L'affaire Angélique Six est une affaire criminelle française relative au meurtre d'Angélique Six.
L'affaire a pour point de départ la disparition inquiétante d'une adolescente de 13 ans, Angélique Six, le mercredi 25 avril 2018 après-midi, après avoir laissé un mot expliquant qu’elle allait voir des amies. Elle n’est jamais rentrée. Deux jours après, sa famille a organisé une battue dans le quartier de l’Agrippin, où elle réside, sans résultat.
Un suspect, David Ramault, âgé de 45 ans, est interpellé puis placé en garde à vue et écroué trois jours plus tard pour avoir tué la jeune adolescente. C’est ensuite lui-même qui conduit les policiers, au chemin forestier de Quesnoy-sur-Deûle, une des communes de Lille, l’endroit où il avait abandonné le corps de la jeune fille. L'enquête a révélé que la victime a été violée avant de mourir par strangulation.
Une marche blanche a eu lieu en mai 2018 et une autre fin avril 2019 en mémoire d'Angélique Six.
Le 6 mai 2018, après ses obsèques à l'église Saint-Vaast de Wambrechies, Angélique est enterrée dans l'intimité des siens.
La victime
Angélique Six, 13 ans, originaire de Wambrechies, les yeux bleus, des taches de rousseur et les cheveux blonds, mesure 153 cm. Elle est la fille de Corinne Six, mère au foyer, et de Frédéric qui ne travaille plus, arrêté par deux accidents cardiovasculaires successifs. Elle a été décrite par ses proches comme « une petite fille qui a toujours le sourire aux lèvres », « qui était toujours déterminée, pleine de vie, pleine d'ardeur ». « Angélique avait tellement d’énergie… Elle courait partout, elle sautait partout, toujours souriante », raconte Carine, une amie. Angélique et sa sœur aînée, Anaïs, étaient très fusionnelles, avec sa mère aussi. Elle était scolarisée en cinquième au collège Flandre. C'était la cadette de la famille[1].
L'auteur des faits
David Ramault, 45 ans, père de deux enfants, chauffeur de bus depuis 2014 dans la région lilloise, est inscrit au Fijais pour « des faits commis en 1994, qualifiés de viol avec arme, attentats à la pudeur aggravés et vol avec violence » en 1996[2],[3]. Seule sa femme était au courant du passé de son époux, lequel lui aurait expliqué qu'il avait « juste violé une femme, avec des copains, en étant sous l'emprise d'alcool », d'après elle : il avait fait de la prison étant jeune car il avait violé une femme, pas une enfant dans ce qu'il lui avait dit. C’était un délire débile mais un délire de copains[4],[5].
Sa première victime était âgée de 13 ans. En rentrant du théâtre pour rejoindre sa mère, David R., qui avait le visage dissimulé sous un casque, l'agresse avec un couteau, avant de la violer. Quinze jours plus tard il est arrêté puis jugé, le jour de son procès il s'était « excusé » auprès de sa victime, ce qui est selon elle, nettement insuffisant[6],[7],[8],[9].
Un de ses collègues le décrit comme une personne discrète ; et une des amies de sa femme le décrit comme souriant, très calme, très posé, très agréable. Il disait toujours bonjour, toujours le sourire au visage. « Je ne l'ai jamais vu en colère. » Après le meurtre d'Angélique, elle a même dit « C’est vraiment un sentiment de trahison, de dégoût, de honte. Honte d’avoir pu être amie avec lui »[5]. Même les collègues du suspect se sentent trahis[10].
Une ancienne victime du suspect a eu un pressentiment quand elle a appris la mort d’Angélique[11],[12],[13].
Selon un témoignage, quelques jours avant le meurtre d'Angélique, David Ramault se serait exhibé devant des adolescents dans un bus[14],[15],[16],[17].
Les faits
Jour du meurtre
Le 25 avril 2018, Angélique disparaît. Ce jour-là, c’est également le jour de repos de David R. Il est seul chez lui, sa femme et ses enfants sont partis en vacances dans le sud de la France.
