La sculpture bruxelloise est attestée du Moyen Âge jusqu'à nos jours. La ville de Bruxelles a été sans interruption un centre de formation autonome à l'art de la sculpture et a produit une longue continuité de sculpteurs, nés et formés à Bruxelles où qui y sont venus pour y faire leur formation. Principalement en ce qui concerne la production des « ymagiers », auteurs surtout de retables en bois, on a parlé d'école de sculpture bruxelloise[1] tout comme on parle d'école de peinture bruxelloise[2].
La destruction de presque l'ensemble des œuvres des sculpteurs bruxellois d'avant le bombardement de 1695 rend difficile l'étude stylistique d'œuvres d'artistes dont seul le nom reste connu à travers les archives. Toutefois l'on ne peut pas mésestimer le rôle de Bruxelles, ville de cour, dans son apport et son influence dans le cadre général de la sculpture flamande.
Historique
La sculpture bruxelloise commence à briller avec l'arrivée du sculpteur hollandais Claus Sluter qui a probablement été formé à Bruxelles, où il est enregistré en 1379 sur le registre de la corporation des tailleurs de pierre sous le nom de Claes de Slutere van Herlamen et qui y vécut de 1380 à 1385, avant de s'installer à Dijon.
L'art sculptural à Bruxelles, que certains ont appelé "école de sculpture bruxelloise"[3], commence à s'affirmer avec éclat dans la seconde moitié du XIVe siècle et a continué sans interruption sur sa lancée grâce à la formation corporative ininterrompue durant les XVe et XVIe siècles[4]. Les caractères originaux de son style ont fait l'objet d'études[5].
Jusqu'à présent toutefois, la sculpture bruxelloise a été peu étudiée dans son ensemble et ses représentants ont fait l'objet de très peu de recherches comme c'est le cas pour la sculpture des anciens Pays-Bas[6].
Bruxelles, à côté de Malines et d'Anvers a néanmoins joué un rôle dynamique dans le domaine de la sculpture[7] dans les anciens Pays-Bas, qui mérite d'être étudié tout autant que l'école anversoise ou l'école malinoise. Les archives témoignent de l'existence de nombreux ateliers actifs et formant des apprentis. Les sculpteurs de Louvain subissant l'influence de Bruxelles[8].
Peut-on parler d'école de sculpture bruxelloise ?
Malgré l'existence ininterrompue depuis le Moyen Âge d'une tradition sculpturale et d'une formation dans l'art de la sculpture à Bruxelles qui s'est perpétuée au sein de la corporation des Quatre-Couronnés,
il n'existe pas d'unanimité sur l'utilité descriptive et distinctive du terme "école de sculpture bruxelloise"[réf. nécessaire] parce que (1) les sculpteurs rangés sous ce drapeau n'étaient pas tous originaires de Bruxelles, (2) formés à Bruxelles ou (3) ont travaillé à Bruxelles que pour en temps limité (comme Duquesnoy qui appartenait toutefois à une famille de sculpteurs biens implantés à Bruxelles) ou pas exclusivement et (4) il n'y a pas de continuité de style au cours de six siècles[réf. nécessaire],[9]. Il est clair que la portée et la signification exacte du terme 'école de sculpture bruxelloise' restent encore à préciser, alors qu'on parle d'école de sculpture anversoise ou malinoise, pour lesquelles on pourrait faire les mêmes remarques que ci-dessus. Il ne faut pas être né dans une ville où y rester à demeure pour faire partie de son école artistique. Memling né en Allemagne fait bien partie de l'école brugeoise. L'on parle aussi d'école de peinture bruxelloise.
Quelques représentants connus de l'art sculptural à Bruxelles
Parmi les sculpteurs nés à Bruxelles et y ayant reçu leur première formation, on peut citer :
Adolphe van Troestenbergh, mort assassiné avant 1527 par Antoine II Keldermans le fameux architecte[10], fils de Hans (Joannes) Troestenbergh, cité comme faiseur d'orologes à Bruxelles en 1485[11].
Liste de sculpteurs admis comme maîtres aux Quatre-Couronnés de Bruxelles
La liste qui suit donne le nom de maîtres du métier des Quatre-Couronnés de Bruxelles, ainsi que de certains de leurs apprentis[14].
1469 : Jean Gesellekens, beeldesnidere à Bruxelles, vers 1469.
1469 : Aerd (Arnould) Moens, beeldesnidere à Bruxelles vers 1469.
1513 : Arnoud Zadoon, beeldesnidere, cité en 1513.
1515 : Jacques Daret, sculpteur à Bruxelles, cité en 1515.
1621. André Lanckmans, cité comme maître en 1621. Il eut comme apprentis :
Nicolas Popluer, étranger à Bruxelles, reçu comme apprenti le .
