Jean-Louis Debré est le fils de Michel Debré, ancien Premier ministre. Il a trois frères : Vincent Debré, homme d'affaires né en 1939, François Debré, journaliste (1942-2020), mort le lendemain du décès de Bernard Debré, médecin et homme politique (1944-2020), son frère jumeau[2].
Il est aussi le petit-fils du pédiatre Robert Debré et, du côté de sa mère, de l'architecte Charles Lemaresquier. Il est également le neveu du peintre Olivier Debré. Enfin, il est l'arrière-petit-fils du grand rabbin Simon Debré (1854-1939). Avec son épouse, Anne-Marie Engel, morte le , il a eu trois enfants : Charles-Emmanuel Debré (directeur business Grands comptes de Bouygues Télécom), Guillaume Debré (journaliste) et Marie-Victoire Debré (comédienne)[3]. Il fut élève à l'école Hattemer.
Adolescent, il souffre d'un tassement de la colonne vertébrale et, marginalisé, ne présente pas le baccalauréat[4].
Plus tard, l'ancien membre de cabinet de Michel Debré et ami de la famille Pierre Mazeaud lui propose de s'inscrire pour passer une capacité en droit à Panthéon-Assas. C'est ainsi qu'il obtient une licence en droit qui lui permettra de poursuivre sa carrière. Licencié en droit, titulaire d'un diplôme d’études supérieures de droit public et d'un diplôme d’études supérieures de sciences politiques, il est docteur en droit public (1973) avec une thèse consacrée aux « Idées constitutionnelles du général de Gaulle »[5], dirigée par Roger-Gérard Schwartzenberg[6].
De 1971 à 1975, Jean-Louis Debré est assistant à la faculté de droit de Paris. De 1973 à 1974, il est conseiller technique au cabinet du ministre de l'Agriculture et du Développement rural (Jacques Chirac), puis il est nommé la même année au cabinet du ministre de l'Intérieur (Jacques Chirac). Proche du futur président de la République, Jean-Louis Debré devient son chargé de mission (1974-1976) lorsque celui-ci est nommé Premier ministre, après avoir fait campagne pour Jacques Chaban-Delmas alors que Jacques Chirac soutenait Valéry Giscard d'Estaing[4]. De 1976 à 1978, il est substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Évry-Corbeil, puis est détaché, en 1978, pour une année, au ministère de la Justice, en qualité de magistrat à l'administration centrale de la justice. Il est ensuite, de 1978 à 1979, chef de cabinet[8] de Maurice Papon, ministre du Budget.
De 1979 à 1986, Jean-Louis Debré est magistrat, nommé dans les fonctions de juge d'instruction. Il est chargé des affaires de crime organisé et de grand banditisme, notamment de la proxénète Carmen Vallet, du coiffeur receleur Maurice Joffo ou de l'affaire de contre-espionnage Virgil Tanase[4]. Il traite aussi de terrorisme et d'une affaire autour du terroriste Carlos[9].
Le , le président de la République, Jacques Chirac, le charge, en tant que président de l’Assemblée nationale, d’une « mission pluraliste pour évaluer l’action du Parlement dans les domaines de la mémoire et de l’histoire »[10].
Parcours politique
Débuts
Aux élections législatives de 1973, il est investi par l'UDR dans la circonscription de Calais, jusque-là détenue par Jacques Vendroux, beau-frère du Général de Gaulle. Il est battu au deuxième tour par le candidat communiste Jean-Jacques Barthe.
Il entre dans l’opposition en 1981, à la suite de la victoire de François Mitterrand à l’élection présidentielle ; en 2021, il révélera qu’il lui est « arrivé » de voter pour le candidat socialiste[11].
En , il est critiqué[12],[4] pour avoir laissé s'organiser la conférence de presse des militants clandestins corses armés à Tralunca.
