Les blés durs siciliens antiques ou variétés locales de blés siciliens sont une série de 52 variétés de blés autochtones de Sicile[1],[2],[3] sur les 291 variétés présentes en Italie en 1927[4].
Histoire
Le terme « antique » est employé de manière inappropriée, avec une connotation plus commerciale que réelle[5]Les variétés dites « antiques » sont en fait simplement des blés qui étaient répandus à une époque non nécessairement éloignée, mais qui ne le sont plus aujourd'hui[5].
Ce sont des blés dont la plupart ont disparu parce qu'ils étaient peu adaptés à une culture intensive mécanisée, faisant largement appel aux engrais. En outre, ils ont un rendement à l'hectare plus faible que les variétés de blé modernes[4].
L'adoption par plus de 50 pays européens de l'Union pour la protection des obtentions végétales (UPOV) 91[6],[7] et ultérieurement de l'Accord sur les droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), a politiquement favorisé la disparition des variétés de blés autochtones de Sicile, et non seulement de celles-ci. En effet, cet accord international interdit l'échange de variétés de semences entre agriculteurs, ôtant aux paysans la possibilité d'entretenir, de préserver et de transmettre les semences de variétés indigènes pour leurs semis. Les semences ne deviennent ainsi que des concessions annuelles d'une multinationale qui impose les règles de culture au niveau international[4],[8].
Cependant, il faut souligner que l'agriculture paysanne a tendance à résister à ces contraintes et que persiste la tradition de réutiliser comme semences - quand les espèces le permettent - une partie des céréales produites, préservant ainsi la capacité individuelle de sélectionner avec le temps les semences les plus adaptées aux conditions propres de production sans dépendre d'une source extérieure[4].
En Sicile, où on comptait 52 variétés de blés cultivées en 2009, 50 % de la production d'environ 10 millions de quintaux a été obtenue à l'aide d'une seule variété[4].
Variétés
En Sicile, du fait de la grande diversité de conditions climatiques et microclimatiques du territoire, ainsi que des différentes conditions pédologiques et altimétriques et, au cours des siècles, on a sélectionné différentes variétés de blé cultivé, dont les suivantes[9],[10],[11],[12].
Une étude conduite par des chercheurs de la Stazione Consorziale Sperimentale di Granicoltura per la Sicilia, de Caltagirone (province de Catane) publiée en 2010 montre des différences entre certaines variétés de blés durs siciliens antiques et des variétés modernes de blés durs[14].
Dans l'étude, les blés appartenaient à quatre variétés de blés durs siciliens antiques confrontées à 13 variétés nouvelles de blés durs de Sicile.
Les quatre variétés anciennes étaient les suivantes : Cappelli, Margherito, Russello, Timilia.
Les variétés nouvelles étudiées étaient les suivantes : Arcangelo, Catervo, Ciccio, Duilio, Iride, K26, Lesina, Mongibello, Pietrafitta, Rusticano, Sant'Agata, Simeto, Tresor.
Les différences relevées dans l'étude sont les suivantes :
Les variétés modernes ont montré un poids plus élevé (1000 graines), avec une vitrosité plus élevée apte à produire plus de semoule.
Les variétés modernes ont une quantité de gluten sensiblement égale à celle des variétés anciennes, avec une teneur protéique légèrement plus élevée que celle des blés durs anciens. Seule la semoule de grains anciens présentait un indice de gluten plus faible avec donc également des propriétés viscoélastiques différentes des farines de l'autre groupe.
Les variétés anciennes présentent un indice alvéographique w inférieur (85 au lieu de 181 10-4joules), tandis que les autres paramètres visco-élastiques (P, L et G) ne diffèrent pas entre les deux groupes. En particulier, le rapport P/L ne montre pas de différences entre les deux groupes, du fait qu'ils sont tous deux des blés durs. La pâte obtenue avec les variétés anciennes est plus souple, moins dure et moins résistante par rapport aux variétés modernes.
Les variétés anciennes, selon une analyse sensorielle faite par une méthode standard pour produire du pain, produisent une croûte plus épaisse avec une mie moins alvéolée, des miettes plus petites et plus d'humidité.
