Bernard Squarcini est le cousin de Michel Scarbonchi[2]. Après avoir passé sa jeunesse à Digne-les-Bains, Bernard Squarcini fait ses études supérieures à l'université Aix-Marseille III, où il obtient un diplôme en criminologie en 1976 et une maîtrise en droit public en 1977[3].
En 1993, il devient sous-directeur des recherches à la DCRG, tout en étant parallèlement, à partir de 1994, directeur central adjoint des RG sous la direction d'Yves Bertrand.
Bernard Squarcini fut notamment l'un des artisans de l'arrestation en 2003 d'Yvan Colonna, l'assassin présumé du préfet Claude Érignac, alors que Nicolas Sarkozy était ministre de l'Intérieur.
En , d'après certaines sources, le ministre de l'Intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy, aurait souhaité nommer Bernard Squarcini au poste de directeur central des Renseignements généraux, mais Jacques Chirac préféra finalement nommer le préfet Pascal Mailhos.
En , il est nommé préfet délégué pour la sécurité et la défense auprès du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur[6]. Il succéde à ce poste à Roger Marion, nommé préfet délégué pour la sécurité et la défense auprès du préfet de la région Nord-Pas-de-Calais.
Directeur de la DST puis de la DCRI
Bernard Squarcini intervient en 2006 pour favoriser la réconciliation entre Nicolas Sarkozy et Alexandre Djouhri, organisation une rencontre entre les deux hommes dans un salon du Bristol[7].
Le , il est remplacé à ce poste par son ancien adjoint Patrick Calvar et devient préfet hors cadre[11].
Il quitte la police le et créé son cabinet Kyrnos Conseil. Il est aussi embauché par le cabinet d'intelligence économique Arcanum en .
En , Bernard Squarcini publie avec Étienne Pellot un ouvrage intitulé Renseignements français : nouveaux enjeux, dans lequel il expose sa vision d'une feuille de route pour réformer les services de renseignement français[12] et créer une loi cadre pour l'activité du renseignement, ainsi que des infractions spécifiques afin de lutter contre l'islam radical[13].
Dans le secteur privé
Depuis 2013, il exerce les fonctions de consultant indépendant au sein de la société Kyrnos Conseil qu'il a fondée[14]. Il a comme client principal le groupe LVMH, pour lequel il est officiellement chargé de la lutte contre l'importation de produits de luxe de contrefaçon[15],[16].
Il est également associé au cabinet de consultants Arcanum Global[4].
Affaires
Affaire Clearstream 2
Cité dans les listings de l'affaire Clearstream 2, Bernard Squarcini s'est constitué partie civile en . Parce que son nom figure sur le faux listing aux côtés de la chanteuse ajaccienne Alizée et de Laetitia Casta, il évoque à la barre un « racisme anticorse » au sommet de l'État[17].
Le , alors qu'il est toujours directeur de la DCRI, Bernard Squarcini est mis en examen par la juge Sylvia Zimmermann pour « atteinte au secret des correspondances [...], collecte illicite de données et recel du secret professionnel, [...] dans le cadre de l'« affaire des fadettes »[18] ».
Le , la cour d'appel de Paris annule deux des trois chefs de mise en examen de Bernard Squarcini. Il reste mis en examen pour « collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite »[19]. En , il est renvoyé en correctionnelle pour ce dernier chef d'accusation[20].
Le , il est condamné à 8 000 € d'amende. Il ne fait pas appel du jugement[21].
Rapports avec LVMH
Depuis 2011, la justice s'intéresse aux liens entre Bernard Squarcini et le groupe LVMH.
Chantage sur Bernard Arnault
En 2012, peu après son départ de la direction de la DCRI, Bernard Squarcini demande à la section L2 de mettre en place illégalement, un important dispositif de surveillance, destiné à identifier l'auteur d'un chantage visant Bernard Arnault, le propriétaire du groupe LVMH. Un salarié du groupe de luxe sera finalement identifié et licencié[22]. Le Canard Enchaîné fait le rapprochement entre cette opération clandestine aux frais de l'État[22] et le généreux contrat signé par LVMH avec Bernard Squarcini dès l'arrivée de la gauche au pouvoir[23].
En outre, l'enquête judiciaire ayant conduit à sa mise en examen révèle que peu de temps après sa contractualisation avec LVMH, Squarcini a fait suivre une synthèse de la plainte déposée contre LVMH par Hermès, après l'avoir obtenue de Christian Flaesch, alors directeur de la police judiciaire[24].
Affaire Ruffin-Fakir
L'information judiciaire visant Bernard Squarcini est étendue en après une plainte avec constitution de partie civile de François Ruffin et du journal Fakir.