Il s'est rendu à Lille où il a acheté dans un sex shop des pilules contre les troubles de l'érection et de la bière. En rentrant chez lui, il va en absorber deux ou trois et également trois canettes de bière, il regarde la télévision en début d'après-midi et s'endort. L'homme se réveille peu après « dans un état second », il sort pour prendre un peu d'air.
En passant devant le jardin où se trouve la jeune fille, il prétexte avoir un colis à remettre à ses parents, et il l'emmène chez lui. L’adolescente l'a suivi volontairement sans méfiance, car elle le connaît, c'est son voisin. Il l'emmène donc chez lui, son domicile qui est à quelques centaines de mètres de chez elle. Il la fait rentrer dans la maison et lui offre à boire, ils commencent à parler. Très rapidement, il en vient à lui poser des questions de plus en plus intimes. Elle cherche à partir face à ce genre de conversation, et comme il l'en empêche, elle se met à crier. Il la maintient de force au point qu'elle se cogne d'ailleurs dans la table de séjour. Il indique que lorsqu'elle a commencé à se débattre, il a compris qu'il fallait qu'il la tue. Il indique également que l'ensemble de toutes ces violences n'a pas duré plus d'un quart d'heure.
Par la suite, il nettoie le logement, notamment des traces de sang et se débarrasse du téléphone de la victime, de ses vêtements et aussi de ses propres vêtements. Il met le corps de la jeune fille dans une valise qu'il met dans le coffre de sa voiture et part avec cette voiture. Il s'arrête en chemin pour acheter une pelle, il est à ce moment-là environ 19 h 15. Ensuite il ne roule pas très loin puisqu'il va à la commune où elle était l'après-midi. Il s'arrête à l'entrée du bois. Selon lui par hasard, il dit ne pas connaître les lieux. Il s'est arrêté à cet endroit là. Il tente de creuser un trou mais comme il n'y parvient pas, il finit par la dissimuler dans un fourré et l'abandonne là.
Ensuite, il revient chez lui et écrit une lettre à sa femme et une autre à ses enfants. Finalement, il ne les remet pas mais les place dans un classeur où elles seront découvertes[1],[18],[19],[20].
Arrestation et aveux
Le témoignage d'un garçon de 10 ans a été crucial. Il a dit aux enquêteurs que le jour où Angélique a disparu, il y avait un homme qui avait adressé la parole à la victime et ce garçon était à ce moment-là à côté de celle-ci. Il leur a fourni un portrait. Les enquêteurs ont fait des cherches sur le Fijais et ont également interrogé les voisins. C'est David R. d'après les descriptions fournies par ce garçon et les voisins. Le suspect est rapidement interpellé puis placé en garde à vue. Toujours selon ce même témoignage, l’adolescente a suivi volontairement l’individu en question, assure le parquet de Lille[21]. Au cours de ses auditions, il « a très rapidement avoué les faits », poursuit le procureur de Lille. Selon BFM TV, il aurait dit l'avoir étranglée. C’est ensuite lui-même qui a conduit les policiers, vers 1 h 30 du matin, à l’endroit « où il avait abandonné le corps de la jeune fille », poursuit le procureur de la République de Lille, Thierry Pocquet du Haut-Jussé[22],[23],[24].
Son avocat a évoqué que son client était complètement bouleversé, conscient de ses actes, rongé par le remords, il était perdu, il a même pleuré à plusieurs reprises, ce n'est pas un monstre froid et calculateur, c'est juste un homme perdu en détresse[25],[26],[27].
Menaces, dégradations et injures
Laetitia Ramault (infirmière), femme de l'intéressé pendant 16 ans, dit avoir rétrospectivement vécu avec un inconnu et est la cible d'insultes et de menaces sur les réseaux sociaux. Des inconnus s'en sont pris à sa maison. Un jet de pierre a brisé une vitre de la façade, sa maison est sous scellés. Elle a porté plainte, et afin d'éviter toutes représailles et protéger ses enfants, elle a déménagé. Ils bénéficieront d'un soutien psychologique. Elle a choisi de se constituer partie civile, s'estimant elle aussi victime des agissements de son mari. De même, elle va entamer la procédure de divorce. Par ailleurs son mari a été placé en détention provisoire à l'isolement et a été transféré dans un hôpital psychiatrique pour détenus à Seclin, dans le Nord[28],[29],[30].
