En mathématiques, plus précisément en théorie des ensembles, un ensemble infini est un ensemble qui n'est pas fini, c'est-à-dire qu'il n'y a aucun moyen de « compter » les éléments de cet ensemble à l'aide d'un ensemble borné d'entiers. Un ensemble en bijection avec un ensemble infini est donc infini.
Un ensemble E est dit infini (au sens usuel) si, pour aucun entier natureln, il n'existe de bijection de { 0, 1, … , n – 1 } (les entiers naturels strictement inférieurs à n) dans cet ensemble E.
Dans la théorie de Zermelo (Z), l'axiome de l'infini permet de construire l'ensemble ℕ des entiers naturels[1], qui est alors un ensemble infini. Avec les seuls autres axiomes de ZFC, on ne peut montrer l'existence d'ensembles infinis.
Avec le choix dénombrable, « infini » ⇒ « infini au sens de Dedekind »[6].
Soit X un ensemble infini. Pour tout entier naturel n, l'ensemble Xn des n-uplets d'éléments de X distincts est donc non vide, si bien qu'il existe (par choix dénombrable) une suite (yn) telle que pour tout n, yn = (yn,1, … , yn,n) ∈ Xn. On peut alors définir par récurrence une injectionf de ℕ dans X en posant, pour tout n, f(n) = yp,q, où (p, q) est le plus petit couple (pour l'ordre lexicographique) tel que yp,q ∉ {f(k)|k < n}.
On peut montrer que l'équivalence entre « infini » et « infini au sens de Dedekind » est plus faible que l'axiome du choix dénombrable, au sens où, en supposant que la théorie ZF est cohérente, il existe un modèle de la théorie des ensembles ZF où tout ensemble infini est infini au sens de Dedekind, mais qui ne satisfait pas l'axiome du choix dénombrable[6].
la réunion disjointe de deux ensembles dont l'un est infini est équipotente à celui d'entre eux de plus grand cardinal, c'est-à-dire que, si et sont deux cardinaux dont l'un est infini :
;
le produit cartésien de deux ensembles dont l'un est infini et l'autre non vide est équipotent à celui d'entre eux de plus grand cardinal, c'est-à-dire que, si λ et μ sont deux cardinaux dont l'un est non nul et l'autre infini :
λ • μ = sup(λ,μ) ;
en particulier tout ensemble infini est équipotent à son carré cartésien, c'est-à-dire que si λ est infini :
λ2 = λ.
Ce dernier résultat a pour conséquence les deux précédents par le théorème de Cantor-Bernstein. Il suffit de remarquer que, si λ ≥ μ, λ + μ (réunion disjointe) s'injecte dans λ•2, et λ • μ s'injecte dans λ • λ.
Pour le démontrer[7], on identifie le cardinal infini λ à un ordinal initial infini. En effet tout ensemble, est bien ordonnable par l'axiome du choix, donc équipotent à un ordinal. Un ordinal initial est un ordinal qui ne s'injecte dans aucun ordinal strictement inférieur. On peut parler du plus petit cardinal d'une classe non vide de cardinaux, puisque la classe des cardinaux devient une sous-classe de celle des ordinaux.
Clairement s'injecte dans . Supposons qu'il existe un cardinal infini tel que , et appelons dorénavant le plus petit d'entre eux. L'ordre défini sur par
ssi ou ou
est un bon ordre.
Ce bon ordre est isomorphe par à un ordinal γ, avec γ ≥ card(γ) > λ par hypothèse sur λ. Comme λ < γ, λ possède un antécédent (α,β) par la bijection f. Comme card(α) ≤ α < λ et card(β) ≤ β < λ, en posant δ = sup(α,β) on a δ < λ, donc card(δ) < λ : cette dernière inégalité est bien une inégalité entre cardinaux, car λ est un ordinal initial. Par choix de l'ordre donc restreinte à λ définit une injection de λ dans (δ+1)2. Comme λ est infini, (δ+1)2 aussi, donc δ + 1 et donc δ également. Donc card(δ + 1) = card(δ).
Comme card(δ) < λ, card(δ) ≠ card(δ)2, ce qui contredit la minimalité de λ. On a bien λ = λ2 pour tout cardinal infini λ.
↑Il est possible de représenter les entiers en théorie des ensembles, par les ordinaux finis ; α est un ordinal fini si tout ordinal non nul inférieur ou égal à α possède un prédécesseur. L'entier n est alors l'ordinal fini { 0, 1, … , n - 1 }, de sorte qu'un ensemble est fini exactement s'il est équipotent à un entier. Ces définitions ne nécessitent pas l'axiome de l'infini, qui énonce essentiellement l'existence de l'ensemble des entiers naturels, cf. Jean-Louis Krivine, Théorie axiomatique des ensembles, P.U.F., Paris, 1972, p. 38. Il est également possible de donner une définition équivalente d'ensemble fini qui ne fait pas référence aux entiers, comme celle de Russell et Whitehead ou celle de Tarski, voir Ensemble fini#Les définitions de Tarski et de Russell-Whitehead ou Roland Fraïssé, Logique mathématique, vol. I, Gauthier-Villars, Paris, 1971, p. 12-14.
↑(de) Richard Dedekind, Was sind und was sollen die Zahlen ? [« Que sont et à quoi servent les nombres ? »], (lire en ligne), § 5, définition 64.
↑Plus précisément : l'existence d'un ensemble E infini au sens de Dedekind implique simultanément l'axiome de l'infini et l'existence d'une injection de ℕ dans E.
René Cori et Daniel Lascar, Logique mathématique II. Fonctions récursives, théorème de Gödel, théorie des ensembles, théorie des modèles [détail des éditions]