Selon les sources, on observe plusieurs variantes : Mahafalay, Mahafale, Mahafaley, Mahafali, Mahafalys, Mehafaly[1].
Histoire
Une origine austronésienne commune à toute l'île : les Vahoaka Ntaolo-Vazimba et Vezo (350 av J.-C. 1500)
Les nombreuses recherches pluridisciplinaires récentes — archéologiques[2], génétiques[3], linguistiques[4] et historiques[5] — confirment toutes que l'ensemble du peuple malgache est primordialement originaire de l'archipel indonésien[6]. Arrivés probablement sur la côte Ouest de Madagascar en canoë à balancier (waka) au début de notre ère — 300 ans avant selon les archéologues[7] —, ces pionniers navigateurs austronésiens sont connus de la tradition orale malgache sous le nom des Ntaolo (de *(n)ta(u/w) — *olo — « les hommes d'avant », « les anciens », de *(n)ta(u/w) — « hommes » et *olo — « premier », « origine », « début », « tête » en proto-Malayo-Polynésien (MP)[8]). Il est également probable que ces anciens se nommaient eux-mêmes les Vahoaka (de Va-*waka « peuple/ceux des canoës » ou « peuple de la mer », de *waka-"canoë (à balancier)" en proto-MP), terme signifiant simplement aujourd'hui le "peuple" en malgache.
Sur le plan morphologique et phénotypique, cette origine Sud-Est asiatique première des Malgaches explique, par exemple au niveau des yeux, le « pli épicanthal » asiatique de la paupière supérieure (epicanthic fold) répandu chez tous les Malgaches qu'ils soient des côtes ou des hauts plateaux, qu'ils aient la peau claire, sombre ou cuivrée.
Ces vahoaka ntaolo (« peuple d'origine » ou « peuple premier ») austronésiens sont à l'origine de la langue malgache commune à toute l'île[9], ainsi que de tout le fonds culturel malgache commun : coutumes anciennes (comme celle d'ensevelir les défunts dans une pirogue au fond de la mer ou d'un lac), agriculture ancienne (la culture du taro-saonjo, de la banane, de la noix de coco et de la canne à sucre), l'architecture traditionnelle (maison végétale à base carrée sur pilotis), la musique (les instruments comme la conque marine antsiva, le tambour de cérémonie hazolahy, le xylophone atranatrana, la flûte sodina ou encore la valiha) et la danse (notamment la "danse des oiseaux" que l'on retrouve à la fois au centre et dans le Sud)[10].
Au tout début du peuplement, appelé « période paléomalgache », les Ntaolo se subdivisèrent, selon leurs choix de subsistance en deux grands groupes : les Vazimba (de *ba/va-yimba-"ceux de la forêt", de *yimba-« forêt » en proto Sud-Est Barito (SEB), aujourd'hui barimba ou orang rimba en malais[11]) qui s'installèrent — comme leur nom l'indique — dans les forêts de l'intérieur et les Vezo (de *ba/va/be/ve-jau, « ceux de la côte » en proto-Malayo-Javanais, aujourd'hui veju en bugis et bejau en malais, bajo en javanais[12]) qui restèrent sur la côte Ouest.
Le qualificatif Vazimba désignait donc à l'origine les Ntaolo chasseurs et/ou cueilleurs qui décidèrent de s'établir « dans la forêt », notamment dans les forêts des hauts plateaux centraux de la grande île et celles de la côte Est et Sud-Est[13], tandis que les Vezo étaient les Ntaolo pêcheurs qui restèrent sur les côtes de l'Ouest et du Sud (probablement les côtes du premier débarquement)[14].
La période féodale malgache : naissance des grands royaumes (1600-1895)
Dès la fin du premier millénaire jusqu'à 1600 environ, les Vazimba de l'intérieur autant que les Vezo des côtes accueillirent de nouveaux immigrants moyen-orientaux (Perses Shirazi, Arabes Omanites, Juifs arabisés) et orientaux (Indiens Gujarati, Malais, Javanais, Bugis) voire européens (Portugais) qui s'intégrèrent et s'acculturèrent à la société Vezo et Vazimba, souvent par alliance matrimoniale. Bien que minoritaires, les apports culturels, politiques et technologiques de ces nouveaux arrivants à l'ancien monde Vazimba et Vezo modifièrent substantiellement leur société et sera à l'origine des grands bouleversements du XVIe siècle qui conduiront à l'époque féodale malgache.