Henri Lanckmans, étranger à Bruxelles, apprenti chez André Lanckmans en 1623.
1621. Arnould Coens, cité comme maître en 1621, déjà actif en 1614. Il eut comme apprenti :
Nicolas de Prez, étranger à Bruxelles, reçu comme apprenti le , il mourut avant d'être passé maître.
1621. Josse Sterck ou Stercx, cité comme maître en 1621. Il eut comme apprentis :
Antoine Hulsbos, bourgeois de Bruxelles, reçu apprenti le .
Jean Suetens, reçu apprenti chez Josse Stercx le .
Henri Bormans, apprenti chez Josse Stercx en 1625.
1621. Nicolaes Diodoni (ou Nicolas Diedon ou Diodone), cité comme maître en 1621, fut doyen des Quatre-Couronnés, il était encore vivant en 1642. Il compte parmi ses apprentis :
Gérard van Opstal, bourgeois de Bruxelles par naissance, reçu apprenti chez Nicolas Diodone le .
Philippe de Knibbes, reçu apprenti chez Nicolas Diodone le .
1621. Laurent Sterckx, prête serment de maître le . Il eut comme apprenti :
Nicolas Willems, bourgeois de Bruxelles, reçu apprenti le .
1621. Abraham Van Avont, prête serment de maître le . Il eut comme apprentis :
Pierre Van Avont, étranger à Bruxelles, reçu apprenti le et fut admis comme maître en 1625, encore actif en 1631.
Mathieu Steps, fils de Mathieu, bourgeois de Bruxelles, reçu apprenti chez Abraham Van Avont le .
Josse Denens, apprenti chez Abraham Van Avont en 1625.
1622. Pierre Van Avont, étranger à Bruxelles, reçu comme apprenti chez Abraham Van Avont le , fut ensuite reçu maître en 1625. Il est encore cité en 1631. Il eut comme apprentis :
Charles Raes, bourgeois de Bruxelles, apprenti chez Pierre Van Avont en 1631.
Thomas de Liewet, bourgeois de Bruxelles, apprenti chez Pierre Van Avont en 1631.
Guillaume Van Avont, premier fils de maître, reçu apprenti chez Pierre Van Avont sans doute son père, en .
1622. Jérôme du Quesnoy, cité comme maître alors qu'il n'avait que vingt ans. Il eut comme apprentis :
Ghislain Poille, étranger à Bruxelles, reçu apprenti le .
Henri Steps, premier fils de maître, apprenti chez Jérôme du Quesnoy en 1625.
1622. Louis Blondel, cité comme maître en 1622. Il eut comme apprenti :
François Van Cauwenberg, bourgeois de Bruxelles, reçu apprenti le .
1623. Jacques Cassenée, admis comme maître le .
1623. François Van Bleyenberch, admis comme maître le .
1625. Pierre Van Vuytrecht, ayant fait son apprentissage à Anvers, est reçu maître en 1625.
1625. Pierre Van Avont, étranger à Bruxelles, reçu apprenti le chez Abraham Van Avont et fut admis comme maître en 1625, encore actif en 1631.
1631. Roland Kips, admis comme maître en 1631.
1641. Jean Tons, admis comme maître le .
1641. Vincent Anthoni alias Anthoine est reçu maître le . Il eut comme apprentis :
Gilles de Winde, reçu apprenti chez Vincent Anthoni le .
Guillaume du Gailler, reçu apprenti chez Vincent Anthoni le .
Jean de Craen, premier fils de maître, reçu apprenti chez Vincent Anthoni entre les Saint-Jean 1652 à 1653, deviendra maître en 1662.
François du Sarth, reçu apprenti chez Vincent Anthoni entre les Saint-Jean de 1656 à 1657.
1643. Jean de Monsi, cité comme maître en 1643.
1650. Nicolas Sterck ou Stercx, reçu maître en 1650. Il eut comme apprentis :
Nicolas Melincx, étranger à Bruxelles, reçu apprenti chez Nicolas Sterck entre les Saint-Jean 1653 et 1654.
Jacques Van de Putte, premier fils de maître, reçu apprenti chez Nicolas Sterck entre les Saint Jean de 1656 à 1657.
1650. Tobie de Lelis, reçu maître en 1650. Il eut comme apprentis :
Pierre Lodewycx, bourgeois de Bruxelles, reçu apprenti chez Tobie de Lelis entre les Saint-Jean 1652 et 1653.
Jean Cabiliaux, bourgeois de Bruxelles, reçu apprenti chez Tobie de Lelis entre les Saint-Jean de 1653 à 1654.
1651. Arnould (Van) Moerevelt, reçu maître en 1651. Il eut comme apprentis :
Philippe de Backer, reçu apprenti chez Arnould Moerevelt entre les Saint-Jean de 1655 à 1656. Il devint maître en 1666.
