Née d'Abraham Mendelssohn, banquier, et de Lea Salomon, petite-fille du fabricant médailliste berlinois Daniel Itzig, elle est la sœur aînée du compositeur Felix Mendelssohn Bartholdy, de Rebecka Dirichlet(de) et de Paul Mendelssohn-Bartholdy(de). La famille, d'origine juive, se convertit au protestantisme et les quatre enfants sont baptisés en 1816[1]. Elle est élevée dans l'atmosphère cultivée de l'intelligentsia berlinoise où la famille déménage en 1811, quittant Hambourg. Les femmes de sa famille maternelle sont des musiciennes accomplies, et Fanny Mendelssohn reçoit une excellente éducation musicale de sa mère[2]. Au cours d'un voyage de la famille à Paris quand elle et son frère sont encore très jeunes, ils suivent tous deux des cours avec Marie Bigot de Morogues, élève de Beethoven. De retour à Berlin, elle étudie le piano auprès de Ludwig Berger et d'Ignaz Moscheles, et la composition avec Carl Friedrich Zelter, deux des meilleurs éducateurs de la ville[3].
Liens familiaux
Très tôt, comme son frère, elle manifeste des dons musicaux. Son père et ensuite son frère l'empêcheront néanmoins de se consacrer totalement à sa première passion, la musique. Ainsi Abraham Mendelssohn écrivit à sa fille alors âgée de 15 ans : « la musique deviendra peut-être pour lui [Felix] son métier, alors que pour toi elle doit seulement rester un agrément mais jamais la base de ton existence et de tes actes[4]. » Son frère n'est pas en reste : « L’encourager à publier quoi que ce soit, je ne le puis, car ce serait aller contre mes convictions. Nous avons souvent discuté fermement de cela et je maintiens tout à fait mon opinion... Fanny, telle que je la connais, n’a jamais souhaité devenir compositeur ni avoir une vocation pour cela ; elle est trop femme. Elle dirige sa maison et ne pense nullement au public ni au monde musical, ni même à la musique, tant que ses premiers devoirs ne sont pas remplis. Publier ne pourrait que la distraire de cela et je ne peux pas dire que je l’approuverais[5]. »
Alors que Fanny doit se limiter au salon, les parents Mendelssohn « offrent » tous les dimanches à Felix un orchestre qui lui permet de tester ses créations, permettant la publication du Songe d'une nuit d'été alors qu'il n'a que 17 ans. De la même façon, Felix est présenté à Goethe alors qu'il n'est âgé que de 11 ans[A 1], tandis que Fanny est mise à l'écart, cette rencontre ne concernant que la gent masculine[3].
Fanny entretient pourtant une relation très proche avec son frère Felix, de trois ans et demi son cadet. Il n'était pas rare que ce dernier allât chercher des conseils en matière de composition auprès de sa sœur, dont il respectait le goût musical. Elle organise également pour lui des concerts et tournées, ainsi que des rencontres avec Gounod, Liszt, Clara et Robert Schumann.
La pianiste
Fanny Mendelssohn se révéla très vite être une pianiste extrêmement douée. Ainsi, elle impressionne sa famille quand, âgée de 13 ans, elle joue par cœur l'intégralité des préludes du Livre 1 du Clavier bien tempéré de Bach[A 2]. En février 1831, dans une lettre à Goethe, Zelter, son professeur de composition, loua ses talents de pianiste : « (...) elle joue comme un homme »[6].
La compositrice
Elle compose très jeune. Sa première œuvre connue a été composée à l'âge de 14 ans. Il s'agit d'un chant que Fanny, tout comme Felix, écrivirent sur un même texte offert comme cadeau d'anniversaire à leur père. C'est l'année suivante, en 1819, qu'elle commence les cours avec Carl Friedrich Zelter.
Bien que sa famille et sa situation ne lui permettent pas de publier, on comprend que la composition prenait une place très importante dans sa vie : « Maintenant que Rebecca a abandonné le chant, mes lieder ne retiennent plus l’attention et restent inconnus. Si personne n’émet jamais une opinion ou ne prend le moindre intérêt aux productions que l’on écrit, non seulement on y perd tout plaisir, mais en plus tout pouvoir de juger de leur valeur[7]. »
Rencontre avec Wilhelm Hensel
Elle épouse en 1829 le peintre Wilhelm Hensel, de 11 ans son aîné, différence d'âge qui au premier abord effraye un peu Abraham Mendelssohn[A 3]. Le couple aura un fils, Sebastian Ludwig Felix, les prénoms de ce dernier provenant des compositeurs favoris de Fanny, Bach et Beethoven. Sebastian Ludwig Felix aura pour fils le mathématicien Kurt Hensel.
