À son arrivée au lycée Olympe de Gouges à Noisy-le-Sec, l'influence de quelques enseignants le pousse à s'intéresser à la politique. Il commence par participer à l'animation du ciné-club, ce lieu de rencontre devenant vite un lieu de débats[8]. Petit à petit, il se rapproche de la Ligue communiste (LC-SFQI section française de la IVe internationale, trotskiste) à laquelle il adhère[9]. C'est en 1973 qu'il s'y fait remarquer lors du mouvement contre la loi Debré[10] (qui devait permettre la suppression des sursis longs). Après son baccalauréat, il rentre en classe prépa au lycée Balzac où existait à cette époque un groupe actif de la Ligue communiste.
Lorsqu'il entre à l'université, Julien Dray rejoint le syndicat étudiant Mouvement d'action syndicale (MAS)[4]. S'impliquant de plus en plus dans la politique et le syndicalisme, il devient un des responsables du secteur Jeunesse de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR). En 1977, la LCR devient majoritaire au MAS et Julien Dray entre au comité central[11] et plus tard deviendra le deuxième secrétaire général[réf. nécessaire]. En 1980, le MAS participe à la création de l'Unef-ID[12] au Congrès de Nanterre. À l'Unef-ID, bien que sa tendance « Luttes étudiantes action syndicale » (LEAS) soit largement minoritaire par rapport aux lambertistes qui obtiennent, derrière Jean-Christophe Cambadélis, la direction du syndicat, Julien Dray occupera ultérieurement le poste de vice-président.
Cependant, Julien Dray est exclu à l'automne 1981 de la LCR[4]. Après avoir vainement discuté avec Lambert, selon un témoignage ultérieur de Cambadélis, pour essayer d'obtenir le poste de président de l'Unef en échange de son ralliement à l'OCI, il rejoint le Parti socialiste, emmenant avec lui une partie des cadres étudiants de Leas et des trotskistes de la Seine-Saint-Denis[13].
Cadre du Parti socialiste
À l’Unef-ID, il rejoint donc la Tendance pour l’unité syndicale, d’orientation socialiste. Il est bien accueilli par Jean-Marie Le Guen, dirigeant historique de cette tendance. Pour lui, l’arrivée de nouveaux militants expérimentés devait permettre de redynamiser la Tendance plus. En outre, il comptait sur les qualités d’organisateur et sur l’expérience de Julien Dray. Au congrès de 1982, la Tendance plus obtient un score encourageant, avec 30 % des mandats, mais rapidement la tendance atteint ses limites[14].
Après son entrée au Parti socialiste en 1981, Julien Dray fonde, avec quelques autres comme Laurence Rossignol, un groupe de réflexion nommé Question socialiste[4]. Ils se donnent alors pour objectif de construire un courant sur l’aile gauche du PS. Mais, ils commencent à se structurer réellement en 1987 quand Isabelle Thomas entre dans les instances dirigeantes du parti. Cette promotion leur permet de déposer un premier texte lors du congrès de Lille[14]. Mais ce congrès est surtout pour Question socialiste l’occasion de se faire connaître par l’aile gauche[14].
SOS Racisme
En 1984, Julien Dray termine ses études et se consacre alors à d'autres combats. Il participe avec plusieurs de ses proches, dont notamment Harlem Désir, à la fondation de SOS Racisme, au sein duquel il devient vice-président, de 1984 à 1988, distribuant dès , lors de la seconde Marche pour l'égalité et contre le racisme organisée par Convergence 84, des badges « Touche pas à mon pote »[13]. Le nouveau mouvement récupère le succès de ce que les médias appelleront « Marche des Beurs », éclipsant les Jeunes Arabes de Lyon et banlieue (Jalb), créé aux Minguettes à l'initiative du père Christian Delorme[13].
Il est réélu avec 50,36 % des voix lors des élections législatives de 1993[15], catastrophiques pour le PS, mais dans une des circonscriptions les plus à gauche de France. Actif dans les mouvements sociaux, il fait émerger toute une génération de jeunes militants, notamment Delphine Batho et Malek Boutih[16].
Rapprochement avec Jean-Luc Mélenchon au sein du PS
En 2002, l'onde de choc de l'échec de Lionel Jospin au premier tour des élections présidentielles se fait ressentir dans la Gauche socialiste. Julien Dray remporte néanmoins une nouvelle fois les élections législatives dans la dixième circonscription, avec 53,04 % des voix[25]. Plusieurs stratégies s'affrontent alors. Jean-Luc Mélenchon fait le choix de rejoindre Henri Emmanuelli et de fonder avec lui le Nouveau Monde, alors que Julien Dray et ceux qui étaient restés dans la Gauche socialiste décident de participer à la création du Nouveau Parti socialiste avec Arnaud Montebourg, Vincent Peillon et Benoît Hamon[26]. Mais, dès , une nouvelle crise éclate au sujet de la participation à la majorité conduite par François Hollande[17]. La Gauche socialiste, réduite aux soutiens proches de Julien Dray, se rallie à la majorité peu avant le Congrès de Dijon[27], mais il ne fut pas suivi par Gérard Filoche et d'autres cadres, qui restent au NPS. À la fin du Congrès, Dray est nommé porte-parole du PS par François Hollande[26].