Nicolas Renart, à partir de la Noël 1656, apprenti chez Arnould Moerevelt.
Jean Cosyns, apprenti en 1659 chez Arnould Moereveld depuis le Carnaval, fut admis comme maître en 1678.
1653. François Van der Meren, admis comme maître en 1653.
1653. Pierre Van Obberghen, admis comme maître en 1653.
1653. Jean Van Denis, cité comme maître en 1653. Il eut comme apprenti :
Jean Van Avont, bourgeois de Bruxelles, reçu apprenti chez Jean Van Denis entre les Saint-Jean de 1653 à 1654.
1654. Jean Voorspoel, admis comme maître en 1654. Il eut comme apprenti :
1666. Philippe de Backer, chez Arnould Moerevelt en 1655, reçu apprenti dans le courant de l'année entre la Saint-Jean 1655 et 1656. Fut reçu maître en 1666.
1669. Jean Huygeloos, admis comme maître en 1669.
1670. Henri Van den Schilde, admis comme maître en 1670.
1673. Thierry Willekens Van Weede, admis comme maitre en 1673.
1715. Gilles-Guillaume Ballant, admis comme maître en 1715.
1715. Jean-Baptiste Van der Haeghen, admis comme maître en 1715.
1716. Jean de Witte, admis comme maître en 1715.
Bibliographie
Livres imprimés
Messager des sciences historiques, des arts et de la bibliographie de Belgique, Gand, année 1854 : "Archives des Arts, des Sciences et des lettres, sculpteurs et sculptures, Noms des sculpteurs qui ont fait partie du métier des Quatre-Couronnés à Bruxelles, depuis 1621 à 1716". Exemplaire en ligne.
Guillaume Des Marez, L'architecte Jean Van Ruysbroeck et le XVe siècle Bruxellois, Bruxelles, 1923.
J. Duverger, De Brusselsche steenbickeleren, beeldhouwers, bouwmeesters, metselaars enz. der XIVe en XVe eeuw, Gand, 1933.
Annales de la Société royale d'archéologie de Bruxelles
Brigitte D’Hainaut-Zveny, Miroirs du sacré. Les retables sculptés à Bruxelles. XVe – XVIe siècles, CFC-Éditions, Bruxelles, 2005, (ISBN2-930018-55-0).
Georges-Henri Dumont, Histoire de Bruxelles : biographie d'une capitale, Bruxelles : Le Cri éditions, 2001, pp. 181-182.
Manuscrit
Notice des peintres, sculpteurs, architectes et graveurs, natifs de Bruxelles, avec la liste de leurs principaux ouvrages. Manuscrit in-folio de 223 pages, provenant de la bibliothèque de Georges-Joseph Gérard, acquise par le gouvernement des Pays-Bas et transposée à La Haye[17]. (À la suite d'un échange, la bibliothèque de Georges-Joseph Gérard, reposant à La Haye, est revenue à Bruxelles vers 2010 (?) et a intégré les collections de la Bibliothèque Royale Albert Ier à Bruxelles).
Notes et références
↑Cette expression est reprise comme telle des Annales de la Société royale d'archéologie de Bruxelles, 1921.
↑Yvonne Thiéry, Les peintres flamands de paysage au XVIIe siècle. Le Baroque anversois et l'École bruxelloise, édition révisée par Michel Kervyn de Meerendré, éd. Lefèbvre et Gillet, 1987 ; Van Schout et de Patoul, Au sujet de l'école bruxelloise après Van der Weyden, 1994 ; Guy Delmarcel, La tapisserie flamande du XVe au XVIIIe siècle, 1999, p. 47 : « Après la mort de Van der Weyden (1464), son style se perpétue parmi les peintres bruxellois, et l'école de peinture bruxelloise connut ces années-là un grand essor » ; Yvette Vanden Bemden, « Les vitraux de la première moitié du XVIe siècle conservés en Belgique. La collégiale Sainte-Waudru de Mons », in : CORPUS VITREARUM, tome V, Namur, 2000, p. 199 : « Ce maître de la légende de sainte Catherine, très éclectique et qui reprend de nombreux motifs plus anciens d'autres peintres, particulièrement de Rogier van der Weyden, est bien représentatif de l'école bruxelloise de peinture de la fin du XVe siècle-début du XVIe siècle qui innove peu et perpétue la tradition des décennies précédentes ».
↑Annales de la Société royale d'archéologie de Bruxelles, 1921 : « D'autres Van Ruysbroeck ou Van den Berghe - car les deux noms apparaissent simultanément - sont cités dans la seconde moitié du XIVe siècle ; ils appartiennent tous à cette école de sculpture bruxelloise qui, précisément à cette époque commence à s'affirmer avec éclat ».