Il ordonne l'expulsion, le , de quelque 300 étrangers en situation irrégulièreoccupant l'église Saint-Bernard à Paris, non sans avoir déclaré auparavant qu'il agirait « avec humanité et cœur »[13],[14]. Malgré les déclarations du gouvernement, la plupart de ces étrangers ne sont pas expulsés, ayant des attaches fortes en France, qui rendent complexe toute « mesure d'éloignement »[13]. Des manifestations critiquant la politique du gouvernement Juppé, durant lesquelles on scande des slogans réclamant l'« abrogation des lois Pasqua-Debré », rassemblent des dizaines de milliers de personnes[13]. Ministre de l'Intérieur, Jean-Louis Debré présente en un projet de loi portant « diverses dispositions relatives à l'immigration », comportant entre autres les orientations suivantes : intensifier le dispositif d'éloignement des étrangers en situation irrégulière ; étendre les contrôles d'identité sur les lieux de production et les chantiers ; permettre aux officiers de police, sous certaines conditions, de fouiller les véhicules. Dans la réalité, ces nouvelles dispositions n'entraînent que peu de reconduites[13].
Affichant une grande fidélité à Jacques Chirac, il s’oppose régulièrement à Nicolas Sarkozy. Estimant être trop différent du maire de Neuilly-sur-Seine, dont il dit notamment qu’il « n'aime pas l'État »[4].
Réélu député de la 1re circonscription de l'Eure le , pour la XIIe législature, Jean-Louis Debré n'est pourtant pas nommé ministre dans le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. Il brigue alors la présidence de l'Assemblée nationale, également convoitée par Édouard Balladur, avec lequel Jean-Louis Debré entretient des relations réputées exécrables. Lors du scrutin du , l'ancien président du groupe RPR, formellement investi le jour-même par le nouveau groupe UMP, domine le premier tour par 217 voix contre 163 pour l'ex-Premier ministre, qui se retire aussitôt en la faveur de son adversaire principal, 140 pour la socialiste Paulette Guinchard-Kunstler et 21 pour la communiste Muguette Jacquaint. Bénéficiant du retrait de Balladur, Jean-Louis Debré est élu président de l'Assemblée après avoir recueilli, à l'issue du second tour, 342 voix contre 142 pour Guinchard-Kunstler et 21 pour Jacquaint[16].
La victoire de Debré va jusqu'à surprendre son ami Jacques Chirac, qui lui avait conseillé de renoncer à se présenter, persuadé qu'il serait battu[4].
Au perchoir, Jean-Louis Debré gagne la réputation d'un « partisan rigoureux des droits de l'opposition », estimé bien au-delà de son seul camp politique[17].
Président du Conseil constitutionnel
Le , Jacques Chirac le nomme président du Conseil constitutionnel en remplacement de Pierre Mazeaud, alors que Nicolas Sarkozy s'apprête à devenir président de la République[4]. Il sort du devoir de réserve attaché à sa fonction en émettant, en 2008, des « réserves » sur le style présidentiel de Nicolas Sarkozy et, en 2010, en jugeant « inutile pour lui, pour la France » le procès à venir de Jacques Chirac[18],[19].
Au cours de sa présidence, il déjeune régulièrement avec le président du MEDEF et des chefs d'entreprises pour évoquer la jurisprudence du Conseil constitutionnel, notamment pour préparer la décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances 2012[20],[21]. Selon Jean-Louis Debré, lors de l'un de ces déjeuners, tenu en présence du secrétaire général du Conseil constitutionnel, Marc Guillaume, Pierre Gattaz, président du MEDEF, a livré son analyse de la situation économique, évoquant un environnement législatif contraignant et paralysant[20]. Sur les projets et propositions de loi sur l'économie sociale et solidaire, sur les stages en entreprise, sur l'inspection du travail, sur la pénibilité et la biodiversité, Pierre Gattaz déclare au cours de ce déjeuner attendre beaucoup du Conseil constitutionnel et que le MEDEF n'a pas été déçu par ses précédentes décisions[20].
Il est le parrain de la promotion 2011-2012 de l'école de formation professionnelle des barreaux de la cour d'appel de Paris, formant les futurs avocats parisiens, Il est également le parrain de la promotion 2014-2015 de l'École des Avocats du Sud-est. Il est également membre d'honneur de l'Observatoire du patrimoine religieux (OPR), une association multiconfessionnelle qui œuvre à la préservation et au rayonnement du patrimoine cultuel français.
Il est aussi le parrain de la promotion 2017-2018 de l'école du centre Ouest des avocats.
Son mandat de président du Conseil constitutionnel arrive à son terme le [22]. Il est remplacé par Laurent Fabius. Le lendemain, le , le ministère de la Culture annonce sa nomination comme président du Conseil supérieur des archives succédant à l'historienne Georgette Elgey[23].