Lors de la consultation sur le Traité constitutionnel européen, Julien Dray se prononce pour le « oui »[28]. S'il continue à critiquer l'aspect libéral de la construction européenne[29], Dray considère que les mesures libérales comprises dans le TCE sont essentiellement des reprises des traités précédents (Maastricht, Amsterdam et Nice), déjà entérinés. En outre, il relève deux points positifs : d'abord, le renforcement du pouvoir du Parlement européen ; d'autre part, la Charte des droits fondamentaux. Enfin, Dray pensait que l'Europe ne pouvait se construire que par des compromis, et préférait attendre un rapport de force plus favorable à la gauche pour aller plus loin. D'ici là, il considérait que toute avancée était bonne à prendre[30].
Julien Dray s'est illustré de 1997 à 2003 en se spécialisant sur les thèmes de la sécurité au sein du PS[31], où ses prises de position « sécuritaires » ont souvent tranché avec celles de ses camarades de parti.
Ami de longue date de Ségolène Royal[32], il est l'un de ses tout premiers soutiens lorsque celle-ci annonce, à l'automne 2005, qu'elle envisage d'être candidate à l'investiture socialiste pour l'élection présidentielle de 2007[33]. Il a, depuis lors, affiché son soutien à la présidente de la région Poitou-Charentes.
Dray a fait partie de son équipe restreinte de campagne présidentielle, en qualité de « Conseiller chargé de la coordination des porte-paroles »[34].
Après s'être positionné un temps à la gauche du Parti, il adhère à la formule de Jean-Christophe Cambadélis d'une nouvelle « alliance populaire »[41] expliquant « Il va falloir que l'on change tout. Cela veut dire que, peut-être même, à un moment ou à un autre, se posera la question de notre nom (...) C'est un travail qui va commencer maintenant et qui vise à refonder la gauche, avec une identité nouvelle. Je pense que le terme le plus exact aujourd'hui, c'est pour nous d'être les nouveaux progressistes et de se battre pour l'émancipation. C'est le mot clef »[42]. Après le Congrès de Poitiers, il intègre le secrétariat national chargé de cette « alliance populaire »[41]. Durant le quinquennat de François Hollande, il est un conseiller de l'ombre du président, qui a notamment eu pour mission de cornaquer Emmanuel Macron ou encore d'envisager la mise en place d'une campagne pour la réélection du chef de l'État pour 2017, avant que celui-ci ne renonce[43].
Le , à propos de la controverse sur la sécurité lors de l'attentat de Nice, il explique sur BFM TV que « la faille est aussi par la pression populaire des gens qui n'ont pas envie d'attendre »[44],[45].
Chroniqueur sur la chaine d'info CNews, il affirme le vendredi 12 mars 2021 qu'il « ne tire pas un trait d'égalité entre Jean-Marie Le Pen et Marine Le Pen », car selon lui « les choses ne sont pas de la même nature ». Ces propos suscitent les réactions de plusieurs cadres du Parti socialiste, dont le premier secrétaire Olivier Faure, qui estime que « Si Marine Le Pen est plus habile que son père, elle n'en est pas moins à l'extrême-droite que lui. La vraie différence est qu'elle est plus dangereuse parce qu'elle a la volonté de gagner là où son père se limitait au témoignage et à la provocation », tandis que pour le député Boris Vallaud, « l'extrême droite, c'est l'extrême droite, peu importe qui la représente »[50].
Le , il annonce avoir quitté le Parti socialiste à la suite de la signature d'un accord du parti avec La France insoumise en vue des élections législatives de 2022. Dans le même temps, il fonde le mouvement politique « Réinventez ! »[51].
Il est réélu le et devient vice-président chargé de la culture. Réélu le , il est toujours en 2010 cinquième vice-président chargé de la culture[80].
Non reconduit par les siens en Essonne pour les élections régionales de 2015, il est finalement repêché par Claude Bartolone avec le soutien du proche de Manuel Valls Luc Carvounas pour devenir tête de liste dans le Val-de-Marne : « Une page a été tournée. Des générations ont voulu s’émanciper. À elles de faire la démonstration qu’elles en sont capables. Dans le Val-de-Marne, je commence une nouvelle aventure[81]. »
Fonctions politiques
Julien Dray est membre du bureau national du Parti socialiste depuis 2003[82], il fut secrétaire national chargé de la communication et de la presse jusqu’en 1996, secrétaire national chargé de la sécurité de 1997 à 2003, porte-parole de 2003 à 2008, et secrétaire national chargé des programmes et des études[Quand ?]. Il fut aussi fondateur et animateur du courant Gauche socialiste. Julien Dray a par ailleurs été candidat au poste de premier secrétaire de son parti, sans succès.
Il lance en avril 2022 un mouvement appelé Réinventez ![83].