↑Le Folklore brabançon, 1976, p. 103 : "Ces chefs-d'œuvre appartiennent tous deux, à la sculpture bruxelloise, très florissante aux XVe et XVIe siècles".
↑Albert Marignan, Jean Georges Platon, Maurice Wilmotte, Le Moyen Âge, 1956, volume 62, p. 240 : "Les caractères originaux de la sculpture brabançonne et en particulier de la sculpture bruxelloise au Moyen Âge sont analysés par le comte J. de Borchgrave d'Altena".
↑Comme l'écrit Denis Coekelberghs : « À l’exception des XVe et XVIe siècles, la sculpture est restée le parent pauvre de l’histoire de l’art des Pays-Bas méridionaux jusqu’à il n’y a pas si longtemps ». Voir : [1]
↑Denis Coekelberghs, compte rendu sur l'exposition Les sculpteurs malinois en Europe (1780-1850), Malines, Lamot et Museum Schepenhuis du 17 février au 23 avril 2006 : "Un des principaux constats mis en évidence dans cet ouvrage concerne le rôle particulièrement dynamique joué par les artistes issus du duché de Brabant et de ses principales villes que sont Bruxelles, Anvers et Malines, à côté de cet autre centre artistique de premier ordre qu’était la principauté de Liège". [2]. Et : Pierre-Yves Le Pogam, Sculpture à la lettre: promenade épigraphique au département des Sculptures du musée du Louvre, Officina Libraria, 2008, p. 134 : "Dans les anciens Pays-Bas du Sud, les trois grandes villes du Brabant spécialisées dans la création en série de sculptures, Malines, Anvers et Bruxelles, utilisaient chacune des marques pour distinguer leur production et garantir la qualité".
↑Dominique Hollanders-Favart, Roger Van Schoute, Le Dessin sous-jacent dans la peinture: Colloque III, 6 - 7 - 8 septembre 1979 : le problème Maître de Flémalle-van der Weyden, College Erasme, 1981, p. 17 : "une grande vogue dans la sculpture bruxelloise et dans celle des centres secondaires qui en dérivent, comme c'est le cas de Louvain".
↑Barons Max et Jean-Claude de Troostembergh, « La famille de Troostembergh », dans : Le Parchemin, no 432, 2017, p. 486.
↑Son autre fils Claes van Troestenberge fut également horloger tout comme le fils de ce dernier Nicolas van Troostenberghe qui fut horloger de Charles Quint et de Philippe II (Le Parchemin, op. cit, passim. Cité en 1597-1598 : Jean-Louis Van Belle, Jan Caluwaerts et Albert Méhauden, Recensement des édifices et maisons de Bruxelles par le sieur de Chassey en 1597-1598, Bruxelles, 2017, p. 255, [2396] : « Le Pellican, à maître Nicolas Troostenberghe, louée p[ar] le cap[itai]ne Rettello, (Ratenau), Alleman. Est frère de l'archevesque de Salsbourch ».
↑Doyen du métier des Quatre-Couronnés de Bruxelles. Messager des sciences historiques, des arts et de la bibliographie de Belgique, Gand, année 1854, p. 363 : "Nicolas Diedon ou Diodone, cité comme maître, fut doyen du métier, vivait encore en 1642".
↑Messager des sciences historiques, des arts et de la bibliographie de Belgique, Gand, année 1854 : Archives des Arts, des Sciences et des lettres, sculpteurs et sculptures, Noms des sculpteurs qui ont fait partie du métier des Quatre-Couronnés à Bruxelles, depuis 1621 à 1716, p. 363 : « Gérard Van Opstal, bourgeois, apprenti chez Nicolas Diedon, reçu en cette qualité le 30 novembre (1621). Note 2 : La présence ici du nom de Gérard Van Opstal en qualité d'apprenti, et la qualification de bourgeois qui lui est donnée, tranchent la question du lieu de naissance de cet artiste en faveur de Bruxelles (Voy. Baert, pages 69 et 144) ».
↑Liste publiée dans : Messager des sciences historiques, des arts et de la bibliographie de Belgique', Gand, année 1854 : Archives des Arts, des Sciences et des lettres, sculpteurs et sculptures, Noms des sculpteurs qui ont fait partie du métier des Quatre-Couronnés à Bruxelles, depuis 1621 à 1716, pages 36 à 40.
↑Jan Caluwaerts, Poorters van Brussel, Louvain, 2005, p. 134 : « ende hem doen leeren met grooten coste de conste van beeltsnijderije soo t'Antwerpen bij Artus Quilinus den teyt van vijff jaeren, bij Laxen in Den Haghe twee jaeren, ende Lyden beltsnijder vande Coninck van Vranckrijck ook twee jaeren, ende oock bij Voirspoel ende andere vermaerde meesters ». Il y avait aussi plusieurs Voorspoel contemporains qui exerçaient leur art à Malines (Bénézit)