Appellations
En Sicile, émerge une sensibilité et un intérêt économique pour les appellations d'origine des produits céréaliers comme pour, l'unique produit issu de la farine de blé dur, le pain AOP (appellation d'origine protégée, ou DOP en langue italienne) appelé « Pain de Dittaino » ou « Pagnotta del Dittaino ». Pour sa production, on peut utiliser différentes variétés de blés énumérées dans le cahier des charges de l'appellation :
« La matière première utilisée dans la production de la « Pagnotta del Dittaino » est la semoule remoulue provenant de la mouture de blé dur produit dans la zone de culture de l'appellation définie à l'article 3, appartenant aux variétés Simeto, Duilio, Arcangelo, Mongibello, Ciccio, Colosseo, représentant au moins 70 % du total de la farine utilisée. Les 30 % restants doivent de toute façon être constitués de blé dur appartenant aux variétés Amedeo, Appulo, Bronte, Cannizzo, Cappelli, Creso, Iride, Latino, Norba, Pietrafitta, Quadrato, Radioso, Rusticano, Sant’Agata, Tresor, Vendetta, produits également dans l'aire de production. Il n'est pas permis de mélanger le blé avec d'autres blés provenant d'autres territoires siciliens non inclus dans l'aire géographqiue, d'autres régions italiennes ou bien d'autres pays. »
— Pagnotta del Dittaino Dop: Riconoscimento CE: Reg. CE n. 516 du 17.06.09 (GUCE L. 155 du 18.06.09)
↑(en) B. Laliberté, L. Maggioni et N. Maxted, Report of a Task Force on Wild Species Conservation in Genetic Resources and a Task Force on On-farm Conservation and Management : Joint Meeting, 18-20 May 2000, Isola Polvese, Italy, Bioversity International, (ISBN978-92-9043-457-3, lire en ligne), p. 22.
↑(en) G. Gallo, M. Lo Bianco, R. Bognanni, G. Saimbene, A. Orlando, O. Grillo, R. Saccone and G. Venora, « Durum Wheat Bread: Old Sicilian Varieties and Improved Ones - ResearchGate », Journal of Agricultural Science and Technology, vol. 4, no 4 (Serial No.29), (ISSN1939-1250, lire en ligne [PDF]).
Palumbo M., Cambrea M., Licciardello S., Pandolfo A., Pesce A., Platania A., Roccasalva D., Russo M., Sciacca F., Spina A., Virzì N., Conservazione biodiversità, gestione banche dati e miglioramento genetico, Rome, Edizioni Nuova Cultura, (ISBN978-88-6812-098-6, lire en ligne), « Collezione di frumento duro in ambiente mediterraneo: germoplasma siciliano e internazionale », p. 497-512.
International Association for Cereal Science and Technology, Roland E. Poms: ICC Multilingual Dictionary of Cereal Science and Technology. 7 Language Edition Chiriotti, 2006, (ISBN88-85022-85-5).
Guido Bissanti: Sviluppo Rurale e Rinascimento Politico - Nuova Ipsa - Palermo 1999, (ISBN9788876761676).
Ugo De Cillis: I frumenti siciliani Catania : G. Maimone, cop. 2004., (ISBN9788877512291).
Giulia Gallo et al.; Stazione consorziale sperimentale di granicoltura per la Sicilia. I frumenti siciliani: patrimonio da mantenere e valorizzare Catania : G. Maimone, [2004], (ISBN9788877512307).
Genetica agraria, Tipografia Popolare, (lire en ligne)
Abbate V., Boggini G., Coppolino F., Lombardo G. M., 1997. Analisi della variabilità tra ed entro popolazioni di frumento duro Russello raccolte nell'area Iblea. In: Atti del 3º Convegno Nazionale Biodiversità, Reggio Calabria 1997: 335-341.
L'Italia agricola, Ramo Editoriale Degli Agricoltori., (lire en ligne).
L'Italia vinicola ed agraria : periodico settimanale de enologia, commercio vinicolo, viticultura e agricoltura pratica..., Societa degli enotechnica italiani, (lire en ligne).
(en) Fernand Braudel, The Mediterranean and the Mediterranean World in the Age of Philip II, University of California Press, , 1375 p. (ISBN978-0-520-20308-2, présentation en ligne), p. 603.
(en) John Hancock Klippart, The Wheat Plant : Its Origin, Culture, Growth, Development, Composition, Varieties, Diseases, Etc., Etc : Together with a Few Remarks on Indian Corn, Its Culture, Etc, Moore, Wilstach, Keys, & Company, (lire en ligne), p. 644.
Liens externes
(it) A. V., « Atlante del Pane », Consorzio di Ricerca Gian Pietro Ballatore, .