Fils de Robert Ier de France, roi de Francie occidentale, et de Béatrice de Vermandois, descendant au 6e degré par sa mère de Charlemagne, Hugues le Grand, appelé parfois « Hugues le Blanc » en raison de son teint pâle, était un personnage puissant du royaume de Francie occidentale à l'origine de l'établissement de la dynastie capétienne.
Après la mort sans descendance, en janvier 936, de son beau-frère le roi Raoul, Hugues le Grand choisit de ne pas briguer la couronne de Francie occidentale (qui était pourtant à sa portée), dans la mesure où il disposait, en Neustrie et même en Francie d'« une puissance qui l'emportait sur tout autre grand »[2]. Hugues préféra rappeler sur le trône le jeune fils de Charles III le Simple, Louis IV d'Outremer, qui avait suivi sa mère lors de son exil en Angleterre. Il espérait ainsi gouverner à la place de son neveu par alliance (il avait épousé en 926 la sœur d'Edwige de Wessex, mère de Louis IV), désormais son obligé, et disposer d'un pouvoir bien plus grand, en tant que régent, que s'il avait obtenu une promotion qui n'aurait pas été sans inquiéter les autres grands du royaume. Par ailleurs, cela lui permettait de contrer les ambitions de son oncle, Herbert II de Vermandois, dans la lutte pour l'hégémonie en Francie occidentale. Le dimanche 19 juin 936, Louis IV fut ainsi couronné et sacré roi par Artaud, l'archevêque de Reims. La cérémonie du sacre eut lieu dans l'église abbatiale de Saint-Vincent de Laon, sa ville natale et fief de sa famille carolingienne.
Un mois plus tard, le 25 juillet 936, Louis IV donna à Hugues les moyens de manifester dans le royaume sa prééminence sur les autres princes, en lui accordant le titre de dux Francorum, duc des Francs. La signification de ce titre fut explicitée le 26 décembre de la même année par un document dans lequel Louis IV soulignait que cela faisait d'Hugues « en tous nos regna, le second après nous »[2], assimilé à un « vice-roi », de position équivalente au maire du palais sous les derniers Mérovingiens[3]. Les diplômes de juillet, en affirmant qu'il était abbé laïc de Saint-Germain d'Auxerre et maître d'Autun (deux éléments fondamentaux de la principauté bourguignonne), avaient déjà accentué son pouvoir en contestant la légitimité d'Hugues le Noir à se proclamer prince d'une Bourgogne qu'il pensait avoir héritée de son frère le roi Raoul[2].
Cependant, la prépondérance d'Hugues le Grand finit par exaspérer le jeune roi qui, cherchant à s'émanciper, prit les armes pour le combattre. Hugues s'allia alors à Herbert de Vermandois et Guillaume Longue-Épée, duc de Normandie[3]. En 940, Louis IV fut battu près de Reims puis, en 945, capturé par les Normands et remis à Hugues, qui le confia à Thibaud de Blois. Hugues le libéra sous la pression de l'empereur des Romains Otton Ier, mais obtint la ville de Laon en échange.
Disposant déjà de la suzeraineté sur la Bourgogne, que Louis IV lui avait accordée en 943[7], il obtint la confirmation de son titre de « duc des Francs »[3] ainsi que l'Aquitaine (dont il assura la tutelle de 954 à sa mort en 956) en échange de son accord, après la mort de Louis IV (en 954), à la montée de Lothaire sur le trône de Francie occidentale.
De sa concubine Raingarde de Dijon, fille de Raoul comte de Dijon (et par la suite épouse de Ansoud IerLe Riche, dit « Ansoud L'Auxerrois », vicomte d'Auxerre[9]), il eut :
Eudes-Henri, duc de Bourgogne. Il laisse une postérité avec au moins un enfant illégitime (Eudes de Beaune († apr. ), vicomte de Beaune), probablement deux enfants illégitimes (Henri de Vergy ? († av. 1023), lignée robertienne (?) de la famille de Vergy) ; et adopte Othon-Guillaume, futur comte de Bourgogne, fils de sa première femme et d'Aldebert, ex-roi d'Italie, le premier mari de celle-ci[10].