Elle évoque aussi « un acte impardonnable, monstrueux, et que bien évidemment son acte est juste prémédité »[31],[32].
Le 23 juin 2018, on apprend que la demande de constitution de partie civile de Laetitia a été rejetée. Son avocate décide de faire appel[33],[34],[35].
Près d'un an plus tard, l'épouse de David Ramault, meurtrier présumé d'Angélique, s'exprime. Elle explique notamment être « en reconstruction » après avoir vu sa vie s'effondrer avec la mise en examen de son ancien compagnon, sa douleur n'est rien comparée à celle de la famille d'Angélique. Concernant l'enquête, elle avance prudemment. David R. a vu des experts psychologiques et psychiatriques, et a récemment été auditionné par les juges d'instruction. Mais les enquêteurs cherchent à savoir s'il a fait d'autres victimes pendant les vingt ans qui l'ont séparé de sa première condamnation[36].
Suites judiciaires
En prison
David R. est bien conscient des faits qui lui sont reprochés[37],[38].
En prison, il a écrit une lettre pour tenter d'expliquer son geste à son avocat avec des détails précis. Après le meurtre d'Angélique, comment il s'est débarrassé du corps de la victime pour se sauver. Il voulait tout avouer à sa femme, mais il a renoncé[39],[40],[41],[42]. Ces extraits de la lettre du meurtrier présumé ont d'ailleurs mis en colère les parents de la victime. « Le sentiment qu’on a eu et qu’ils ont eu, c’est d’avoir ajouté de l’indécence à l’horreur », rapporte Audrey Jankielewicz, l'avocate de ces derniers[43],[44],[45],[46].
Le meurtrier présumé est extrait de sa cellule de la prison de Sequedin pour se rendre dans sa maison familiale, il est emmené à son domicile à Wambrechies accompagné par des policiers et des BRI et des magistrats sans que l'on sache, pour l'instant, dans quel but[47].
Le 29 avril 2019, David R. a été entendu pour la première fois, au palais de justice de Lille, par la juge d’instruction chargée du dossier de la mort d’Angélique Six. Ce premier interrogatoire est aussi le préalable à une reconstitution qui pourrait être organisée ces prochaines semaines ou ces prochains mois au domicile du principal suspect. Le procès aura lieu sans doute en 2021[48],[49].
Le 24 avril 2020, Me Jankielewicz, l'avocat des parents et de la sœur d’Angélique, constate que la lenteur de la justice est injustifiée et inacceptable parce que dans cette affaire l'instruction du dossier est en cours[50],[51].
En mars 2021, il est finalement annoncé que le procès du meurtrier présumé, qui doit se tenir devant la Cour d'Assises du Nord, est fixé aux dates du 16 au 19 novembre 2021[52].La circonstance aggravante de récidive légale a été retenue pour le viol, mais pas la préméditation pour l'homicide.
Reconstitution
Le 24 mai 2019 débute la reconstitution dans la plaine de jeux de l’Agrippin, en présence de la famille de la victime et du principal suspect David R. qui est arrivé sur les lieux menotté et casqué. L’enjeu de cette reconstitution est donc de confronter le récit du suspect à la réalité du terrain et aux preuves matérielles[53],[54].
Procès
Le procès de David Ramault s'ouvre le devant Cour d'assises du Nord, il est jugé pour l’enlèvement, le viol et le meurtre d’Angélique Six[55].