Entre 2015 et 2016, Bernard Squarcini supervise l'espionnage de François Ruffin et des journalistes de Fakir pour le compte de LVMH[25]. Le député de la Somme François Ruffin aurait fait l'objet d'une surveillance pendant près de trois ans par Bernard Squarcini à la demande du groupe LVMH lors du tournage du documentaire Merci Patron ! sur Bernard Arnault récompensé en 2017 du César du meilleur film documentaire.
En , la justice élargie son enquête à des faits de « vol » et « recel de vol » après une plainte du député de la Somme François Ruffin et du journal Fakir[26]. Une enquête de police indique en 2021 que Bernard Squarcini a continué après son départ de la DCRI à solliciter les services de l'État pour son intérêt personnel, notamment pour espionner François Ruffin et le journal Fakir pour le compte de la société LVMH[27].
En , Bernard Squarcini est mis en examen pour trois nouveaux chefs d’accusation, dont la complicité d’atteinte à la vie privée, pour l’espionnage de François Ruffin et de son journal Fakir au bénéfice de la multinationale LVMH[28],[29].
Le , après deux jours de garde à vue[31],[32], Squarcini est mis en examen pour de nombreux chefs d'accusation tels que « violation du secret de l'enquête », « trafic d'influence », « détournement de fonds publics », « compromission », « entrave aux investigations », « faux en écriture publique et usage », « recel de violation du secret de l'instruction », « atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique »[33].
Un contrôle judiciaire strict lui interdit de paraître dans les locaux de la DGSI à Levallois-Perret, d’entrer en contact avec les autres protagonistes de l’affaire et avec tout fonctionnaire de la direction centrale de la police judiciaire et des services de renseignement. Ce contrôle l'empêche jusqu’à nouvel ordre d'exercer une activité privée de conseil en sécurité en lien avec la lutte contre la contrefaçon. Cette interdiction est directement liée aux activités que menait Squarcini pour le compte du groupe de luxe LVMH, dans le cadre d'une procédure judiciaire concernant un conflit opposant LVMH à la société Hermès.
Par ailleurs, il est reproché à Squarcini d'avoir transmis à Michel Gaudin, directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy, des informations relatives à l’affaire Cahuzac, ainsi que d'avoir placé sur écoute un fonctionnaire du service des courses et jeux qui enquêtait sur le cercle de jeu Wagram, arguant de sa proximité supposée avec les services secrets algériens. L'enquête judiciaire a aussi mis en lumière les importants passe-droits obtenus de la DGSI par Squarcini après qu'il n'était plus en fonction, tels que la suppression de la Fiche S du milliardaire russe Andreï Skoch, des autorisations de séjour pour deux femmes russes proches d'Alexandre Djouhri, la recherche de dizaines de noms dans les fichiers confidentiels, ou encore une intervention en faveur de la femme de Bernard Arnault[24],[34].
En , Mediapart publie sur son site internet des écoutes téléphoniques où Bernard Squarcini utilise la police et les renseignements au profit de LVMH[37].
En , il est renvoyé en procès sous le coup de onze chefs d'inculpation dont « trafic d'influence passif, détournement de fonds publics, compromission du secret de la défense nationale, abus de confiance, faux en écriture publique ou encore complicité et recel de violation du secret professionnel et de l'instruction. »[38].
Prise de positions
Pendant l'invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022, lors de la soirée de lancement du média pro-russe Omerta, de Régis Le Sommier, Bernard Squarcini vient y retrouver le propriétaire, Charles d’Anjou, et affirme à propos du nouveau média : « C’est la Russie ! Il faut bien un contrepoids au lobbying américain »[39].
Il apparaît également dans une partie du documentaire Media Crash : qui a tué le débat public ?[40] consacrée à l'affaire de l'espionnage de François Ruffin et des journalistes de Fakir. Le film documente les opérations de Bernard Squarcini et de la direction de LVMH pour contenir le happening prévu par les journalistes et des militants à une réunion des actionnaires de LVMH au Carrousel du Louvre.
Bernard Squarcini et Étienne Pellot, Renseignement français : nouveaux enjeux, Éditions Ellipses, 19 novembre 2013, 312 pages, (ISBN978-2-7298-83386)
Bibliographie
Olivia Recasens, Didier Hassoux et Christophe Labbé, L'espion du président : Au cœur de la police politique de Sarkozy, Paris, Robert Laffont, , 283 p. (ISBN978-2-221-12983-8)
Notes et références
↑Olivier Faye, « Bernard Squarcini, un ancien chef du renseignement intérieur conciliant avec la Russie », Le Monde, (ISSN0395-2037, lire en ligne, consulté le ).