Petit-fils de l’archéologue Jean-Charles Vacher de Tournemine (1755-1840), Charles de Tournemine est le fils naturel de Bernard Vacher de Tournemine, officier de l’armée française, qui ira déclarer sa naissance à la mairie de Toulon, mais qui n’épousera pas sa mère, Marie Anne Victoire Roubaud. Il n’abandonnera pas son fils, intervenant plusieurs fois dans sa carrière.
Élevé par sa mère seule à Toulon, il montre déjà des aptitudes au dessin. Il entre en 1825 à l’école des mousses et sert sur la goélette L’Amaranthe. Il voyage sur la Méditerranée et découvre les villes de Constantinople, Beyrouth, Tyr, Alexandrie, Chypre, la Syrie et la Tripolitaine. Il est blessé à l’œil gauche à la bataille de Navarin, le .
Il quitte la marine et, le , il s’engage dans le 11e régiment d’artillerie, où son père est colonel. En 1840, il devient dessinateur au ministère de la Guerre à Paris. Il habite chez sa tante Agathe et commence à dessiner dans l’atelier très réputé d’Eugène Isabey, où il rencontre des peintres qui deviendront ses amis. En 1843 et 1844, il fait plusieurs voyages en Normandie, Picardie, en Bretagne et pays de Loire. À la mort de sa tante en 1845, il devient son légataire universel et épouse, à Paris, Marie-Émilie-Clarisse Chauvin, le 29 novembre de la même année.
Tournemine fréquente le milieu artistique et achète les œuvres de ses contemporains et amis. À la fin de sa vie, il aura une collection d'œuvres représentatives de l'art de son époque malgré une vente importante de celle-ci en 1853[3].
Il rencontre Théophile Thoré-Burger et projette, avec lui, une édition ambitieuse sur l’Art moderne, qui ne verra pas le jour. En revanche, il prendra en charge, avec son ami le peintre Louis Français, une publication annuelle de lithographies, Les artistes contemporains, de 1846 à 1853. Ces huit numéros publieront 175 lithographies. Les artistes les plus renommés seront gravés, parmi lesquels figurent Eugène Delacroix, Jean-Baptiste Isabey, Félix Ziem, Prosper Marilhat ou Richard Parkes Bonington.
Il expose au Salon de Paris pour la première fois en 1846. Il montre sept toiles de Bretagne au Salon de 1848. Il entre au musée du Luxembourg en 1852, comme attaché à la conservation. En 1852 sa mère meurt à Toulon, le goût des voyages le reprend. Il demande un congé et vend une partie de sa collection pour partir vers l’Orient avec un nouveau regard, celui d’un peintre orientaliste. D’abord l’Italie puis, en 1853, le littoral d’Afrique du Nord, d’Alger à Tunis furent une révélation pour lui.
Après 1857, ses peintures ne font plus référence aux paysages français, et il devient un peintre orientaliste reconnu. Il commence une longue série de voyages en Orient pour compléter ses souvenirs méditerranéens de jeune marin. Puis il va en Turquie, en Asie mineure et en Égypte. Il accède à la commande publique.
En 1860, il repart le long du Danube vers la mer Noire, porte de l’Orient.
Son père, le baron et général Bernard Vacher de Tournemine, meurt en 1861[5]. En 1861, un ami d'enfance, général à la Garde impériale, écrit dans une lettre de recommandation que le peintre a « une nombreuse famille à élever » et qu'il « fait partie de l'administration des musées »[6]. L'État lui achète alors des peintures. En neuf ans, cinq de ses huiles sur toile de grand format, œuvres majeures représentatives de son style, entrent ainsi dans les musées français, dont plusieurs sont envoyées dans des musées de province :
Café à Adalia (Turquie d'Asie), vers 1856, 69 × 124 cm, achat de l’État en 1861 (Paris, musée d'Orsay)[7],[8] ;
Promenades de femmes turques en Asie mineure ; soleil couchant, 68 × 125 cm, achat de l’État en 1863 (Montpellier, musée Fabre) ;
Rue conduisant au bazar à Chabran El Kebir, 90 × 180 cm, achat de l’État en 1865 (musée d'art de Toulon) ;
Éléphants d’Afrique, 88 × 178 cm, acquis au Salon de 1867, don de l’empereur au musée du Luxembourg à Paris (Paris, musée d'Orsay)[9] ;
En 1863, lors d'un voyage de trois mois en Asie mineure, principalement sur la cote ouest, il prend beaucoup de notes et croquis qui seront la matière de son œuvre à venir.