↑ ab et cOlivier Guillot, Albert Rigaudière, Yves Sassier, Pouvoirs et institutions dans la France médiévale, tome I : Des origines à l'époque féodale, Armand Colin, 2003, p. 170.
↑ ab et cChristian Bonnet, Christine Descatoire, Les Carolingiens, 741-987, Armand Colin, 2001, p. 214.
↑[Migne 1847] Abbé Migne, Dictionnaire universel et complet des conciles, t. 1, , 1424 p., sur archive.org (lire en ligne), p. 989.
↑L. Theis, L'héritage des Charles, Paris, Seuil, 1990. p. 176.
↑[Desmichels 1831] Ovide Chrysanthe Desmichels, Histoire générale du Moyen Âge, t. 2 : Grandeur, décadence, démembrement de l'empire de Charlemagne , et la formation de la société féodale en Europe, Paris, Louis Colas, , sur books.google.fr (lire en ligne), p. 628.
↑[Guyot 1869] Joseph Guyot, Chronique d'une ancienne ville royale, Dourdan capitale du Hurepoix, Paris, libr. Auguste Aubry, , sur books.google.fr (lire en ligne), p. 13.
↑(en) Charles Cawley, « Eudes (~948-15 oct. 1002) », dans « Burgundy duchy – Beaune & Chalon », ch. 1 : « Beaune », sur Medlands - Foundation for Medieval Genealogy (consulté le ).
Voir aussi
Bibliographie
Stéphane Lecouteux, « Le contexte de rédaction des Annales de Flodoard de Reims (919-966) : Partie 1 : une relecture critique du début des Annales à la lumière de travaux récents », Le Moyen Âge, De Boeck, t. 116, no 1, , p. 51-121 (lire en ligne).
Stéphane Lecouteux, « Le contexte de rédaction des Annales de Flodoard de Reims (919-966) : Partie 2 : présentation des résultats de la relecture critique du début des Annales », Le Moyen Âge, De Boeck, t. 116, no 2, , p. 283-318 (lire en ligne).
Yves Sassier, « Thibaud le Tricheur et Hugues le Grand », dans Olivier Guillot (dir.) et Robert Favreau (dir.), Pays de Loire et Aquitaine de Robert le Fort aux premiers Capétiens : actes du colloque scientifique international tenu à Angers en septembre 1997, Poitiers, Société des antiquaires de l'Ouest, coll. « Mémoires de la Société des antiquaires de l'Ouest et des musées de Poitiers / 5e » (no 4), , 266 p. (présentation en ligne), p. 145-157, [présentation en ligne].
Christian Settipani, La Préhistoire des Capétiens (481-987). Première partie : Mérovingiens, Carolingiens et Robertiens, Nouvelle histoire généalogique de l'auguste maison de France, vol. 1, Patrick van Kerrebrouck (éd.), Villeneuve d'Ascq, 1993 (ISBN2-9501509-3-4).
Laurent Theis, Nouvelle histoire de la France médiévale, vol. 2 : L'héritage des Charles : de la mort de Charlemagne aux environs de l'an mil, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points. Histoire » (no 202), , 280 p. (ISBN978-2-02-011553-7).
Karl Ferdinand Werner, « Les premiers Robertiens et les premiers Anjou (IXe - début Xe siècle) », dans Olivier Guillot et Robert Favreau (éd.), Pays de Loire et Aquitaine de Robert le Fort aux premiers Capétiens. Actes du colloque scientifique international tenu à Angers en septembre 1987, Poitiers, 1997, « Mémoires de la Société des antiquaires de l'Ouest et des musées de Poitiers », 5e série, IV, [présentation en ligne], p. 9-67.