La princesse Louise de Hesse-Darmstadt, née le à Berlin et morte le , est une des figures allemandes de la résistance à la domination de la France napoléonienne. Elle épouse en 1775 le ducCharles-Auguste de Saxe-Weimar-Eisenach.
Le landgrave Louis, également officier au service de la Prusse, est tout entier donné à la chose militaire. Il fera édifier dans ses États la forteresse de Pirmasens.
Forte de cette brillante union, la landgravine est invitée quatre ans plus tard à la cour de Russie avec ses trois filles cadettes Amélie, Wilhelmine et Louise. L'impératrice Catherine II cherche une épouse pour son fils et a invité plusieurs princesses souveraines allemandes avec leurs filles nubiles. C'est Wilhelmine, la sœur aînée de Louise qui sera choisie; arrivée avec sa famille à Gatchina en juin, elle est mariée en septembre et reste en Russie. Malheureusement, elle meurt prématurément en 1776 des suites de ses premières couches. Belles-sœurs du prince héritier de Prusse et du tsarévitch, les princesses de Hesse-Darmstadt sont activement convoitées par les princes protestants régnants du Saint-Empire.
Louise est une proche amie de Marie-Antoinette et elles resteront proches jusqu’à la mort de la reine de France.
Le duc ayant perdu son père très tôt a accédé au trône à l'âge d'un an. Sa mère, la brillante Anne-Amélie de Brunswick, a exercé en son nom la régence.
La duchesse Anne-Amélie avait fait de Weimar une cour cultivée et raffinée.
Dans ce milieu brillant, la jeune Louise se fait remarquer par sa délicatesse et une timidité malheureusement handicapante. D'une personnalité effacée face à sa brillante belle-mère, l'adolescente fréquente surtout les couvents de son nouveau pays. Romantique avant la lettre, la jeune duchesse n'a cependant pas le goût de vivre.
Ému par son charme et ses qualités de cœur, ses yeux « couleur de bleuet », le grand Goethe qui est un ministre de son mari (et son compagnon dans ses frasques extra-conjugales) la prend sous son aile et lui dédie des vers :
« J'en sais une, mince comme lys Dont la fierté n'est qu'innocence. Nul - pas même Salomon - N'en vit de pareille. »
Dans les années 1790, la révolution française et son évolution violente choquent les princes allemands. La France entre en guerre en 1792 et, d'abord victorieuse, annexe la rive gauche du Rhin.
Pendant ce temps, la tsarine Catherine II de Russie choisit comme épouse de son petit-fils Alexandre de Russie, une nièce de Louise, Louise Augusta de Bade, fille de sa sœur Amélie. Les autres filles d'Amélie se marie aussi brillamment : une des deux aînées devient électrice puis reine de Bavière, la seconde reine de Suède, la troisième duchesse de Brunswick, la benjamine épouse le neveu de Louise Louis de Hesse-Darmstadt.
Pendant ce temps, comme l'avait prédit Robespierre, la France s'est abandonnée au général vainqueur Napoléon Bonaparte qui a pris le pouvoir en 1799, puis d'est fait proclamer empereur des Français en 1804, tout en imposant sa domination à l'Italie et à l'Allemagne. Par le recès d'Empire de 1803, il fait modifier considérablement la carte et le paysage politique du Saint-Empire, élevant à la dignité électorale les souverains dont il achète l'alliance (pour ne pas dire la vassalité).
Les princes allemands, s'ils ont réussi à conserver leur souveraineté, intègrent cette confédération et se soumettent à l'alliance française. Ainsi le grand-duc de Bade, neveu de Louise, dont les sœurs ont toutes épousé des princes souverains, épouse-t-il la charmante Stéphanie de Beauharnais et la princesse Catherine de Wurtemberg, nièce de la tsarine, épouse Jérôme Bonaparte, frère de Napoléon et créé par lui, grand-duc de Berg.
Au milieu de tant d'intrigues où les États allemands jouent leur survie, Louise révèle sa force intérieure.
En 1806, la bataille de Iéna, ville universitaire du duché de Saxe-Weimar, oppose Napoléon aux forces du roi de Prusse. L'Autriche et la Prusse subissent une défaite écrasante. L'armée du feu grand Frédéric n'est plus, Napoléon impose sa domination aux États allemands, contraignant l'empereur d'Autriche à proclamer la fin du Saint-Empire romain germanique. La confédération du Rhin est créée sous la « protection » de l'empereur des Français.
Lorsque Weimar est menacée de pillage par les soldats de Napoléon, la duchesse fait face, quasiment seule, aux troupes de l'envahisseur, devenant, à l'instar de la reine Louise de Prusse, une héroïne du patriotisme allemand.
Sans doute est-ce une des raisons pour lesquelles le congrès de Vienne permet à son mari non seulement de conserver ses États mais aussi élève ceux-ci au rang de grand-duché alors que ses cousins thuringeois de la maison de Saxe conservent simplement leur titre de duc.
Le grand-duc meurt en 1828 et la grande-duchesse le à l'âge de 73 ans.
Marie-Claire Hoock-Demarle, La femme au temps de Goethe, Stock/Laurence Pernoud, Paris, 1987.
Eckhart G. Franz (dir.), Haus Hessen. Biografisches Lexikon. (= Arbeiten der Hessischen Historischen Kommission N.F., Vol. 34) Hessische Historische Kommission, Darmstadt 2012, (ISBN978-3-88443-411-6), Nr. HP 18, p. 327–328 (Eckhart G. Franz).
Louis Hammerich(de), Zwei kleine Goethestudien. II. Grossherzogin Louise von Sachsen-Weimar – eine politische, keine schöne Seele. Munksgaard, Copenhagen, 1962.