Retraite
Jean-Louis Debré fait paraître un journal en , Ce que je ne pouvais pas dire, qui revient sur son exercice de neuf années à la présidence du Conseil constitutionnel. Son livre met en exergue ses rapports difficiles avec Nicolas Sarkozy, ses relations courtoises avec François Hollande ainsi que les travaux et l'évolution d'une institution qui vit ses attributions s’accroître avec la réforme constitutionnelle de 2008[24],[25]. L'ouvrage rencontre un certain succès en librairie[26]. Un autre opus de souvenirs, Tu le raconteras plus tard, paraît en 2017 : Jean-Louis Debré le consacre à ses années passées au ministère de l'Intérieur et à la présidence de l'Assemblée nationale.
En , il devient chroniqueur à la radio et à la télévision[27]. Il est la même année le parrain de la promotion 2016-2017 du master fiscalité de l'entreprise de l'université Paris-Dauphine[28].
Dans le contexte de la pandémie de Covid-19, il se voit confier par le gouvernement un rapport sur le potentiel report des élections régionales et départementales de 2021. Il remet son rapport le 13 novembre 2020, préconisant leur report en juin, les scrutins étant normalement prévus en mars[31],[32].
En 2022, Jean-Louis Debré produit une pièce de théâtre avec sa compagne « Ces femmes qui ont réveillé la France » sur les femmes qui ont marqué l'histoire de France[33]. La pièce a été adaptée de l'essai du même nom publié en 2012. Il joue dans sa pièce en compagnie de Valérie Bochenek (co-auteure) et du pianiste Christophe Dies[34].
Relations avec Jacques Chirac
Jean-Louis Debré entretient une relation de grande confiance avec Jacques Chirac, de douze ans son aîné. Les deux hommes se sont rencontrés à l'aéroport d'Orly en 1967, alors que Jean-Louis Debré accompagnait son père venu chercher le général de Gaulle de retour du Québec[4]. Jean-Louis Debré devient conseiller technique de Jacques Chirac en 1973, lorsque celui-ci est ministre de l'Agriculture. En 1974, il lui remet sa démission lorsque Jacques Chirac décide de soutenir Valéry Giscard d'Estaing contre Jacques Chaban-Delmas dans la course à la présidentielle, car il soutient, comme son père Michel Debré, le candidat gaulliste[4]. Il réintègre cependant le cabinet de Jacques Chirac à Matignon après la victoire de Valéry Giscard d'Estaing, jusqu'à la démission du Premier ministre le .
Jean-Louis Debré se lance à nouveau en politique en 1986 et recommence à voir Jacques Chirac, surtout lorsque celui-ci traverse une mauvaise passe après son deuxième échec à l'élection présidentielle, en 1988[4]. Puis Jacques Chirac, en 1993, fait appel à lui après la victoire commune du RPR et UDF aux législatives, qui annonce la deuxième cohabitation. Il lui demande de tenir les rênes du parti pour s'assurer de sa fidélité. Jacques Chirac, qui souhaite toujours devenir président de la République, se méfie des ambitions de celui qui va devenir Premier ministre de François Mitterrand : Édouard Balladur[4]. Jean-Louis Debré devient secrétaire général adjoint, visite les cellules RPR du pays en 1993 et 1994, et attaque publiquement les personnalités politiques qui, dans l'affrontement des deux rivaux de droite lors de la campagne présidentielle de 1995, prennent le parti de Balladur. Il est durement critiqué par les partisans du Premier ministre et par la presse. Son frère jumeau Bernard Debré soutient Édouard Balladur.