Dès le début du procès David Ramault demande pardon aux parents de la victime et reconnaît être « un monstre »[56]. Il explique qu'il a été pris d'une "excitation soudaine" du fait notamment de la consommation d'alcool peu avant le drame, ce que conteste l'accusation selon qui il avait imaginé un projet de viol et ce qui expliquerait pourquoi il a cherché méthodiquement à camoufler les preuves (par exemple en laissant son téléphone portable à la maison pour se débarrasser du corps de l'enfant et d'autres éléments matériels)[57]. L'enfance de David Ramault a été marquée par des évènements difficiles : rupture avec sa mère, suicide d'un frère[58]... Les débats se concentrent aussi sur le fait que David Ramault n'a pas commis de faits répréhensibles entre sa sortie de prison en 2000 et le jour des faits, une période de 18 ans pendant laquelle il a semblé mener une vie tranquille[59]. Les experts interrogés décrivent de manière concordante une personnalité dominatrice, perverse et présentant un risque de récidive élevé. Celui-ci reconnaît d'ailleurs avoir été fréquemment tourmenté par des fantasmes de viol et être addict à la pornographie et à la masturbation même s'il a réussi à le dissimuler auprès de sa famille[60]. Son ex-femme lui reproche de lui avoir menti tout au long de leur vie commune. La procureur de la République requiert la peine maximale soit la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 30 ans ainsi qu'un suivi socio-judiciaire de 10 ans dans le cas où il sortirait de prison. L'avocat de David Ramault, reconnaissant l'extrême gravité des faits et les problèmes posés par la personnalité de son client demande seulement aux jurés de laisser un petit espoir à l'accusé en ne prononçant pas cette peine de sûreté maximale notamment parce que Ramault a aussi fait de bonnes choses au cours des dix-huit années précédant les faits. David Ramault demande à se faire soigner en détention "non pas pour lui mais pour la société"[61].
Le , la Cour d'assises du Nord condamne David Ramault à la réclusion criminelle à perpétuité. Par décision spéciale, la cour assortit cette peine d'une période de sûreté de 25 ans[62]. Dans la foulée du verdict, l'avocat de Ramault annonce que son client ne souhaite pas faire appel et qu'il ne l'aurait pas fait quand bien même la peine eût été maximale.
Hommages et réactions
Le , une marche blanche qui réunit des milliers de personnes est organisée en sa mémoire dans la petite ville de Wambrechies. Avant de participer la marche blanche, un lâcher de ballons a été fait pour symboliser le message d'amour pour balayer l'horreur[63],[64],[65]
Après la marche, Anaïs, sœur aînée d'Angélique, fait un discours en remerciant les participants ainsi que le garçon de 10 ans, celui qui a permis d'identifier le meurtrier. Un nouveau lâcher de ballons a eu lieu en fin d'après-midi[66],[67].
La famille et des amis ont créé le 15 mai 2018 l'Association Le Sourire d'Angélique pour que le souvenir d'Angélique perdure et pour accompagner financièrement sa famille en s'associant à des événements grâce auxquels plusieurs personnalités rendent hommage à Angélique, dont le footballeur Neymar (la jeune fille était supportrice du PSG)[68],[69],[70] ou encore le chanteur Kendji Girac[71],[72],[73],[74].
Le maire de Marcq-en-Barœul, Bernard Gérard a réagi également à cette affaire, il a déjà été confronté en 2010 à ce genre de problème. Il souhaiterait connaître le fichier des délinquants sexuels de sa commune afin qu'ils puissent composer un numéro spécial pouvoir appeler quelqu’un, quand ils en ont besoin. Le maire évoque aussi la rétention de sûreté doit être automatique. Enfin, il propose la castration chimique pour les aider[81].
Mais des psychiatres restent sceptiques face à de telle proposition[82].
La famille d'Angélique s'exprime un an plus tard[83], à la suite d'une
nouvelle marche blanche[84].
Notes et références
Notes
↑« Meurtre d’un mineur de quinze ans » est un terme de droit pénal contenu dans l'article 227-25 du Code pénal qui signifie dans le langage courant « meurtre d'un mineur de quinze ans ou moins » ; ce terme convient donc au cas de l’affaire Six car elle avait 13 ans le jour où elle a été tuée.