Chouaguens

Le terme de chouaguens (selon la prononciation vulgaire, "chouayen") est un surnom donnĂ© par les Canadiens aux collaborateurs, dans le Bas-Canada, du parti des bureaucrates, alliĂ© du gouverneur, Ă  l'Ă©poque des luttes du Parti canadien au dĂ©but du XIXe siècle (en particulier lors de la rĂ©volte de 1837-1838) puis patriote contre la Clique du château.

Histoire

Le surnom, Ă  ne pas confondre avec chouan, est issu de l'histoire militaire rĂ©cente de la colonie canadienne : durant un affrontement par ailleurs victorieux des troupes menĂ©es par Montcalm au Fort Chouaguen, certains Ă©lĂ©ments parmi les troupes franco-canadiennes avaient flanchĂ© et s'Ă©taient mĂ©ritĂ© ce surnom moqueur.

Depuis l'Acte constitutionnel de 1791 qui crĂ©e la province du Bas-Canada et lui accorde une assemblĂ©e, une opposition politique s'est dĂ©finie dans les termes suivants : Ă  l'AssemblĂ©e, la majoritĂ© des dĂ©putĂ©s reprĂ©sentent les intĂ©rĂŞts de la majoritĂ© canadienne-française. Une minoritĂ© dĂ©fend les intĂ©rĂŞts de la minoritĂ© britannique et protestante, qui exerce une domination sur les hautes fonctions politiques et le grand commerce. L'exĂ©cutif, selon cette constitution, relève du gouverneur ; il nomme les membres du conseil exĂ©cutif, ainsi que du conseil lĂ©gislatif (Ă©quivalent du SĂ©nat dans la constitution canadienne de 1867). L'exĂ©cutif n'est pas responsable devant la chambre des dĂ©putĂ©s.

Ainsi, le gouvernement est capable de gouverner en fonction des intĂ©rĂŞts de la minoritĂ© dominante ; la Chambre octroie toutefois les budgets et passe des lois, ce qui gĂ©nère une certaine tension. Dans ce contexte, une partie de l'Ă©lite canadienne, parmi les seigneurs, et dans une moindre mesure le haut-clergĂ©, ralliĂ©e par l'Acte de QuĂ©bec de 1774, s'allie au parti anglais, et s'assure ainsi de maintenir un accès aux emplois de la fonction publique. Autour de cette Ă©lite s'agglutinent quelques bourgeois et petit-bourgeois qui occupent des emplois subalternes au service des dirigeants de la clique.

Ce clivage est Ă©galement idĂ©ologique ; le parti tory rassemble des gens attachĂ©s Ă  la constitution britannique mais voulant en priver les Canadiens, qui sont aussi des dĂ©tracteurs des rĂ©gimes rĂ©publicains de France et des États-Unis. Parmi la noblesse canadienne qui se rallie Ă  ce parti, il se trouve Ă©galement des adversaires des principes rĂ©publicains voire, des principes libĂ©raux, proches de la sensibilitĂ© des ultras qui appuient la Restauration en France. Ă€ l'inverse, les Patriotes s'inspirent des rĂ©gimes rĂ©publicains (ainsi que des Ă©lĂ©ments les plus libĂ©raux du rĂ©gime britannique).

Références

  • Louis-Georges Harvey, Le printemps de l'AmĂ©rique française, BorĂ©al, 2005.
  • StĂ©phane Kelly, La Petite Loterie, BorĂ©al, 1997.