Investigations sur le train de vie de Julien Dray
Fin 1999, Julien Dray est mis en cause dans une enquête préliminaire pour l'achat d'une montre d'une valeur de 250 000 francs (38 000 euros), dont 150 000 francs payés en liquide[84]. L'affaire est finalement classée sans suite[85].
Déjà, à l’époque de SOS Racisme, au milieu des années 1980, les militants avaient noté ce penchant dispendieux. « À SOS, nous avons découvert, non sans surprise, sa passion pour les lunettes, les montres, les stylos, les cartables et les scooters. C’est un véritable maniaque », écrit Serge Malik, l’un des fondateurs du mouvement, dans son livre, Histoire secrète de SOS Racisme.
Julien Dray a fait l’objet d’une enquête préliminaire ouverte le par le parquet de Paris pour abus de confiance à la suite d’un signalement de TRACFIN, la cellule anti-blanchiment du ministère des Finances, portant sur des mouvements de fonds suspects à partir de comptes de l’association « Les Parrains de SOS Racisme » et de la Fédération indépendante et démocratique lycéenne (Fidl) depuis . Les enquêteurs soupçonnaient Julien Dray d’avoir bénéficié d’une partie de ces sommes, évaluées au total à 351 027 €[86]. Selon ce rapport, les enquêteurs de la cellule anti-blanchiment avaient relevé notamment des versements allant jusqu'à 18 500 € euros chez l'horloger Breguet. « Nombre de chèques tirés enregistrés posent la question de leur contrepartie. Les émetteurs ont en effet soit leur siège social dans le département dont M. Dray est l'élu, soit ils ont obtenu un chantier public dans sa circonscription, soit obtenu un marché public avec le Conseil régional d'Ile-de-France », écrit Tracfin dans son rapport[87].
Selon le magazine Paris Match du [88], les achats des montres se feraient avec carte American Express Centurion, un modèle spécial VIP fabriqué en titane dont il n’existe qu’une centaine de porteurs en France. Le magazine révèle que Julien Dray a également un faible pour les cartables et les stylos de marque. Il peut dépenser 2 000 ou 3 000 euros notamment chez Mora, près du Sénat, la Mecque parisienne du stylo de collection.
Selon le journal Le Monde du [89], Julien Dray a fait l’objet d’un rappel à la loi[90] (voie alternative aux poursuites) portant sur une somme de sept mille euros, sans références avec les sommes publiées par certains journaux sur sa collection de montres de luxe. Les sommes en cause ayant été remboursées et en l'absence de plainte, Julien Dray n'a pas été renvoyé devant le tribunal correctionnel. Le procureur de Paris a estimé que les investigations n’avaient pas mis « en évidence un train de vie personnel dispendieux de la part de Julien Dray » tout en reconnaissant cependant un abus de confiance après l'achat, pour 7 000 euros, de l'une de ses montres de valeur que Dray collectionne, avec un chèque de l'association «10e circonscription » de l'Essonne[91].
« Baron Noir »
Les trois saisons (2016, 2018 puis 2020) de la série télévisée Baron noir tournent autour du personnage de Philippe
Rickwaert qui s'inspire largement de Julien Dray[92],[93]. Il l'a d'ailleurs confirmé en déclarant « Le Baron Noir, c'est moi »[94]. Philippe Rickwaert est dans cette série, tout d'abord député-maire socialiste de Dunkerque, mais il est surtout un très influent conseiller de l'ombre du président Francis Laugier, puis d'Amélie Dorendeu dont il oriente le parcours et l'ascension jusqu'à ce qu'elle succède à Laugier à l'Élysée. Il manœuvre pour réaliser l'union de la gauche avec le parti fondé par Michel Vidal (qui rappelle Jean-Luc Mélenchon[95]) et se débat aussi avec la justice à la suite de malversations avec l'office HLM de Dunkerque, ce qui l'envoie temporairement en prison.
Publications
Julien Dray est l’auteur ou coauteur de divers ouvrages dont :
SOS Génération : Histoire de l’intérieur du mouvement des jeunes de novembre-décembre 1986, Ramsay, (ISBN978-2-85956-585-5)
↑Philippe, Juhem, « Entreprendre en politique. Les carrières militantes des fondateurs de SOS-Racisme », Revue française de science politique, vol. 51, no 1-2, février-avril 2001, pp. 131-153 : « Julien Dray – Durant les années soixante-dix, j'étais lycéen à Noisy-le-Sec. [...] À la rentrée de 1970, en seconde, ma prof de français avait organisé des débats autour de l'origine du principe d'égalité. Grâce à quoi je m'étais découvert de gauche et volontariste, je refusais les principes établis mettant en cause l'égalité. [...] Je discutais avec les profs, après les cours. [...] Tout doucement nous avons formé un petit noyau dans le lycée, à trois copains que nous étions. Djamila, une beur – avant que le terme existe –, Paprocki – pas besoin d'affirmer ses origines grecques – et moi, le juif pied-noir. La politique, pour nous, durant des semaines, a consisté à animer le lycée. [...] Nous avons pris en main le ciné-club. »