Wilhelm Hensel l'encourage à jouer et, contrairement à son père et son frère, l'incite à publier ses œuvres. Bien qu'elle ne voyage pas énormément, surtout si l'on compare avec son frère qui parcourt l'Europe, Fanny et son mari partent en 1839 pour l'Italie. Ils demeureront plus de six mois à Rome, où Fanny rencontre et impressionne les compositeurs français Hector Berlioz et Charles Gounod. Ce dernier la décrit comme « une musicienne inoubliable, une excellente pianiste et une femme d’une intelligence supérieure. »
À partir de 1843, elle supervise les concerts du dimanche matin dans la maison de ses parents à Berlin.
Elle meurt d'une crise d'apoplexie le , à l'âge de 41 ans.
Il est à noter que, d'après la pianiste Françoise Tillard, six des lieder de jeunesse de son frère Felix (dont Sehnsucht - Nostalgie - et Italien) ont en réalité été composés par Fanny, comme Felix le reconnaissait lui-même.
Très peu de ces œuvres ont été publiées, Fanny Mendelssohn n'ayant trouvé le courage de les publier qu'en 1846, un an avant sa mort.
Discographie sélective
1978, Camerata Canada : Fanny Mendelssohn, Trio For Violin, Cello And Piano In D Minor Op. 11 (Posth.), Saint-Saëns, Tarantella for Flute, Clarinet and Piano, op.6, Taussig(en), Paganiniana (Crystal Records)
1984, Trio Fidelio, Brigitte Lafon, Aline Dumas, Françoise Tillard : Trio En Sol Mineur op. 11, Romances Sans Paroles, Lieder (Calliope)
1984, Chor Und Orchester Der Kölner Kurrende, Elke Mascha Blankenburg : Oratorium Nach Bildern Der Bibel (CPO 1987)
1986, Isabel Lippitz, Barbara Heller : Lieder Für Sopran Und Klavier Opp. 1, 7, 9, 10 (CPO)
1987, Liana Serbescu : Klavierwerke Vol. 1 & 2. Sur ces disques figurent les deux Sonates, des extraits de l'op. 6 et Das Jahr (CPO)
1996, Béatrice Rauchs : Das Jahr, 4 Klavierstücke (Bayer Records)
1997, Béatrice Rauchs : Sonata in G minor, Prelude in E minor, piano pieces, Six mélodies pour le piano (BIS)
2003, Hero und Leander, Maacha Deubner, soprano, Kammersymphonie Berlin, dir. Jürgen Bruns, avec Emilie Mayer et Luise Adolpha Le Beau (Dreyer Gaido)
2011, Quatuor Florestan : Marie Jaëll, Quatuor à cordes en sol mineur, Fanny Mendelssohn : [[Quatuor à cordes de Fanny Mendelssohn|Quatuor à cordes en mi majeur]] (Éditions Solstice)
2013, Quatuor Ébène: Mendelssohn Felix and Fanny (Erato/Warner Classics). Sur ce disque figure le Quatuor à cordes en mi bémol majeur.
2016, Irene Barbuceanu : Piano Pieces (Koch Schwann). Sur ce disque figurent des pièces extraites des op. 2, 4, 5, 6 et 8 ainsi que divers Klavierstück
Notes et références
↑(de) Peter Schleuning, Fanny Hensel geb. Mendelssohn: Musikerin der Romantik, Cologne, Böhlau-Verlag GmbH, , 359 p. (ISBN9783412048068).
↑(de) Martina Bick, Musikerinnen in der Familie Mendelssohn, Berlin, Hentrich&hentrich, coll. « Jüdische Miniaturen », , 80 p. (ISBN978-3-95565-196-1).
E. Sergy, Fanny Mendelssohn, d'après les mémoires de son fils, Paris, Librairie Fischbacher, , 446 p. (lire en ligne). .
(en) Carol Neuls-Bates, Women In Music : An Anthology of Source Readings from the Middle Ages to the Present, Northeastern, , 384 p. (ISBN978-1555532406).
Françoise Tillard, Fanny Hensel, née Mendelssohn Bartholdy, préface par Gérard Condé, Éditions Symétrie, Lyon, 2007, 430 p. (ISBN2-914373-20-1)
Agnès Boucher, Comment exister aux côtés d'un génie, Fanny Mendelssohn, Clara Schumann, Alma Mahler et les autres, L'Harmattan, 2012 (ISBN978-2-296-96153-1).