En 1864, Tournemine rencontre les frères Goncourt qui publient par la suite Manette Salomon, dans lequel ils s’inspirent de leur correspondance avec Tournemine lorsqu’il voyageait en Asie Mineure.
Il a la responsabilité de la sauvegarde des collections du musée du Luxembourg pendant le siège de Paris. Il met un terme à sa carrière de conservateur après les évènements de la Semaine sanglante de la Commune en mai 1871. Il retourne à Toulon, où il meurt le [12]. Il est inhumé à Paris au cimetière de Montmartre (4e division).
Son fonds d'atelier et ses collections sont vendus aux enchères à l'hôtel Drouot, du 2 au 4 février 1874[13]. D'autres œuvres sont dispersées lors de la vente aux enchères de la collection de sa veuve, le [14].
↑Vente de l’atelier le , p. 175-176, in Jean-Claude Lesage, Charles de Tournemine, peintre orientaliste, Edisud, 1986.
↑Cette information du Dictionnaire général des artistes… d'Émile Bellier de La Chavignerie ne se trouve pas dans la base Léonore de l'ordre de la Légion d'honneur.
↑Théophile Gautier, « Salon de 1857 », L’Artiste, p. 131 : « … Cafés au bord de l’eau, passage de gués, points de vue pris entre Éphèse et Smyrne, pont aux arches ogivales enjambant de petites rivières par-dessus des touffes de lauriers roses, coupoles blanches, minarets d’ivoire plongeant dans le bleu du ciel. M. de Tournemine peint tout cela avec une facilité spirituelle, une transparence de ton et une décision de touche qui transportent dans la peinture à l’huile les qualités des belles aquarelles anglaises. »
↑Jean-Claude Lesage, Charles de Tournemine, Édisud, , p. 13 & 14 =.
↑Charles Pillet (commissaire-priseur), Perrot (commissaire-priseur) et Féral (expert), Catalogue de tableaux, aquarelles et dessins... par feu Ch. de Tournemine...Vente... 2, 3 et 4 Février 1873 [sic pour 1874], Paris, impr. de Pillet fils aîné, (lire en ligne).
↑Vente de Mme Ch. de Tournemine. 15 avril 1880 : Tableaux modernes, aquarelles, dessins (Frits Lugt, 40085), Paris, (BNF45968110).
↑Jean-Roger Soubiran, Denise Jasmin, Jean-Jacques Gloton, Jacques Foucart, Jean-Claude Lesage et al. (préf. François Trucy et Pierre Perruchio), Le musée a cent ans : [exposition], Musée de Toulon, 21 décembre 1988-6 juin 1989, Toulon, Musée de Toulon, , 450 p., 32 × 23,5 cm (ISBN2-905076-29-1, OCLC165610992), p. 206
Jean-Claude Lesage, Charles de Tournemine, peintre orientaliste, Aix-en-Provence, Édisud, .
Émile Bellier de La Chavignerie, Dictionnaire général des artistes de l'École française depuis l'origine des arts du dessin jusqu'à nos jours : architectes, peintres, sculpteurs, graveurs et lithographes, tome 2, Paris, Librairie Renouard, 1885, p. 583 (en ligne).
Geneviève Lacambre, Jacqueline de Rohan-Chabot, Le Musée du Luxembourg en 1874, Paris, Éditions des Musées nationaux, 1974, p. 172-174.
Jean-Roger Soubiran, Denise Jasmin, Jean-Jacques Gloton, Jacques Foucart, Jean-Claude Lesage et al. (préf. François Trucy et Pierre Perruchio), Le musée a cent ans : [exposition], Musée de Toulon, 21 décembre 1988-6 juin 1989, Toulon, Musée de Toulon, , 450 p., 32 × 23,5 cm (ISBN2-905076-29-1, OCLC165610992), p. 206-207.