré à la prison de la Santé. Il comparait le devant la 13e Chambre correctionnelle qui le condamne à trois mois de prison et à 25 francs d’amende pour bris de clôture, violation de domicile et vagabondage. Il raconte cette période dans son livre Le Consulat polonais[5].
En 1935, devant son refus de devenir membre du Parti communiste, il est exclu par la CGTU de la direction du Comité des chômeurs. Il adhère alors à l’Union anarchiste[7] et est condamné à six mois de prison pour violence à agents. En 1936, il participe aux occupations d’usines et anime le Front révolutionnaire. En 1938, il fait encore six mois de prison pour violences[2].
Réfractaire après l'entrée en guerre de la France (), Joyeux est arrêté en 1940, condamné à 5 ans de prison et incarcéré à Lyon à la prison Montluc, dont il s’évade après avoir fomenté une mutinerie[8], mais il est repris et n'est libéré qu'en 1944. C'est le sujet de son livre Mutinerie à Montluc publié en 1971[4].
Pour un article paru dans le journal le et intitulé « Préparation militaire », il est condamné, le , à 5 000 francs d’amende par la 17e Chambre correctionnelle et, le , pour « apologie de meurtre », à propos d’un article paru dans le Libertaire du , à 40000 francs d’amende[4].
À partir de 1948, il milite activement dans le syndicat CGT-FO[2]. Son engagement syndical lui vaut d'être critiqué au côté de Georges Fontenis par des antisyndicaux pour être « devenus célèbres pour leur opportunisme et leur mentalité bureaucratique[10] ».
Un peu plus tard, il ouvre une librairie à Paris, Le Château des brouillards[4].
Anarcho-syndicaliste et anti-marxiste convaincu[12], il participe à la reconstruction de la Fédération anarchiste autour d'un nouveau journal, Le Monde libertaire et de sa propre librairie, Publico. Les principes de base de la nouvelle FA sont rédigés de façon à regrouper le plus grand nombre d'anarchistes, toutes tendances confondues. Un pari difficile à tenir, car il est obligé de faire des compromis avec les anarchistes individualistes. Il en résulte un mode de fonctionnement qu'il jugeait « impossible » : la prise de décision à l'unanimité, chaque membre de la FA disposant d'un droit de veto sur toute orientation de la FA.
« Qu’y’en a pas un sur cent et pourtant ils existent Et qu’ils se tiennent bien le bras dessus bras dessous Joyeux, et c’est pour ça qu’ils sont toujours debout Les anarchistes… »
Œuvres
Le Consulat polonais, Calmann-Lévy, 1957 (roman).
L’Anarchie et la société moderne. Précis sur une structure de la pensée et de l’action révolutionnaires et anarchistes, Nouvelles Éditions Debresse, 1969.
L’Anarchie et la révolte de la jeunesse, Casterman, 1970.
Mutinerie à Montluc, Éditions La Rue, 1971.
L’Écologie, La Rue, 1975.
Bakounine en France, La Rue, 1976.
L’Anarchie dans la société contemporaine : une hérésie nécessaire ? , Casterman, 1977, (OCLC4369078), 1996.
L'Hydre de Lerne, collection La Brochure anarchiste, édition du Monde libertaire, Paris, 1983, 3e réédition (texte d').
Karl Marx, le ténia du socialisme !, La Rue, 1983.
Sous les plis du drapeau noir et Souvenirs d'un anarchiste ; 2 tomes de souvenirs, Éditions du Monde Libertaire, 1988.
Autogestion, Gestion directe, Gestion ouvrière. L'Autogestion, pourquoi faire ?, Volonté Anarchiste, n°9, Paris, édition du groupe Fresnes-Antony de la Fédération Anarchiste, 1979, texte intégral.
Cédric Guérin, Pensée et action des anarchistes en France : 1950-1970, Mémoire de maîtrise en Histoire contemporaine sous la direction de Robert Vandenbussche, Université Lille 3-Villeneuve d’Ascq, 2000, texte intégral.
L’anarchie et la société moderne, conférence, 22 min, écouter en ligne.
Mémoire du siècle : Maurice Joyeux : émission de France Culture produite par Antoine Spire et diffusée pour la première fois le : un long entretien de Maurice Joyeux avec Antoine Spire où il évoque tout son parcours de militant anarchiste, libertaire et anarcho-syndicaliste
↑Cédric Guérin, Anarchisme français de 1950 à 1970, Mémoire de Maitrise en Histoire contemporaine sous la direction de Mr Vandenbussche, Villeneuve d’Ascq, Université Lille III, 2000, texte intégral, page 19.
↑Sylvain Boulouque, Dictionnaire Albert Camus, Robert Laffont, (lire en ligne)
↑Cédric Guérin, Anarchisme français de 1950 à 1970, Mémoire de Maitrise en Histoire contemporaine sous la direction de Mr Vandenbussche, Villeneuve d’Ascq, Université Lille III, 2000, texte intégral, page 10.
↑Mathieu Le Tallec, « L’unité d’action des trotskystes, anarchistes et socialistes de gauche autour de l’anticolonialisme et de l’anti-bonapartisme (1954-1958) », Diacronie. Studi di Storia Contemporanea, no N° 9, 1, (ISSN2038-0925, DOI10.4000/diacronie.3077, lire en ligne, consulté le )