Israel Zangwill naît dans une famille de Juifsrusses émigrés. Après avoir exercé la profession d'instituteur, il fonde un journalhumoristique, Ariel, qu'il dirige pendant plusieurs années. En même temps, il publie ses premiers livres, dont son unique « polar » : Le Mystère de Big Bow (1892 ; The Big Bow Mystery), considéré comme le premier roman policier « en chambre close ». En 1928, l'ouvrage est adapté au cinéma sous le titre de Perfect Crime. Il s'agit de l'un des premiers films parlants.
En 1894, paraît Le Roi des Schnorrers, bref roman qui est devenu l'un des classiques de l'humour juif.
Avec Les Enfants du Ghetto, qui met en scène la communauté juive des quartiers est de Londres, Zangwill connaît un succès exceptionnel[1]. Ce roman atteint de tels records de vente qu'on le qualifie de « best-seller » : le mot restera. Cette œuvre et les suivantes, romans, récits et nouvelles, lui valent le surnom de « Dickens juif » et le placent parmi les écrivains britanniques les plus importants de son époque. Après avoir adapté Les Enfants du ghetto pour le théâtre, il fait jouer à New York ses principales pièces, dont The Melting Pot (Le Creuset), métaphore qui désigne la société américaine ; l'expression « melting pot » est passée à la postérité dans de nombreux pays.
Parallèlement, Zangwill s'interroge sur la montée des périls qui menacent la communauté juive dans l'Europe des années 1880 et 1890 : les pogroms de Russie et de Pologne, les émeutes antisémites de Londres lors des crimes de Jack l'Éventreur, l'affaire Dreyfus en France. Il est l'un des premiers à militer pour la création d'un Foyer national juif. C'est à ce titre que Theodor Herzl va le voir à Londres en prononçant cette phrase demeurée historique : « Aidez-moi à fonder l'État juif ». En revanche c'est Zangwill qui est l'auteur de la phrase « la Palestine est une terre sans peuple pour un peuple sans terre » attribuée parfois faussement à Herzl[2]. Cependant, quelques années plus tard, Zangwill avait pris conscience de la densité de la population arabe déclarant à un auditoire de New York: « La Palestine elle-même a déjà ses habitants ».
Des dissensions de plus en plus nettes apparaissent cependant entre les deux courants représentés par Herzl et Zangwill, et cela entre le premier congrès de Bâle et le septième, celui de 1905. Le sionisme proprement dit s'oppose au territorialisme. En d'autres termes, les deux mouvements ne s'accordent pas sur le choix de la Palestine en tant que lieu d'établissement d'un « foyer national juif ». Le sionisme de Herzl l'emporte, consacré quelques années plus tard par la déclaration Balfour de 1917. Avec le déclin de l'option territorialiste, Zangwill s'éloigne de la politique tout en consacrant son énergie à défendre l'émancipation des femmes.
« Israel Zangwill (1864—1926) », dans Elizabeth Crawford, The Women's Suffrage Movement. A Reference Guide 1866-1928, Londres, Routledge, , p. 766.
Meri-Jane Rochelson, Israel Zangwill (1864-1926) : le féministe, in Martine Monacceli (dir.), Ces hommes qui épousèrent la cause des femmes : Dix pionniers britanniques, Éditions de l'Atelier, 2010, (ISBN2708241052).