Après la victoire de Jacques Chirac le , Jean-Louis Debré est nommé ministre de l'Intérieur. Il continue à voir directement et régulièrement Jacques Chirac, sans passer par le secrétaire général de l’ÉlyséeDominique de Villepin ou son Premier ministre Alain Juppé, au grand dam de ces derniers[4]. Malgré leur grande proximité, il persiste à vouvoyer le président de la République et à l'appeler « Monsieur »[4]. Après la dissolution de l'Assemblée nationale en 1997, Jean-Louis Debré se présente pour devenir président du groupe RPR et essayer de sauvegarder l'unité des députés autour du président de la République[4]. Il est élu à la surprise générale. Comme en 2002, lorsqu'il remporte l'élection pour la présidence de l'Assemblée nationale, contre l'avis de Jacques Chirac qui pensait que Jean-Louis Debré n'avait aucune chance face à l'autre candidat, Édouard Balladur[4],[35]. Jean-Louis Debré a également dû écarter préalablement Alain Juppé de la course au « Perchoir »[4]. Il s'oppose violemment, à la même époque, à la nomination du centriste Jean-Pierre Raffarin à Matignon, sans succès[4]. Sur tous ces sujets, il s'émancipe de Jacques Chirac. Il finit par faire oublier sa mauvaise image héritée de la bataille présidentielle de 1995 et de l'affaire des sans-papiers réfugiés dans l'église Saint-Bernard[4].
De Jacques Chirac, Jean-Louis Debré se targuait d'être l'un de ceux qui lui disait « le plus de choses désagréables en privé ». Il affirmait aussi de son maître politique : « Chirac, je l'adore, je l'aime. Mais je suis aussi lucide sur le personnage »[4].
En 2010, l'été précédant le procès de Jacques Chirac pour l'affaire des emplois fictifs de la ville de Paris, il participe à l'élaboration d'une saga de politique-fiction pour le quotidien Le Monde : Chirac, Le roman d'un procès, écrite avec deux journalistes, Pascale Robert-Diard et Françoise Fressoz[4].
Secrétaire national du RPR, chargé de la Justice (1988-1993) ; porte-parole de l'opposition RPR-UDF, chargé des problèmes de justice et sécurité (1988-1993) ;
Secrétaire général adjoint et porte-parole du RPR (1993 -1995) ; premier secrétaire général adjoint du RPR (1995) ; membre du bureau politique du RPR ; secrétaire général du RPR par intérim (1997) ; membre du conseil politique du RPR.
Les idées constitutionnelles du général de Gaulle, Librairie générale de droit et de jurisprudence, coll. « Bibliothèque constitutionnelle et de science politique » no 49, Paris, 1974, vi-461 p., (ISBN2-275-01303-2), (BNF34563452). — thèse de droit public
Michel Debré et Jean-Louis Debré, Le Pouvoir politique, éditions Seghers, coll. « Point de départ », Paris, 1976, 159 p., [pas d'ISBN], (BNF34701443)
Le Gaullisme, éditions Plon, coll. « Tribune libre », Paris, 1977, 185 p. + 6 p. de fac-similés + 2 p. de planches illustrées, (ISBN2-259-00330-3), (BNF34591481)
La Justice au XIXe siècle. 2 volumes
Volume 1 : Les Magistrats, éditions Perrin, Paris, 1981, 223 p. + 16 p. de planches illustrées, (ISBN2-262-00215-0), (BNF37661622)
Volume 2 : Les Républiques des avocats, éditions Perrin, Paris, 1984, 381 p., [ISBN non connu], (BNF37591374)
Le gaullisme n'est pas une nostalgie : essai, éditions Robert Laffont, Paris, 1999, 228 p., (ISBN2-221-09015-2), (BNF37094813)
Les Oubliés de la République, éditions Fayard, Paris, 2008, 317 p., (ISBN978-2-213-63709-9), (BNF41294474). — essai sur le travail des parlementaires par des exemples de propositions de loi qui ont abouti
Cette autobiographie d'un SDF est le fruit de rencontres régulières, pendant plusieurs années, entre l'auteur et le président du Conseil constitutionnel.
Ce que je ne pouvais pas dire, Robert Laffont, 2016
Dictionnaire amoureux de la République, Plon, 2017
Tu le raconteras plus tard, Robert Laffont, 2017
Nos illustres inconnus, Albin Michel, 2018
Une histoire de famille, Robert Laffont, 2019
Quand les politiques nous faisaient rire, Bouquins, 2021, Points, 2023
↑Jean-Louis Debré interviewé par Emmanuel Galiero, « Jean-Louis Debré : "Pour le report des régionales, juin est la bonne date" », Le Figaro, 14-15 novembre 2020, p. 5 (lire en ligne).
↑« Remise du rapport de Jean-Louis Debré sur les élections départementales et régionales », gouvernement.fr, (lire en ligne).
↑« Au théâtre ce soir, Jean-Louis Debré », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )