L'agglutinine I du ricin commun ou agglutinine I de Ricinus communis (en anglais : Ricinus communis agglutinin I, acronyme RCA I[a]) est une protéine du groupe des lectines trouvée naturellement aux côtés de la toxinericine dans les graines du ricin commun, une plante de la famille des Euphorbiaceae[2]. Elle est appelée ainsi par opposition à la ricine, qui est parfois désignée comme « agglutinine II de Ricinus communis »[3].
Biochimie
En termes de structure, c'est un tétramèreglycoprotéique de 120 kDa[b] composé de deux dimères semblables à la ricine[4], chacun pouvant être dissocié par réduction disulfure en sous-unités d'environ 27 et 33 kDa ; une sous-unité partage une grande identité avec la chaîne B de la ricine (RTB), tandis que l'autre est unique à la RCA[5],[6].
Toxicité
La RCA n'induit qu'environ 3 % de la toxicité de la ricine dans les essais de cytotoxicité sur des cellules humaines, mais c'est une agglutinine — plus précisément une hémagglutinine comme la concanavaline A — capable d'induire l'hémagglutination des érythrocytes (globules rouges)[7],[5]. Cette activité peut expliquer certains des derniers symptômes de l'empoisonnement à la ricine brute non purifiée, notamment l'hémorragie. La RCA est faiblement absorbée par le tube digestif chez les animaux et n'est pratiquement pas toxique pour les souris par rapport à la ricine[8]. Bien que la ricine soit considérablement plus toxique que la RCA, une préparation brute contenant à la fois de la ricine et de la RCA semble être plus toxique que la ricine seule, indiquant un effet synergique des deux substances dans la toxicité[9].
Expression génétique
Les séquences primaires complètes des protéines de la ricine et de la RCA ont été déterminées[10],[11], puis déduites de la séquence nucléotidique des ADNc clonés et des clones génomiques[4],[12],[13]. Les gènes de la ricine et de la RCA codent tous deux pour une protéine précurseur contenant une séquence signal N-terminale, une chaîne A, une région de liaison de 12 acides aminés et une chaîne B[4],[12],[14]. Les chaînes A de la ricine (31 kD) et de la RCA diffèrent par 18 de leurs 267 résidus, avec 93 % d'identité au niveau des acides aminés, tandis que les chaînes B (pour la ricine, 31,5 kD) diffèrent par 41 de leurs 262 résidus, avec 84 % d'identité[4]. Auparavant, on pensait que la ricine et la RCA étaient codés par une famille multigénique composée d'environ huit membres[13],[14], dont au moins trois étaient non fonctionnels[14]. Cependant, le séquençage du génome du ricin a démontré la présence de 28 copies de gènes et pseudogènes liés à la ricine[15]. L'expression des gènes de la ricine et de la RCA est spécifique à chaque tissu et régulée par le développement, de sorte que la ricine et la RCA matures ne s'accumulent que dans l'albumen des graines de ricin[16],[14],[17]. Les fonctions biologiques de la ricine et de la RCA dans la plante restent inconnues, on pense qu'elles pourraient avoir un rôle de défense contre les prédateurs[18].
Notes et références
Notes
↑Les auteurs scientifiques utilisent aussi l'acronyme simplifié « RCA », sans mentionner le numéro, la distinction n'étant souvent pas nécessaire avec la ricine, qui n'est plus considérée comme une vraie agglutinine.
↑D'où un autre acronyme utilisé pour le désigner : RCA120.
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