Avec seulement six films à son actif, il est l'un des piliers du cinéma du lookfrançais. En 1982, il obtient le César de la meilleure première œuvre pour le film Diva et connaît son plus grand succès public, en 1986, avec 37°2 le matin adapté du roman de Philippe Djian. À partir des années 1990, il réalise et produit surtout des documentaires pour la télévision et le cinéma.
Biographie
Jeunesse et formations
Jean-Jacques Beineix est le fils de Robert Beineix, directeur d'une compagnie d'assurances, et de Madeleine Maréchal. Élève au lycée Carnot, puis au lycée Condorcet de Paris, il s'inscrit en médecine après son baccalauréat[1].
En 1977, Jean-Jacques Beineix réalise son premier court métrage, Le Chien de Monsieur Michel[6], récompensé par le premier prix au festival Off-Courts Trouville.
En 1981, Diva, son premier long métrage, est un succès populaire et connaît une belle carrière internationale[7]. Malgré ses quatre César, dont le César de la meilleure première œuvre, le film suscite néanmoins le rejet d'une bonne partie de la critique, qui décriera durant toute la carrière du cinéaste un « esthétisme de pub »[8]. Dominique Besnehard, son ancien directeur de casting, dénonce le rôle des critiques de cinéma qui n'ont jamais été tendres avec lui : « La critique, quand elle décide, avant d'aller voir le film, de ne pas aimer, c'est un mal terrible[8]. »
En 1983 sort La Lune dans le caniveau, tourné dans les mythiques studios de Cinecittà et monté dans ceux de Boulogne[9]. Présenté au festival de Cannes 1983, le film, très mal reçu par les festivaliers et la critique — Beineix est même insulté[10] — est un échec commercial[11].
En 1984, Jean-Jacques Beineix crée sa propre société de production, Cargo Films[12], afin de préserver son indépendance artistique. À partir des années 1990, il y concevra également des films documentaires[13],[14].
En 1986, 37°2 le matin, le premier long-métrage produit par la société, sera un immense succès public. Adapté du roman éponyme de Philippe Djian, vu à sa sortie en France par 3,6 millions de spectateurs et parvenu depuis au statut de film culte[10], il révèle Béatrice Dalle, alors inconnue, aux côtés de Jean-Hugues Anglade. Nommé à neuf reprises aux César, 37°2 le matin fut également nommé à l'Oscar du meilleur film étranger. L'actrice et chanteuse Dalida présente à la cérémonie des César critique sévèrement le jury qui n'a accordé au film de Beineix que le César de la meilleure affiche[15].
En 1989, sort Roselyne et les Lions dans lequel Beineix lance à nouveau une inconnue, Isabelle Pasco, mais c’est encore une fois un fiasco critique et commercial : « Belle image, comme toujours, mais la magie n’opère pas dans un monde du cirque fantasmé, trop irréel[16]. »
En 1992, c’est au tour d'IP5 de connaître la débâcle : la mort brutale d’Yves Montand au cours du tournage nourrit l’insidieuse rumeur qui accuse Jean-Jacques Beineix de ne pas avoir assez ménagé l'acteur. Cette polémique pénalise le film, qui est encore une fois un échec commercial. Rumeur pourtant contredite par Carole Amiel, la dernière compagne d’Yves Montand, qui expliquera plus tard dans un ouvrage consacré à ce dernier que, présumant de ses forces, il répétait son prochain récital à Bercy les soirs où il tournait avec Beineix : « La polémique a été très injuste pour Jean-Jacques qui avait pris toutes les précautions. », dira-t-elle. « Les Français ont été tellement choqués, surpris et tristes qu’il a fallu trouver un coupable[16]. »
Très affecté par ces circonstances, Beineix ne tournera plus de longs métrages pendant une dizaine d’années et se dirigera vers la réalisation et la production de documentaires pour la télévision. Il réalise notamment Loft Paradoxe[17] en mai 2002 à la suite du succès de l'émission Loft Story sur M6[18].
Par ailleurs, il reçoit de nombreuses propositions à Hollywood. Toutefois, il refuse notamment Le Nom de la rose, Evita ainsi que Alien 3. Il donne tout de même son accord pour réaliser une adaptation de Chapeau melon et bottes de cuir, mais, après avoir critiqué le scénario, il s'écarte du projet[19].
En 2001, après neuf ans d'absence au cinéma, il réalise Mortel Transfert avec Jean-Hugues Anglade et Hélène de Fougerolles, tentative de retour avorté qui est un échec critique et commercial complet. Il déclare d'ailleurs que ce film l'endette fortement[20] car il y a investi tout ce qu’il possède et « tout ce que j’ai pu apprendre en plus de quarante années de cinéma où j’ai commencé stagiaire et fini producteur, réalisateur, et scénariste. Mais tout multiplié par presque zéro, ça fait toujours zéro et cette leçon de vie a été terrible. Je ne m’en suis pas relevé[21] »
À l'automne 2006, il publie ses mémoires, Les Chantiers de la gloire, dans lesquels il évoque une partie de son enfance et de sa carrière cinématographique. Le livre témoigne de la production et du tournage de ses trois premiers longs métrages : Diva, La Lune dans le caniveau et 37°2 le matin. Il devait s'agir de la première partie d'une série de deux livres, dont il n'écrira finalement jamais le second[18].
En 2008, il réalise un film institutionnel pour le CNRS qui s’inscrit dans le rajeunissement de l’identité de l’organisme scientifique : L2i (les Deux infinis)[22],[23]. D’une durée de 17 min, ce film présente la diversité des recherches conduites par le CNRS en physique, climatologie, astronomie et sciences humaines : « Le monde de la recherche est très proche de celui des artistes. Nous sommes habités par la conviction, la générosité et la passion. »
En 2020, il publie son premier roman : Toboggan, couronné par le prix des lecteurs du magazine Notre temps, chronique d’un amour déçu qui ressemble beaucoup à une confession autobiographique et « dans lequel il fait part d'une réflexion sans concession sur le sens de sa vie et les liens entre l'amour et l’art[29]. »
En 2020 également, il critique l'esclandre d'Adèle Haenel, lors de la 45e cérémonie des César, contre la présence, en sélection, du film de Roman Polanski, J'accuse. Il invite à ne pas laisser penser que « tous les hommes sont des violeurs »[30].
Mort et hommages
Jean-Jacques Beineix meurt à son domicile parisien le à l'âge de 75 ans, des suites d'une leucémie[31], entouré de son épouse Agnès et de sa fille Frida[32],[33], née d'une relation antérieure avec l'actrice Valentina Sauca.
Unifrance lui rend hommage en ces termes : « [...] Une personnalité singulière du cinéma français, légataire d'une certaine vision du cinéma, où la couleur, le cadre, l'atmosphère et la fulgurance de certains plans conféraient aux films une forme d'absolu. On ne pourra oublier les décors qu'Hilton McConnico avait conçus pour La Lune dans le caniveau, les claquements de fouet d'Isabelle Pasco dans Roselyne et les Lions, ou Yves Montand s'enfonçant lentement dans un étang dans IP5 - l'île aux pachydermes. »