À l'intérieur des terres, les luttes pour l'hégémonie des différents clans Vazimba des hauts plateaux centraux (que les autres clans Vezo des côtes appelaient les Hova) aboutirent à la naissance des ethnies et/ou royaumes Merina, Betsileo, Bezanozano, Sihanaka, Tsimihety et Bara.
La naissance de ces grands royaumes « néo-Vazimba »/« néo-Vezo » modifia essentiellement la structure politique de l'ancien monde des Ntaolo, mais la grande majorité des anciennes catégories demeurèrent intactes au sein de ces nouveaux royaumes : la langue commune, les coutumes, les traditions, le sacré, l'économie, l'art des anciens demeurèrent préservés dans leur grande majorité, avec des variations de formes selon les régions.
↑Randriamasimanana, « The Malayo-Polynesian Origin of Malagasy » [2]).
↑« Dans la langue malagasy, nous constatons d'étroites connexions avec l'idiome Maanyan parlé par la population de la vallée de Barito dans le sud de Bornéo », Dr Mathew Hurles du Welcome Trust Sanger Institute.
↑Pour l'historien Édouard Ralaimihoatra, ces austronésiens qu'il appelle de manière globale les Vazimba — sans faire le distinguo entre ceux des côtes, les Vezo, et ceux de la forêt de l'intérieur, les Vazimba — ont « apporté dans l'île le fond de la langue malgache et des techniques d'origine indonésienne pirogues à balanciers, rizières inondées, cases en bois équarris ou en branchage construites sur pilotis, villages édifiés sur les hauteurs entourés de fossés, etc. Ce fond a reçu des apports résultant d'échanges humains entre l'Afrique et Madagascar, grâce à la navigation arabe entre les côtes de l'Arabie, de l'Afrique orientale et de la Grande Ile (Ralaimihoatra E., « Les Primitifs malgaches ou Vazimba », in Histoire de Madagascar).
↑Rafandrana, un des ancêtres de la dynastie royale merina, par exemple, est connu pour avoir été un Vazimba (Callet, 1908). Les deux reines fondatrices de la royauté Merina, Rafohy et Rangita, étaient désignées comme Vazimbas. Comme la plupart des austronésiens, les chefs Ntaolo (Vazimbas et Vezos) de Madagascar avaient pour coutume de placer les corps de leurs défunts dans des pirogues et de les enfouir dans des lacs artificiels (Vazimbas de l'intérieur) ou dans la mer (Vezos des côtes).
(de) Lotte Schomerus-Gernböck, Die Mahafaly : eine ethnische Gruppe im Süd-Westen Madagaskars, D. Reimer, Berlin, 1981, 232 p. (ISBN3-496-00184-4)
(en) Jeffrey C. Kaufmann, « Faly aux vazaha : Eugǹe Bastard, taboo, and Mahafale Autarky in southwest Madagascar, 1899 », in History in Africa (New Brunswick, NJ), 26, 1999, p. 129-155
René Battistini, Géographie humaine de la plaine côtière mahafaly, Éditions Cujas, 1964, 197 p. (thèse complémentaire)
Alain Bernard, Essai sur la transition de la société Mahafaly vers les rapports marchands, Éditions de l'Office de la recherche scientifique et technique outre-mer, Paris, 1978, 405 p. (ISBN2-7099-0506-X) (texte remanié d’une thèse soutenue à l’Université de Paris 10 en 1976)
Nicole Boulfroy, « L'art funéraire des Mahafale (sud-Ouest de Madagascar) », in Anthropologie de l'art : formes et significations : arts de l'Afrique, de l'Amerique et du Pacifique, ORSTOM, Paris, 1988, p. 30-38
Clément Séverin Charles, Les Mahafale de l’Onilahy : des clans au royaume, du 16e siècle à la conquête coloniale, Université de Paris 1, 1986, 588 p. (thèse de 3e cycle)
Filmographie
Omby, l'élevage en pays Mahafale, film documentaire réalisé par Jacques Lombard, Orstom Audiovisuel, Paris, 1988, 29 min (VHS)