Surnommé le Doctor resolutissimus et le Doctor modernus à cause du caractère radical et novateur de ses opinions, il est tenu pour avoir inauguré la troisième période scolastique, qui distingue la philosophie, considérée comme une science de la raison et la théologie, d'ordre spirituel. Dans la recherche de la vérité, l'exercice de la raison l'emporte donc sur toute autorité humaine, celle d'Aristote y compris[2]. Au réalisme aristotélicien de Thomas d'Aquin, il oppose le nominalisme, et il est l'un des précurseurs du terminisme de Guillaume d'Occam. Au centre de sa pensée semble ancrée la volonté de nier ou de supprimer de nombreux concepts de la scolastique qui lui paraissent inutiles ou superflus. Ainsi, toute existence étant pour elle-même singulière, il nie l'existence des universaux. Les choses sont singulièrement[pas clair] et l'universalité n'est qu'une indétermination. Le principe d'individuation est donc inutile. Contre Thomas d'Aquin, il combat la distinction réelle de l'essence et de l'existence, l'unicité de la forme substantielle. Il nie la connaissance de l'âme par elle-même. L'intelligence ne se connaît pas par son essence, mais à travers son intellection des objets. L'âme ne se distinguant pas de ses opérations, l'universel se fonde sur l'expérience tout en la dépassant. La vérité n'est donc que l'adéquation subjective entre l'objet connu et l'objet perçu. En noétique, il rejette les espèces sensibles, le recours à un intellect agent séparé, la nécessité de représentations conceptuelles distinctes de l'acte intellectuel et défend une appréhension immédiate du réel.
Œuvres
Durand de Saint-Pourçain est l'auteur d'un commentaire sur les Sentences de Pierre Lombard, dont il existe trois recensions et qui a fait l'objet de nombreuses éditions à partir de 1508 (mais d'aucune édition critique), ainsi que de plusieurs traités de théologie en latin, dont plusieurs questions quodlibétiques. Il a aussi écrit un traité (en latin) sur la puissance temporelle des rois, mentionné par le dominicainJacques Échard[3].
↑Charles Marie Gabriel Bréchillet Jourdain, La philosophie de saint Thomas d'Aquin, vol. 2, éd. L. Hachette, (lire en ligne), chap. IV (« Durand de Saint-Pourçain et Guillaume d'Ockham »), p. 155-157
↑Abbé Jean Lebeuf, Mémoires concernant l’histoire ecclésiastique et civile d’Auxerre..., vol. 1, Auxerre, Perriquet, , 886 p. (lire en ligne), p. 521.
Voir aussi
Bibliographie
Quétif-Echard, Scriptores O. P., I, 586
Daniel-Antonin Mortier,
Histoire des maîtres généraux de l'Ordre de Frères Prêcheurs, Paris, 1907, t. III, 1907, p. 69-86;
La faculté de théologie de Paris et ses docteurs les plus célèbres, III, 401-408.
Guy Bedouelle, Romanus Cessario et Kevin White, Jean Capreolus en son temps (1380-1444), Éditions du Cerf, Paris, 1997.
(de) Joseph Koch, Durandus de S. Porciano. Beiträge zur Geschichte der Philosophie des Mittelalters 26, Münster, 1927.
(en) Isabel Iribarren, Durandus of St Pourçain. A Dominican theologian in the shadow of Aquinas, Oxford, Oxford University Press, 2005.
Durand de Saint-Pourçain, Commentaire des Sentences. Prologue, Présentation et traduction par David Piché, Paris, Les Belles Lettres, 2020.